Jean-Claude Michot, né à Lyon, est un romancier au parcours atypique : après vingt années passées au volant de son taxi dans la ville des rives du Rhône et de la Saône, il se consacre à l’écriture à partir de l’âge de 60 ans, donnant naissance à une œuvre dense et diversifiée. Son expérience de chauffeur, constituée d’innombrables histoires croisées, s’impose aujourd’hui comme une source d’inspiration fondamentale, sans jamais être l’unique matrice de son style.
Les premières œuvres de Michot telles que 1927. Marthe, institutrice et fille-mère (2017), puis Jean le taxi marquent le début d’une écriture puissante, intime, souvent autobiographique. Ces textes rendent hommage à ses racines familiales – la figure de sa grand-mère et la souffrance de son père abandonné – et témoignent d’une écriture comme cri du cœur bien plus qu’exercice de style.
Installé désormais en Dordogne, dans le Périgord, Michot continue d’explorer la mémoire intime, l’identité provinciale et les tensions familiales, comme dans Les vignes de la veuve (2018), ancré dans le monde viticole, ou encore Périgord, 1930. Il était scieur de long (2022), où il s’attache à restituer la dure réalité ouvrière au début du siècle.
Ces dernières années, Jean-Claude Michot s’est affirmé comme un romancier prolifique, renouvelant constamment ses registres tout en approfondissant ses thèmes de prédilection. Il déploie notamment une série d’ouvrages à la croisée du roman noir, du récit de mémoire et du roman psychologique, avec une prédilection pour les vies cabossées, les secrets enfouis et les milieux modestes.
Avec Nom de code : C.19, Michot entre dans le territoire du roman contemporain à tonalité dystopique ou politique : à travers ce titre énigmatique, il interroge les effets d’une crise mondiale sur les destins individuels, dans un récit à la fois ancré dans le réel et empreint de suspense. L’écriture y est tendue, parfois nerveuse, marquée par un regard inquiet mais lucide sur notre époque.
Autour du personnage d’Albert, il développe un cycle romanesque original avec Les trois vies d’Albert, suivi de La quatrième vie d’Albert. Cette série suit un personnage en quête de réinvention, traversant différentes existences — sociale, intime, spirituelle — dans une tentative obstinée d’échapper à l’assignation. Jean-Claude Michot y mêle humour discret, tendresse pour l’errance humaine et critique sociale, dans une narration libre, parfois fragmentée, toujours habitée.
Enfin, L’affaire Aigle (2023) s’impose comme l’un de ses polars les plus sombres et ambitieux. Plongé dans une atmosphère dense et nocturne, le roman met en scène une série de meurtres énigmatiques dans un Lyon traversé par les ombres du passé et les failles de ses habitants. Michot y combine une intrigue efficace à une dimension plus symbolique, presque métaphysique, où l’aigle devient figure de menace et de puissance ambiguë.
Le dernier roman de Jean-Claude Michot est Une sombre histoire de famille (sorti le 7 juin 2024). Ce roman noir, empreint de suspense psychologique, explore les non-dits familiaux, les blessures transgénérationnelles et les secrets qui pèsent lourd sur plusieurs générations. Avec une écriture tendue et immersive, Michot interroge le poids du passé, l’héritage invisible et les tourments que l’on ne choisit pas toujours de vivre.
Dans Une sombre histoire de famille (2024), son dernier roman, publié en autoédition, il explore les non-dits et les blessures transgénérationnelles à travers un récit tendu et troublant, où le passé familial agit comme une bombe à retardement. Loin d’un simple drame domestique, le roman interroge ce que l’on hérite malgré soi, et ce que l’on choisit de taire.
Par ces ouvrages récents, Jean-Claude Michot affirme une écriture en mouvement, capable de jouer avec les codes du genre tout en conservant une voix très personnelle. Il poursuit, avec une énergie renouvelée, son exploration des vies discrètes, des douleurs silencieuses et des espoirs fragiles, dans une langue accessible, directe, mais toujours habitée.
La plume de Michot mêle la spontanéité du récit oral, l’efficacité du dialogue, la tension narrative du polar et la profondeur d’une chronique sociale. Son approche ne se réclame pas d’un style unique, mais d’une sincérité sans fard : il raconte la vie comme elle est, brute, complexe, faite de rencontres banales et de drames imprévus.
Son impact se mesure dans sa capacité à toucher un large public : ses romans suscitent l’émotion autant que l’adhésion, valorisés par la presse locale et les lecteurs en quête d’authenticité. En s’immergeant dans des univers parfois populaires, parfois intimes, Michot réenchante les figures oubliées – taxi, scieur, institutrice, artisan – et fait de leur existence ordinaire un matériau universel.
Aujourd’hui, à la retraite, il poursuit son œuvre d’écrivain prolifique, émaillant la scène littéraire d’œuvres variées et engagées. Son apport réside dans cette voix singulière : celle d’un homme ayant vécu, écouté, observé, et qui, désormais, transpose la vie en mots avec la justesse et la simplicité d’un conteur. Un nouveau livre est déjà attendu : Max en Russie, qui promet d’élargir encore un peu plus l’horizon de son imaginaire.
Brahim Saci