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ISTN : Rendez-vous avec la mort (8)

– Je sais bien que je ne mâche pas mes mots mais ne sommes-nous pas en démocratie ? Il n’y a rien de déplacé ou d’insultant dans mes chroniques. Ibrahim s’emballe davantage. Il en a gros sur le cœur :

– Je sais aussi qu’ils ont dans le collimateur ce qu’ils appellent les « Kabylistes », c’est-à-dire tous les partis ou les individus qui proposent une autonomie de cette région ainsi que tous ceux qui se sont engagés dans des projets culturels amazighs. Que je sache, les séparatistes, sans exception, sont des pacifistes dans l’âme. Ils n’ont jamais appelé à quelconque violence.

ISTN : Rendez-vous avec la mort (7)

Par rapport à cela, tu connais bien mes positions. En tant qu’universaliste, si j’avais une baguette magique j’effacerais toutes les frontières terrestres et maritimes de la Planète. Alors que peut-on me reprocher ? Mon père s’est battu pour l’indépendance de tout le pays, pas uniquement pour la Kabylie. Il en avait payé le prix fort, ballotté de prison en prison pour son engagement pendant la révolution.

Quant à la culture, pourquoi nous empêche-t-on de préserver ce qui nous a été transmis depuis des millénaires ? Les composantes de tamaziɣt sont des trésors linguistiques à préserver et à faire fructifier sans modération.

Ibrahim continue :

– De ce que j’en perçois, chaque président qui passe nous fait regretter le précédent et nous fait espérer le suivant. Les gens de ma génération se souviennent certainement des aléas qui se dressaient devant nous pour voyager à l’extérieur du pays, celui d’avoir le cran et l’audace d’affronter l’administration de Boumediene pour décrocher, en plus du passeport, le ticket exigé pour chaque projet d’évasion, à savoir l’autorisation de sortie du territoire.

Il a fallu attendre Chadli Bendjedid pour abroger ce cauchemar administratif.

Depuis Abdelmadjid Tebboune, traverser les frontières est désormais défendu pour tous ceux qui sont sous le coup d’une Interdiction de sortie du territoire national, la fameuse ISTN, cette mesure arbitraire qui touche de plus en plus de citoyens, et qui vient de me frapper de plein fouet.

Pourtant, en ce qui concerne la liberté de circulation et l’interdiction de sortie du territoire national, la Constitution algérienne est claire : « Le droit d’entrée et de sortie du territoire national est garanti. Toute restriction à ces droits ne peut être ordonnée que pour une durée déterminée par une décision motivée de l’autorité judiciaire », stipule l’article 49 de la Constitution de décembre 2020.

De toute façon, nos dirigeants ont tous la cervelle d’une poule, alors qu’il nous faudrait des hommes à l’intelligence de souris.

– Qu’est-ce que tu racontes là Dda Ibrahim ? demande Hamid à son ami, visiblement balloté entre Bacchus et Dionysos.

– Je vais t’expliquer : il me revient en mémoire une expérience des années 1960-70 qui avait pour objectif de jauger les réflexes et les QI de certains animaux, apprivoisés ou sauvages de leur état. L’expérience consistait à placer un peu de nourriture et l’animal à évaluer de part et d’autre d’une grille de quelques mètres de longueur. Je ne me souviens pas de tous les animaux qu’on a fait défiler, mais parmi eux, la souris et la poule sont impossible à oublier, tant leurs réactions ne prêtent à aucune confusion des genres, en termes de réflexe et d’intelligence… (à suivre).

Kacem Madani

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