Samedi 18 mai 2019
« La nuit se lève » d’Elisabeth Quin
Elisabeth Quin, présentatrice de 28 Minutes, un magazine d’actualité de la chaîne franco-allemande Arte, évoque sa maladie dans un livre sensible et riche d’expérience et de vécu. Les mots sont concis et taillés au scalpel contre ce mal qui guette ses jours.
Atteinte d’un double glaucome, l’auteur ne ressent pas la maladie. Certes, elle n’est pas douloureuse, mais « je la vis à chaque clignement. La maladie est devant mes yeux », écrit-elle.
Elisabeth décrit son chemin de croix pour comprendre ce mal qui déteint sur ses jours. Elle raconte son parcours de soins (collyre administré matin et soir, intervention au laser, gymnastique oculaire…) pour tenir en respect ce glaucome ravageur. Il y a aussi ces incessantes consultations de médecins. L’auteure en garde des impressions bien amères d’ailleurs. Les salles d’attente, ces médecins insensibles, car trop pressés et imbus de leur science. Des bons aussi, l’auteure en a vu certains ; plutôt éloignés des gros centres urbains de France. Que cherchent les médecins ? A faire baisser la pression intraoculaire pour empêcher la dégénérescence du nerf optique. Le Graal des chercheurs, c’est la reconstitution du nerf optique endommagé. Le verrai-je de mon vivant ? Pas sûr… »
Au final, l’ultime recours reste la chirurgie. L’opération n’est pas sans risque lui ont expliqué les spécialistes. Alors il faut continuer à vivre.
Avec beaucoup de témoignage, d’exemples, Elisabeth Quin nous prend la main pour narrer son histoire. Mais pas que. Nous rappeler aussi les expériences d’autres noms connus, comme l’écrivain américain Jim Harrison, le peinte Claude Monet qui, eux aussi, eurent à affronter « la nuit qui se levait » sur eux. Dans ce croisement de vécus, Elisabeth Quin ne se contente pas de se raconter, de livrer ses combats au lecteur, elle lui livre aussi toutes ses recherches sur le sujet. Elle en fait son sujet. Sa tour à prendre.
Le glaucome est la première cause de cécité dans les pays développés, nous explique-t-elle. « Un million de personnes en sont traitées en France, entre 400 000 et 500 000 personnes ignorent qu’elles en sont atteintes ».
Elisabeth Quin ajoute : « le glaucome est un tueur muet qui travaille dans l’ombre, prospère sur l’insouciance de son hôte et l’irresponsabilité de la puissance publique, toujours prête à crier au trou-de-la-Sécu mais incapable de prévoir et de se prémunir contre le coût énorme d’une maladie chronique en favorisant son dépistage ».
« La nuit se lève » n’est pas une succession de lamento. C’est un livre poignant en diable. Loin de là. Il y a de la volonté de vivre pleinement chaque instant. Si la nuit se lève, Elisabeth Quin est toujours debout.
Ceux qui tiendront ce livre entre les mains comprendront la nécessité de « profiter encore de la beauté du monde », des livres, des photos qu’elle collectionne dans sa cave… d’Elisabeth Quin. Voilà son programme.
Un jour ou l’autre, elle aura à passer sur cette table d’opération tant redoutée pour tenter de sauver ce qui reste de « merveillyeux ».
K. G.-A.
« La nuit se lève », d’Elisabeth Quin, chez Grasset Editions.