Lundi 1 octobre 2018
Les armes françaises utilisées au Yémen
Des armes et des équipements militaires français, vendus à l’Arabie Saoudite et aux Émirats arabes unis, sont actuellement utilisés par les forces armées de ces deux pays au Yémen. Ce petit état au sud de la péninsule Arabique représente pour les Nations unies la « pire crise humanitaire au monde » et de graves violations des Droits de l’homme ont été observées de la part de l’ensemble des protagonistes.
Les ventes d’armes militaires constituent un marché annuel de 15 milliards d’euros pour l’économie française. L’hexagone est en pointe dans de nombreux domaines et les équipements militaires français sont recherchés par de nombreux pays aux quatre coins du globe. Le poids économique de l’armement en France est incontestable et porteur d’emplois. Cela ne doit pas nous conduire à fermer les yeux quand des armes françaises sont utilisées pour frapper des civils et contrevenir aux traités internationaux.
C’est exactement ce qui est en train de se passer au Yémen. Deux des principaux clients d’équipements militaires français, l’Arabie Saoudite et les Émirats arabes unis, sont en première ligne dans ce conflit civil qui a dégénéré en guerre régionale opposant les deux monarchies du Golfe (qui soutiennent les forces loyalistes et sunnites) à l’Iran (qui soutient les rebelles chiites houthis).
Dans cette nouvelle guerre froide du Moyen-Orient qui ne dit pas son nom, les populations yéménites ne sont que de la chair à canon et un alibi pour l’hégémonie régionale. Les armées saoudiennes et émiratis, qui sont les plus nombreuses et les plus puissantes sur le terrain, opèrent sans le moindre discernement, ni soucis pour les vies humaines des civils ou leurs droits humains les plus élémentaires, comme l’ont constaté et documenté de nombreuses organisations internationales et non-gouvernementales, de l’ONU à Amnesty International.
Les massacres de civils sont partie intégrante de cette guerre totale qui a fait plus de 10 000 morts depuis 2015 et où « deux tiers de la population (du Yémen) – 18,8 millions de personnes – ont besoin d’assistance et plus de sept millions ignorent d’où proviendra leur prochain repas », selon les Nations Unies, qui fait état de déplacements massifs de populations. Cette réalité est connue, contestée de personne. Comment alors justifier le silence de la communauté internationale et de la France en particulier ?
Car comme l’a indiqué Amnesty International, des armes et des équipements militaires français sont utilisés par les armées saoudiennes et émiraties au Yémen. L’ONG de défense des Droits de l’homme cite notamment la présence documentée d’avions de chasse Mirage, de chars Leclerc, de blindés Aravis, mais aussi de navires de guerre, de fusils et de munition. Sans parler du « service après-vente » prévu dans les contrats de vente d’armements qui font que des équipes françaises assurent la maintenance de certains équipements utilisés pour commettre des atrocités.
Une situation inacceptable qui doit pousser le gouvernement français à revoir le cadre légal des exportations militaires. Il ne s’agit pas de faire de l’angélisme et de mettre à mal une filière d’excellence française, mais de s’assurer que les armes conçues et produites en France ne soient pas utilisées à des fins qui contreviennent à nos valeurs fondamentales.