On nous annonce pour début septembre l’introduction de l’anglais dans plusieurs formations des universitaires algériens. Non pas un renforcement des cours de langue mais l’introduction de l’anglais comme langue d’enseignement. Pire encore, l’objectif est de remplacer le français. C’est le massacre qui continue, une décivilisation extrême de ce pays.
Nous avons une langue arabe classique qui est une langue morte, aucune famille algérienne ne la pratique dans la vie courante. C’est la définition d’une langue morte.
Nous avons le français qui était généralisé et qui commence à disparaitre pour des raisons idéologiques.
Nous avons la langue berbère dont la généralisation a été interdite par une introduction nationale maladroite et inefficace, certainement sans volonté réelle.
Enfin, nous avions une langue nationale, issue de l’arabe mais culturellement implantée, qui n’a jamais fait l’objet d’un intérêt pour l’adapter à des fins de transmission scolaire.
Voilà que la dernière couche arrive, l’anglais, sous prétexte qu’il s’est imposé commercialement dans le monde, en remplacement du français qui est la « langue coloniale ».
Enseignement supérieur : l’anglais, langue d’enseignement dès septembre
J’attends la langue espagnole parce qu’elle est la plus parlé dans le monde. J’attends l’introduction de la langue chinoise et indienne parce que ce sont les pays les plus peuplés au monde. J’attends la langue russe car c’est l’allier politique du régime militaire.
C’est un massacre civilisationnel car toutes les cultures des peuples reposent sur le support d’une langue. L’état algérien veut multiplier les langues alors qu’il perd ses langues nationales et n’en a plus réellement.
Il est totalement stupide de croire qu’une communauté dans le monde, à l’intérieur d’un état-nation, se mette à parler massivement une langue extérieure. Cela n’a jamais été possible sans une colonisation.
Et encore, faut-il une période longue et une colonisation de peuplement. L’Allemand, par exemple, n’a jamais été incrusté d’une manière profonde au Cameroun. Il est aujourd’hui une trace ancienne et seuls les arrières grands-parents encore vivants peuvent prononcer quelques rudiments.
Tous les indiens ne parlent pas l’anglais, loin s’en faut, même s’ils ont été beaucoup plus confrontés à cette langue et qu’une minorité l’utilise avec une grande aisance.
Le régime militaire veut une Algérie multilingue, il a créé une population majoritairement bègue en toutes les langues.
Le renforcement de l’anglais à l’université, pourquoi pas. Mais son introduction comme langue d’enseignement est une chimère et un danger supplémentaire dans le massacre des langues.
Il n’y a plus de langues nationales en Algérie mais une vaste tchouchouka linguistique. Un désordre catastrophique et une régression de la culture nationale car une ou plusieurs langues, dès lors qu’elles ont une base anthropologique fortement enracinée, sont le véhicule d’une civilisation qui avance.
Je ne suis pas seulement en colère, je suis dévasté par l’infinie et dangereuse bêtise de ce régime militaire. Il ne veut pas seulement que nous nous écrasions contre le mur, c’est déjà fait, mais que nous explosions et disparaissions par la mort identitaire.
En voulant construire une nation multilingue par l’idéologie et la stupidité d’un nationalisme hypocrite, nous perdons les langues que nous avions historiquement.
Il ne faut pas seulement juger et condamner ces irresponsables, il faudra les effacer de notre mémoire nationale. Comme ils sont en train d’effacer nos langues nationales.
Boumediene Sid Lakhdar, enseignant retraité