23 novembre 2024
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Le 8 mars

L’OEIL DE ZINA

Le 8 mars

La Journée internationale de la femme est l’occasion de toutes les opérations marketing possibles et imaginables. On fait des « semaines de la femme », des journées de « l’entreprise au féminin ».

On parle des grandes figures militantes. Créative, courageuse, combattive. Comme s’il n’y avait qu’un seul modèle de femme qui méritait d’être mis en avant.

Fonder un foyer, maintenir une maison propre et éduquer ses enfants : quelle régression ! Sous prétexte de valeurs bien-pensantes, on érige un mur de glace entre les femmes dites « modernes » et les « femmes au foyer ».

Pour le 8 mars, j’aimerais parler des femmes de l’ombre. De nos mères, nos grands-mères, de ces femmes qui ont subi le patriarcat sans savoir ce qu’était le patriarcat. Qui ont élevé leurs enfants parfois avec les moyens du bord. Qui ont fait passer le monde entier avant elles, persuadées d’être nées sur terre pour accomplir la mission d’enfanter à leur tour.

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J’aimerais parler des femmes battues qui se rendent à l’hôpital et essuient la condescendance des femmes médecins se pensant modernes et autonomes alors que simplement mieux nées. J’aimerais parler de l’absolue manque de solidarité entre les femmes elles-mêmes. Faites l’exercice de passer une demi-journée dans un salon de coiffure (en France ou en Algérie le résultat sera le même).

Enfin, j’aimerais relever que l’existence même de cette journée internationale de la femme est la preuve du phallocentrisme universel de notre société. Ici en France, lorsque l’on parle de féminisme, on joue souvent la dichotomie entre le modèle occidental et le méchant modèle arabo-musulman privant les femmes de tous leurs droits. Parce que l’hypersexualisation des publicités et par conséquent des comportements n’est pas une violence quotidiennement faites aux femmes ? Tout comme le cumul des injonctions : être belle mais pas provocante, intelligente mais discrète, bonne mère mais pas négligée, être présente à la maison et faire carrière… La liste est longue, je m’arrête.

Désolée de l’écrire mais je ne me sens pas plus à l’abri de la misogynie de ce côté de la mer.

La marque française Decathlon a voulu commercialiser des hijabs adaptés pour courir. Notamment suite à un besoin relevé dans ses magasins marocains. L’opinion publique s’est enflammée. L’enseigne a reçu menaces et insultes, a été cyberharcelée et harcelée tout court. Face à la pression, trop forte, la marque a cédé et retiré les produits du marché.

Se couvrir serait un acte de soumission intolérable. Exit la liberté vestimentaire, exit la liberté religieuse. Un peu de racisme au frais du féminisme, après tout pourquoi pas.

Je regrette. Mais même au nom du féminisme, on ne peut pas sommer les femmes de s’habiller ou de se déshabiller, de se comporter de telle ou telle façon. On a tendance à oublier que le féminisme est d’abord un hymne à la liberté. Il est le combat de TOUTES les femmes : celles au bureau, celles à la maison, les grosses, les minces, les chevelues, les chauves, les voilées et j’en passe. Être féministe, c’est avant tout apprendre à laisser les femmes tranquilles.

Z. M.

Diplômée de Sciences Po après des études de droit international , Zina Mebkhout a travaillé 10 ans pour des grands médias français et allemands.

Binationale Algérienne et Française, elle garde un pied sur chaque rive de la Méditerranée et s’est installée à Marseille après des étapes à Paris, Berlin et en Afrique centrale. Cette passionnée d’écriture et de politique a récemment rejoint l’équipe du Matin d’Algérie. 

Auteur
Zina Mebkhout

 




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