Cette chronique n’ambitionne pas d’apporter quelconque éclairage à l’Histoire mais de poser une simple question quant aux ambiguïtés qui émanent des bribes d’épopées que tout le monde connaît, et de mettre en relief l’incohérence liées aux fiertés que d’aucuns exhibent comme autant de gloires de nos ancêtres les Amazighs.
De but en blanc, j’avoue ne pas avoir lu l’œuvre d’Ibn Khaldoun. Les deux tomes (sur trois) de “L’Histoire des Berbères” reposent entre Hela Ouardi et Albert Camus, depuis des lustres.
Le livre qui laisse dubitatif est Histoire Inattendue des Arabes en Espagne, d’André Henri Argaz (*). Dans cet ouvrage l’auteur énonce “les historiens occidentaux, après avoir inlassablement interrogé textes et monuments anciens, ont élaboré des explications et des thèses. Qu’elles soient érudites ou superficielles, ces explications ont toutes un point commun : elles considèrent que la conquête, l’occupation et la civilisation mauresque de l’Espagne médiévale, comme l’influence sarrasine en Italie et en France, ont été l’œuvre exclusive des Arabes.
Le rôle des Berbères, quand on daigne leur en accorder un, se serait limité à celui d’hommes de troupe, de mercenaires au service des conquérants orientaux. L’ambition du présent ouvrage est, précisément, de contester cette thèse. Ou, du moins, d’introduire des éléments de réflexion conduisant à limiter cet exclusivisme arabe qui nous a toujours paru excessif et injuste”.
En d’autres termes, sans Tariq Ibn Ziyad et ses navires, les armées arabes n’auraient jamais pu conquérir la péninsule Ibérique. Corollaire, Tariq aurait donc été totalement acquis à la cause des conquérants mauresques !?
D’un autre côté, l’histoire nous apprend : 1) que Koceila est un chef berbère de la fin du VIIe siècle Il est principalement connu pour avoir résisté à la conquête musulmane du Maghreb, dans la partie orientale de l’actuelle Algérie et la Tunisie moderne, de 683 à 688 ; 2) que Kahina est une reine guerrière berbère qui combat les Omeyyades, lors de ladite conquête. Après plusieurs succès contre les envahisseurs musulmans, elle meurt au combat en l’an 703.
Au vu de ces rappels, il apparaît clairement que Tarik Ibn Ziyad et son armée se sont ralliés, pour ne pas dire rendus, aux envahisseurs arabes pour leur prêter main forte dans leur quête expansionniste, alors que Kahina a combattu les envahisseurs jusqu’à son dernier souffle.
Mais alors, pourquoi nos deux héros jouissent-ils d’une vénération quasiment identique de la part de tous les Amazighs ?
C’est une question que je me pose en toute naïveté, en tant que profane du fait historique et des détails sous-jacents à toutes les épopées qui ont jalonné notre histoire. Tout avis d’expert et autres commentateurs avertis serait le bienvenu.
À noter que les commentaires sont ouverts après modération de la première intervention, si tant est que les règles évidentes de bienséance sont respectées.
Kacem Madani
(*) André Henri Argaz, Histoire Inattendue des Arabes en Espagne, Editions Crémille et Famot, Genève, 1983.