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L’échec du centrisme et la montée de la droite radicale

Trump

Le paysage politique mondial traverse une crise sans précédent, marquée par une polarisation croissante et une remise en question du centrism, jadis considéré comme un modèle d’équilibre et de stabilité. L’échec des partis centristes à répondre aux réalités économiques et sociales actuelles a permis à la droite radicale d’occuper le terrain, se nourrissant du mécontentement populaire.

Ce phénomène, observable dans de nombreuses démocraties occidentales, révèle une dynamique politique complexe qui mérite une analyse approfondie pour comprendre l’effritement de l’ordre établi et la montée de forces politiques qui, tout en prétendant incarner un changement, n’en sont que des manifestations régressives.

1. Le centrisme : une voie médiane qui a perdu son utilité

Traditionnellement, le centriste se positionne comme un conciliateur des divergences politiques, un pragmatique capable de maintenir l’équilibre entre les forces opposées. Il incarne une forme de raison modérée, capable de concilier le capitalisme néolibéral et une vision sociale modérée. Les figures emblématiques de ce modèle incluent Bill Clinton et Tony Blair, qui dans les années 1990 semblaient avoir trouvé la recette du succès en associant politique économique libérale et justice sociale.

Cependant, cette approche a largement perdu de sa crédibilité et de son efficacité. Le centriste se trouve désormais déconnecté des préoccupations quotidiennes des citoyens. En raison de son incapacité à résoudre les crises sociales et économiques — comme l’augmentation des inégalités, la précarisation du travail, et le déclin des services publics — il est perçu comme défaillant.

Les partis centristes, plutôt que d’adopter des réformes profondes, ont privilégié des compromis qui n’ont servi qu’à maintenir un statu quo inégalitaire.

La promesse d'une démocratie équilibrée a été éclipsée par un échec flagrant à adapter le système face aux enjeux contemporains de la mondialisation. 

2. La droite radicale : une réaction populaire au centrisme échoué

L’échec des partis centristes a ouvert un espace politique où la droite radicale a prospéré, alimentée par la colère et le désenchantement des électeurs. Ce phénomène a été particulièrement visible avec l’ascension de leaders populistes tels que Donald Trump, Marine Le Pen, Viktor Orbán et Jair Bolsonaro.

Ces figures ont su capter l’angoisse des classes populaires en dénonçant l’establishment mondialiste et en prônant un retour aux valeurs nationales. Les partis d’extrême droite se sont nourris des fractures sociales et économiques.

En stigmatisant des boucs émissaires tels que les migrants, les minorités ou les institutions supranationales comme l’Union européenne, la droite radicale a donné une voix aux déshérités de la mondialisation. Leur discours populiste, centré sur l’isolement et la peur de l’autre, a permis de créer une opposition simpliste entre « les vrais citoyens » et « les élites corrompues », tout en proposant des solutions souvent régressives et simplistes à des problèmes structurels complexes.

3. La droite radicalisée : une régression dangeureuse

Bien que la droite radicale se présente comme une réponse aux défaillances du système politique traditionnel, elle ne fait que proposer une solution régressive. Plutôt que d’affronter les causes profondes de la crise — la concentration des richesses, l’effritement de la cohésion sociale et la précarisation des populations — elle préfère stigmatiser des groupes vulnérables et exacerber les divisions internes.

Les discours nationalistes, les appels à la fermeture des frontières et la méfiance vis-à-vis des institutions démocratiques ont créé un climat propice à l’ethnocentrisme et au rejet de l’autre, sans jamais s’attaquer aux racines des inégalités. Le danger est que ces partis, tout en proposant un nationalisme de plus en plus marqué, déstabilisent les fondements démocratiques, mettant en péril la tolérance et l’inclusion. Leur stratégie, fondée sur la division et la peur, n’apporte aucune solution à la dégradation du système capitaliste mondial, et contribue même à amplifier les fractures sociales et économiques.

4. L’échec de Kamala Harris : une illustration de l’impuissance du centrisme

La défaite de Kamala Harris lors des élections de 2024 incarne l’échec de l’idéologie centriste dans son incarnation contemporaine. En cherchant à satisfaire à la fois les conservateurs et les progressistes, Harris a échoué à proposer une vision cohérente et radicale face aux défis sociaux et environnementaux.

Ses tentatives de conciliation, comme ses compromis sur l’assurance santé ou le Green New Deal, ont non seulement aliené la gauche progressiste mais renforcé l’image d’un pouvoir prêt à céder aux pressions des puissances conservatrices et des intérêts financiers.

Dans ce contexte, la véritable opposition démocratique, bien qu’oubliée par le système médiatique et électoral, est représentée par des figures comme Jill Stein ou Cornel West, qui incarnent une voie alternative plus fidèle aux idéaux progressistes. Ce constat démontre que le centriste, tout comme le néolibéralisme qu’il défend, est désormais dépassé et incapable de répondre aux aspirations populaires.

5. Le système électoral et la faillite des alternatives : une fausse opposition

Ce qui est particulièrement tragique dans cette dynamique, c’est l’impossibilité pour des alternatives réelles d’émerger dans le cadre du système électoral actuel. Les candidats tiers comme Jill Stein ou Cornel West, qui offrent des perspectives radicales mais inclusives, sont systématiquement marginalisés, leurs voix étouffées par un système médiatique qui favorise une fausse opposition entre deux variantes du même modèle néolibéral.

Ce système électoral verrouillé empêche de véritables transformations, en réduisant le choix politique à une alternative entre le néolibéralisme « progressiste » et un néolibéralisme « totalitaire », incarné par des figures comme Donald Trump.

6. Appel à une réinvention politique radicalement nouvelle

L’échec du centriste et la montée de la droite radicale ne sont que des symptômes d’une crise bien plus profonde du système politique et économique mondial. Le temps des compromis et des demi-mesures est révolu. Il est impératif de penser à des solutions radicales et progressistes qui adressent les causes structurelles des inégalités sociales et économiques. Cela implique de repenser la démocratie en termes de justice sociale, de redistribution des richesses et de rétablissement des principes fondamentaux de l’État de droit.

Seule une réinvention profonde et inclusive de la politique pourra répondre aux défis contemporains sans céder aux sirènes du populisme réactionnaire. Le monde est aujourd’hui confronté à une lutte entre la continuité d’un système néolibéral qui a échoué et une droite radicale qui exacerbe les divisions. L’enjeu est de réinventer une voie démocratique qui puisse restaurer l’unité sociale et garantir un avenir plus juste pour tous, loin des logiques de division et de repli.

Bouzid Amirouche

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