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Le FFS alerte sur une impasse multidimensionnelle et appelle à un contrat refondateur

Youssef Aouchiche

Après s'être compromis il ya un an dans une fallacieuse présidentielle, Youssef Aouchiche fait mine de découvrir la réalité.

À la veille de la rentrée sociale, le Front des forces socialistes (FFS) dresse un tableau sans concession de la situation du pays. Le parti rompt un tantinet avec ses discours de compromis et dresse un tableau peu reluisant de la gouvernance Tebboune-Chanegriha.

Dans une déclaration politique dense rendue publique,  ce jeudi 11 septembre, la plus ancienne formation de l’opposition met en garde contre une impasse multidimensionnelle – politique, économique, sociale et institutionnelle – qui, selon elle, menace l’avenir de l’Algérie si aucune réorientation profonde n’est engagée.

Un système politique « verrouillé » et en perte de légitimité

Le FFS dénonce une gouvernance marquée par « l’unilatéralisme, l’improvisation et le dysfonctionnement structurel ». Il fustige la judiciarisation du politique et le recours croissant à la gestion sécuritaire des affaires publiques, qualifiés d’« intenables » et « asphyxiants » pour la société.

Les arrestations arbitraires, les intimidations judiciaires et les « polémiques stériles » qui saturent l’espace public sont perçues comme les symptômes d’un verrouillage politique qui accentue l’opacité du pouvoir. Le parti critique également « le dumping politique », soit l’encouragement de structures para-politiques dénuées de représentativité, qui, à ses yeux, ne fait qu’« aggraver la crise et diluer le débat démocratique ».

Institutions fragilisées et entorses constitutionnelles

La direction nationale du FFS estime que le pays est « incapable de se conformer à ses propres règles ». Le report de la session parlementaire sans base constitutionnelle illustre, selon elle, « l’archaïsme d’un système qui adapte la Constitution à ses besoins ».

Pour le parti, cette dérive remet en cause l’État de droit et « fait vaciller le rêve d’une République démocratique », la Constitution devenant une « variable d’ajustement » plutôt qu’un cadre stable.

Une économie à bout de souffle

Sur le plan économique, le FFS dresse un bilan sévère : dépendance chronique aux hydrocarbures, inflation, dépréciation du dinar, marché informel florissant et inégalités croissantes. Les promesses de diversification restent lettre morte, résumées par « beaucoup d’annonces, peu de réalisations ».

La gestion « conjoncturelle » des dossiers clés – importations, secteur automobile, régulation du marché – est jugée révélatrice d’un manque de vision stratégique. Résultat : effritement du tissu productif, chômage endémique, baisse du pouvoir d’achat et précarisation de milliers de familles.

Une société en proie au désespoir

Le parti met également en garde contre une dégradation sociale préoccupante : montée de la délinquance et de l’addiction, explosion de la « harga » qui ne concerne plus seulement les jeunes chômeurs mais désormais des familles entières. Autant de signaux d’alarme qui traduisent un profond découragement, notamment chez la jeunesse censée incarner l’avenir.

Un pacte national pour « refonder l’État »

Face à ce constat, le FFS appelle à l’élaboration d’un nouveau contrat social et politique, fruit d’un dialogue national inclusif et sincère. Ce pacte devrait :

Refonder l’État sur la primauté du droit, la séparation des pouvoirs, l’indépendance de la justice et la pleine souveraineté populaire.

Bâtir un modèle économique productif et diversifié, libéré de la rente et de la bureaucratie, combinant efficacité et justice sociale.

Réhabiliter la société en libérant les énergies de la jeunesse, en renforçant la solidarité et en promouvant les valeurs de tolérance et de vivre-ensemble.

Le FFS insiste également sur des mesures concrètes : abrogation des lois liberticides, révision de l’article 87 bis du code pénal, réduction du recours à la détention préventive, et restauration du rôle des corps intermédiaires et du politique.

« L’heure n’est plus aux demi-mesures »

Pour la formation dirigée par Youcef Aouchiche, seule une voie pacifique et consensuelle, inspirée des valeurs de Novembre, du Congrès de la Soummam et de l’esprit du Hirak de 2019, permettra de « restaurer la confiance entre le peuple et ses institutions » et de replacer le pays sur le chemin du développement démocratique et de la justice sociale.

« L’heure n’est plus aux faux débats ni aux demi-mesures : l’heure est à la responsabilité et à l’action », conclut le FFS, qui entend porter ce projet lors des prochaines échéances politiques et électorales.

Samia Naït Iqbal

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