Le Conseil d’État a validé jeudi l’interdiction du port de l’abaya à l’école, vêtement qui relève selon lui d’« une logique d’affirmation religieuse », a annoncé la haute juridiction administrative dans un communiqué.
Saisi en urgence, le juge a rejeté le recours de l’association Action droits des musulmans (ADM), qui demandait la suspension de cette interdiction au nom d’un risque de discrimination et d’atteinte aux droits. Mais pour le Conseil d’Etat cette interdiction « ne porte pas une atteinte grave et manifestement illégale au droit au respect de la vie privée, à la liberté de culte, au droit à l’éducation et au respect de l’intérêt supérieur de l’enfant ou au principe de non-discrimination ».
Le juge a en effet estimé que le port à l’école de l’abaya ou du qamis (son équivalent masculin) s’inscrivait « dans une logique d’affirmation religieuse, ainsi que cela ressort notamment des propos tenus au cours des dialogues engagés avec les élèves ». Or, « la loi interdit, dans l’enceinte des établissements scolaires publics, le port par les élèves de signes ou tenues manifestant de façon ostensible, soit par eux-mêmes, soit en raison du comportement de l’élève, une appartenance à une religion », rappelle la juridiction.
Le ministre de l’Éducation nationale Gabriel Attal avait annoncé le 27 août l’interdiction du port de l’abaya dans les écoles, collèges et lycées publics. Le ministre a aussitôt salué sur X (ex-Twitter) « une décision importante pour l’École de la République », qui doit « accueillir tous les élèves, avec les mêmes droits et les mêmes devoirs, sans discrimination ni stigmatisation ».
À l’inverse, l’avocat de l’ADM Vincent Brengarth a déploré « la pauvreté de la motivation » de la décision, estimant que le juge « n’a absolument pas pris en considération les témoignages » en « niant la dimension traditionnelle » de l’abaya. Cette question de l’aspect religieux ou non de l’abaya avait dominé l’audience mardi, les plaignants parlant de vêtement traditionnel et dans certains cas d’« effet de mode ». Mais pour le ministère de l’Éducation nationale ce vêtement « fait immédiatement reconnaître celui qui le porte comme appartenant à la religion musulmane ».
Le juge des référés a donc suivi le ministère, en soulignant que le port de l’abaya « a donné lieu à un nombre de signalements en forte augmentation au cours de l’année scolaire 2022-2023 ».
Dans un communiqué, le Conseil français du Culte musulman (CFCM) a « pris connaissance » de cette décision. Mais il a alerté sur certains « comportements intolérables de la part de quelques membres du corps éducatif envers des élèves de confession musulmane », refoulées selon lui parce qu’elles portaient « un kimono ou une simple chemise et un pantalon amples ».
Le débat judiciaire n’est toutefois pas clos, puisque d’autres associations et syndicats ont aussi déposé des recours, sur le fond donc à plus long terme, devant le Conseil d’État.
Avec Rfi