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vendredi 18 juillet 2025
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« La République des généraux – De Bouteflika à Tebboune », de Lyès Laribi, un régime sous uniforme

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Entre purges militaires, manipulations politiques et répression des contestations sociales, Lyes Laribi dissèque dans un essai percutant les ressorts profonds d’un pouvoir qui s’accroche au nom de la stabilité. Un document essentiel pour comprendre les rouages de l’Algérie post-Bouteflika.

2017–2019 : recomposition et verrouillage d’un régime à bout de souffle

Les années 2017 à 2019 marquent un tournant dans l’histoire récente de l’Algérie. Entre épuration militaire, contestation populaire (le Hirak) et transition présidée par l’armée, cette période révèle les failles d’un pouvoir qui se veut immuable. Dans Algérie : la République des généraux – De Bouteflika à Tebboune, publié chez Vérone Éditions en juin 2023, Lyes Laribi livre un essai incisif et documenté sur les dessous d’une « continuité autoritaire ».

Purges, clans et manœuvres de palais

En 2017, alors que la santé de Bouteflika se détériore, le général Ahmed Gaïd Salah engage une vaste opération de nettoyage au sein des institutions sécuritaires. Officiellement présentée comme une campagne anticorruption, elle vise surtout à écarter les proches du clan présidentiel. Gaïd Salah, devenu l’homme fort du régime, réorganise les centres de pouvoir autour de sa personne.

En février 2019, le Hirak éclate. Le général, d’abord favorable à un cinquième mandat présidentiel, change brusquement de cap et pousse Bouteflika vers la sortie en avril. « Il ne s’agissait pas de choisir le peuple, écrit Laribi, mais de sauver le régime. »

Des hommes de l’ombre à la lumière crue

Parmi les figures centrales de cette transition contrôlée, le général Wassini Bouazza, patron de la DGSI, joue un rôle trouble : il tente d’imposer Azzedine Mihoubi à la tête de l’État. Mais les rapports de force lui échappent. Il sera arrêté et condamné lourdement dès 2020. Quelques mois plus tard, Gaïd Salah meurt subitement, ouvrant la voie à Saïd Chengriha, son successeur à la tête de l’état-major, qui poursuit le remodelage sécuritaire selon ses propres lignes.

Un sommaire explosif

Le livre frappe aussi par sa construction. Chaque chapitre est une incursion dans les non-dits d’un pouvoir militarisé :

La chute de Rab Ezzair, L’ombre de Saïd, Les généraux et la cocaïne : révélations sur les liens entre pouvoir, drogues et réseaux parallèles.

La harga, la seule voie pour fuir la dictature, Le Hirak, un 5 octobre bis ?, Opération zéro Kabyle : analyse des réponses autoritaires à la contestation.

Démission ou coup d’État ? Coup de filet chez les oligarques, Tebboune, la continuité du Bouteflikisme ? L’auteur décrypte les jeux de dupes derrière les élections.

Pegasus, la mise à nu de la DDSE, Le SCORAT, un service au-dessus de la loi ? La gendarmerie, un corps malade de ses chefs : enquête sur les outils technologiques et institutionnels de la surveillance généralisée.

Qui sont les soutiens étrangers des généraux ? L’histoire selon les Tagarins : Laribi revient sur les appuis internationaux du régime et sa tentative de réécriture de l’histoire.

Chaque chapitre est bref, tendu, argumenté. L’écriture est directe, souvent empreinte d’une colère froide. Mais toujours portée par un souci de véracité.

Une voix qui dérange

Ce n’est pas un livre neutre. Lyes Laribi y parle aussi de lui. De son arrestation en 1992, de sa détention à In M’Guel et Blida, des tortures subies, de son exil. Son témoignage personnel renforce la charge politique du propos. Il oppose deux clans militaires : les « dafistes » (anciens déserteurs de l’armée française) et les « nationalistes », héritiers de la ligne dure.

Pourquoi ce livre est crucial en 2025 ?

Parce que les dynamiques dénoncées restent à l’œuvre. Parce que l’autoritarisme s’est durci. Parce que les médias sont muselés et que les opposants sont traqués. Parce que l’amnésie politique menace. Et que le peuple, malgré tout, continue de résister.

Ce livre mérite d’être lu, discuté, diffusé. Parce qu’il éclaire une époque que le régime tente de faire oublier. Parce qu’il documente, avec précision et engagement, une dérive autoritaire en marche. Et parce qu’il rappelle une chose simple : lire, c’est déjà résister.

Mourad Benyahia

Algérie : la République des généraux – De Bouteflika à Tebboune, de Lyes Laribi paru chez Vérone Éditions

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