Dimanche 27 janvier 2019
L’Algérie votera sur Ubu roi
La tragi-comédie du dramaturge français Alfred Jarry (1873-1907), interpelle notre conscience collective et nous alerte sur notre devenir. Sommes-nous devenus une caricature mondiale ou se laissent-on conduire vers le mur de l’humiliation ?
Plus de 100 candidats et candidates à la candidature veulent concourir à la magistrature suprême et se bousculent pour le siège du palais d’El-Mouradia. Le chiffre est tellement alléchant que l’observateur étranger serait séduit par cet Algérie qui n’a pas succombée à « l’automne arabe », devenant une terre de libertés démocratiques !
Sommes-nous réellement ainsi devenus ou allons-nous nous réveiller le 20 avril prochain dans une scène du film de John Krasinski, une journée intitulée Sans un bruit, avec des créatures mystérieuses et ultra-sensibles aux sons ?
Le hic de l’Algérie, une belle 4e puissance africaine, du moins sur le plan économique, est qu’elle devient de plus en plus un exemple de la dérive politique qui n’honore en rien ses 3000 ans d’histoire sociale et culturelle. Des formes de vie envahissent notre toile web, prétendant être les futurs premiers magistrats du pays, commandant au devenir des 43 millions d’être humains. Ces êtres ne font qu’exalter et extérioriser leurs frustrations et dérives de carnassiers, de lumpenproletariat, de marginaux, de fougueux et d’irréfléchis. Ils donnent l’impression de sortir tout juste du film The Thing (La Chose) de John W. Carpenter, datant de la terrible année de 1982.
Qui a bien lâché ces créatures des ruines calcinées de l’Histoire de mon pays ? Ce n’est certes pas, une main étrangère, puisqu’elle est parmi nous, si ce n’est en nous. Mon pays est devenu une caricature cybernétique, des éclats de rire dans un laisser-aller stupéfiant, des ricanements qui se font entendre dans un apolitisme religieusement entretenu et conservé. Par qui ? Par ceux et celles qui veulent régner sur des parcelles de terrain et non sur un pays d’avenir. Il n’y a pas lieu de les nommer, ils ne forment qu’un déchet humain, toxique et radioactif non recyclable. Ils ne sont que des « choses », ils se reconnaissent par leur dévouement aux maîtres penseurs de la déstructuration et de l’anéantissement de mon Algérie.
Annihiler le plus grand pays du continent africain, c’est charmer les intérêts de ceux qui en veulent à sa jeunesse, à son génie, ses richesses, ses langues et ses cultures. Déstructurer mon antique Algérie en 6 ou 7 Etats ou émirats ubuesques, en des « algerilands » que dirigeraient la haine et le nihilisme. Rester dans l’expectatif, c’est donner la main forte à la besogne en s’associant à la mise à mort de ma nation, mon Etat et non ses régimes.
Le roi Ubu avait bien éliminé les nobles afin d’enrichir son royaume. Mais dans le pays des Numides, des Maures et des Tel Tamasheq ce qu’il faut anéantir, ce sont ceux, qui prennent mon peuple pour une masse d’aliénés mentaux, des idiots de l’Histoire, des gueux et des bellâtres.
Une campagne électorale n’est pas un champ d’herbes sauvages. Partir en campagne politique c’est respecter le genre humain algérien, un humain de 3000 ans de civilisation qui ne cessa de se renouveler pour que cette terre demeure Tamurt U Mazigh : El-Djazair avec toute son heureuse mosaïque. La campagne qui m’entoure ne dure qu’une saison, mon pays lui, est éternel. Voir et écouter ces « choses » piétinés notre sol, nos cultures et notre lendemain, c’est partir en expédition avec eux pour un sale labeur. Les faires taire, c’est leur imposer le silence et à jamais.