Que le lecteur soit convaincu que ma position fut très ambivalente, hésitante et partagée, avant que je ne prenne une position très sévère à l’égard des Jeux méditerranéens à Oran. Beaucoup trop d’hésitations pour un Algérien qui ne peut envisager une quelconque admiration devant un régime militaire qui organise des jeux alors que des militants de la libre parole croupissent dans ses geôles.
Pourquoi cette hésitation initiale ?
Inhabituelle chez moi lorsqu’il s’agit du régime militaire, elle a deux raisons. La première, la moins honorable, est qu’il s’agit de ma ville d’enfance. Qu’elle accueille tant de sportifs et tant de monde de différents pays, comment ne pas avoir une petite pensée émue ?
Mais il faut vite se ressaisir car les sentiments sont toujours une grande faiblesse que l’on oppose aux militaires et aux religieux.
La seconde est beaucoup plus classique chez les démocrates. Le débat a toujours été fort, y compris dans leur propre conscience, sur la nécessité de faire une distinction entre le peuple et le régime politique. Il faut encourager le sport, l’éducation de la jeunesse et l’art, même dans un pays à dictature militaire féroce nous dit cette seconde pensée.
La justification est que cette société sera plus saine et protégée par une armure intellectuelle et de bien-être qui la rendent étanche aux tentatives du régime militaire de l’endoctriner et de la faire plier.
Oui, mais… !
Il faut bien se rendre compte que cet article ne fait pas la critique du sport et des jeunes sportifs mais des manifestations de masse, médiatisées et glorifiées par le régime militaire.
Tout cela serait louable si nous n’avions pas le recul nécessaire depuis quatre mille ans, notamment depuis la Grèce antique et l’empire romain.
Pour la première, créatrice des jeux que l’on dénommera plus tard, les Jeux Olympiques, elle n’avait aucun objectif qui ressemblât à la légende future. Cette légende des jeux antiques puis celle qui leur donnera une nouvelle existence au XIXème siècle par le baron Pierre de Coubertin, se sont bien installées dans la mémoire collective d’une manière sélective et amnésique.
Ces jeux étaient la façon de communiquer sur la grandeur d’une société dont les valeurs étaient surtout celles de la puissance, de la guerre, des conquêtes violentes et du racisme. Rien à avoir avec la glorieuse nation dont nous gardons un mythe absolument erroné (ou partiel).
Pour le second exemple, Rome, nous retiendrons la très célèbre expression de Juvénal, poète et écrivain, qui vécut à Rome entre le premier et le second siècle avant Jésus-Christ. « Panem et circenses » que l’on traduit par « du pain et des jeux » .
Inutile d’en rappeler le sens tant cette expression est connue, y compris par tous les collégiens du monde. Le poète voulait sensibiliser la population romaine à l’état d’anesthésie, nourrie par le pain et les jeux du cirque afin d’oublier les actes du régime autoritaire et guerrier.
Durant toute cette longue histoire, les despotismes ont trouvé un allié facile à manier pour occuper et faire adhérer les populations. C’est une manœuvre bien connue, tout autant que la politique de l’ennemi extérieur (le péril extérieur) encore plus utilisé, comme celui des généraux algériens avec le Maroc et le « monde occidental et colonial ».
Je ne peux accepter qu’une population tombe dans le piège des jeux, propice à la communication et au prestige d’un régime brutal alors que la liberté d’expression est bannie, que la terreur musèle la presse et que les démocrates militants soient incarcérés pour crime d’opinion.
Des exemples d’utilisation de la communication du prestige d’un régime brutal par le sport, il y a une quantité qu’on ne peut rappeler avec exhaustivité tant ils sont nombreux. Plus proche de nous, l’exemple de la coupe du monde de football en Argentine qui a glorifié le sinistre régime des colonels alors que des actes barbares de tortures et d’assassinats se passaient à quelques kilomètres des stades, notamment dans la base de l’état-major de la marine.
Hitler s’était glorifié de l’organisation nazie des Jeux olympiques à Berlin. La nation arienne était si monstrueusement raciste qu’elle en était venue à se fâcher lorsqu’un athlète noir emporta une médaille d’or en sprint.
L’exemple des jeux de Moscou n’est pas en reste dans cette liste fâcheuse du mélange entre la propagande des régimes autoritaires et le sport organisé dans une manifestation de masse.
Qui, dans ma génération, ne se souvient pas des « mouvements d’ensemble », très répandus et médiatisés dans le pays où la jeunesse exécutait des figures avec des centaines de jeunes collégiens et lycéens amassés dans les stades. La parfaite illustration d’un peuple qui est uniforme, coordonné et discipliné, soit l’image que se font les dictatures de son domptage.
Voilà pourquoi je ne peux adhérer à l’idée d’une manifestation collective qui est censée créer un enthousiasme de la jeunesse et du peuple. Soit un mélange d’objectif de santé, de plaisir et de convivialité des sociétés qui semblent artificiellement se rapprocher dans un moment de fraternité, si rare.
Ma ville d’Oran est visible dans les médias et véhicule, selon la majorité de la population, une image de fierté et de valeurs positives de l’humanité.
Derrière les cris enthousiastes du public, je ne peux m’empêcher d’entendre les cris de détresse et de douleur des incarcérés, des populations terrifiées, d’un peuple à genoux par la théocratie qui arrange les militaires.
Du sport, oui. Des jeux, très bien. De la jeunesse enthousiaste et de la fraternité des humains, absolument d’accord. Mais dans une démocratie. C’est cette seule condition qui m’aurait permis d’avoir un regard attendri pour ma ville d’enfance, ma regrettée ville.
Mais dès que l’on quitte le caractère massif et propagandiste des jeux, on peut féliciter et encourager les sportifs, individuellement, pour l’acharnement de leur entraînement, la beauté de leur sport et le sourire de leur victoire.
Et que les médailles d’or pleuvent sur ces jeunes, c’est toujours du métal précieux qui n’ira pas dans les poches des généraux.
Boumédiene Sid Lakhdar, enseignant
Tout ce qui est excessif est insignifiant. Comparez l’Algérie au régime nazi et à Hitler ! Fallait oser ! Bien que consciente des problèmes en Algérie, je suis fière comme beaucoup d’Algeriens que mon pays soit capable d’organiser une telle manifestation.
et je pense que tu as ete aussi tres tres fiere que tamazight, la deuxieme langue officielle de la tres officielle republique Arabe d’Algerie, soit interdite dans cette manifestation. Ou peut etre tu t’en foutais eperdument car ce n’etait pas ton probleme mais le probleme de millions
des Algeriens Amazigh!
Franchement et tu n’es pas la seule , ton attitude fait partiee des problemes de l’Algerie !