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Le Sahel, talon d’Achille de l’Algérie

Tebboune Chanegriha

Confrontée à une perte d’influence au Sahel, l’Algérie se sent ouvertement défiée et menacée à ses frontières. Selon Alger, les coups d’État militaires menés dans trois pays de la région qui ne possèdent ni armée puissante, ni capacités matérielles, font craindre une porosité aux frontières.

S’il y a bien un sérieux problème qui pend au nez des dirigeants depuis plusieurs mois c’est bien la situation dangereuse du Sahel. En la matière,  l’Algérie a perdu le guidon. Autrement dit c’est son talon d’Achille en matière de relations régionales.

Impopulaire à l’intérieur le régime craint également les conséquences du retrait du Mali de l’accord de paix d’Alger signé en 2015. Depuis l’automne dernier, l’armée malienne appuyée par les mercenaires de Wagner ont repris leur offensive sur l’Azawad avec à la clé le contrôle de plusieurs localités qui étaient entre les mains des combattants indépendantistes touaregs. Cette guerre aux frontières sud s’ajoutent aux tensions de la façade Est avec la Libye et la frontière ouest avec le Maroc, source de grands trafics de drogue.

Aussi, le pouvoir algérien n’est guère rassuré et ne cache plus son malaise face aux changements radicaux qui l’entourent au Sahel. Après la reprise des hostilités à sa frontière, Alger cherche à tout prix à éviter le déclenchement d’une guerre civile au nord du MaliElle craint notamment que ces affrontements engendrent un afflux de réfugiés et une possible infiltration de certains éléments terroristes sur son territoire. La présence des supplétifs de l’armée malienne parmi les Wagner et les syriens pro-turc à sa frontière l’inquiète également au plus haut niveau.

Ces développements l’ont d’ailleurs poussé à redéployer discrètement son armée à ses frontières avec le Mali et le Maroc. Des diplomates algériens voient dans ces changements une reconfiguration des alliances dans la région. C’est le cas de l’ancien ministre algérien Abdelaziz Rahabi qui considère que les trois pays du Sahel qui ont connu des coups d’État militaires sont en train d’établir un nouvel ordre dans la région qui « dépasse leurs capacités et leur discours politique actuel ».

Vu d’Alger, l’objectif des grandes puissances vise, selon l’ancien diplomate, à « réduire son influence et à mettre son armée sous pression à la frontière du sud » au profit de plusieurs pays qui cherchent à étendre leur influence dans la zone. L’ancien ministre évoque une distribution de rôle entre Washington qui édicte les stratégies avec Israël, les Émirats qui financent cette stratégie et le Maroc qui exécute l’agenda imaginé pour cette région. Dans ce sac à nœuds, il ne faut pas oublier la Turquie qui joue aussi un rôle de plus en plus important.

Accusée d’ingérence au Mali, elle saisit toute occasion pour expliquer qu’elle n’a aucun agenda caché et que l’accord d’Alger a été trouvé suite à l’appel du gouvernement en place à Bamako en 2015.

Face à la multiplication des influences dans la sous-région, l’Algérie de Tebboune se sent bien isolée. En la matière, on ne peut pas avancer que la stratégie diplomatique imaginée par Tabboune et ses conseillers soit la plus effisciente. Bien au contraire. Et l’arrivée d’Ahmed Attaf aux Affaires étrangères a aggravé la situation. Si l’on ajoute un Abdelmadjid Tebboune qui ne participe plus aux grands rendez-vous internationaux, comme le dernier sommet africain, où il était absent, il ne faut pas s’étonner que l’Algérie perde son influence.

Sofiane Ayache

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