Mercredi 6 mars 2019
Les Etats-Unis lâchent Bouteflika
La journée de mardi 5 mars a connu une ébullition dans plusieurs villes de l’Algérie dont les manifestants se comptent par dizaines de milliers notamment dans la capitale.
Cette fois-ci non seulement ils rejettent le cinquième mandat mais aussi les promesses du chef de l’Etat de réformer et d’abréger son mandat s’il est élu.
La même journée, le général-major Ahmed Gaid Salah, vice-ministre de la Défense nationale profitant de son passage à l’académie militaire de Cherchell baptisée Houari Boumediene, s’est exprimé sur la question quoique d’une manière indirecte.
Avec un ton plus tempéré que la dernière fois, il a mis en garde contre creux qui selon lui « veulent déstabiliser le pays » Parallèlement si l’on reprend le communiqué de l’AFP, le responsable militaire « averti que l’armée serait garante de la sécurité et la stabilité face à ceux qui veulent ramener l’Algérie aux années de guerre civile 1992-2001 ».
Pour la deuxième fois consécutive, le général-major n’a pas nommé qui sont ces «ceux ». Vise-t-il les manifestants dont de nombreux le sollicitent personnellement pour intervenir afin d’appliquer la constitution ? Ou éventuellement ceux qui seraient à l’origine des appels anonymes ?
Toujours est-il et face à la détermination et la persistance des manifestations qui ne semblent pas fléchir et encore moins s’essouffler, Washington a pour sa part réagi mardi pour la première fois depuis le début des manifestations en appelant les autorités algériennes à respecter le droit de manifester.
Toujours selon l’AFP, «Les Etats-Unis soutiennent le peuple algérien et leur droit à manifester pacifiquement», a confirmé le porte-parole de la diplomatie américaine, Robert Paladino.
Rappelons que Abdelaziz Bouteflika a dès son élection en avril 1999, a effectué en 2001 une visite officielle aux Etats Unis au cours de laquelle il a été reçu à Washington par son George W. Bush. De source diplomatique américaine, on précisait à l’époque que cette invitation de la Maison Blanche marquait « un signal fort » de la nouvelle administration Bush vis-à-vis d’un pouvoir algérien toujours confronté à un terrorisme islamiste qui a fait plus de 200.000 morts depuis 1992 et, depuis avril 1999, à une fronde sanglante de la jeunesse kabyle.
En même temps Ce « signal fort » a permis au président américain de rappeler le souci des Etats-Unis pour le renforcement de la démocratie et des droits de l’homme, « désormais dicté par les puissantes ONG américaines », mais plus important aussi d’aborder un épais dossier économique, diplomatique et militaire.
L’un des plus importants partenaires commercial de l’Algérie derrière la France, l’Italie et maintenant la Chine avec un volume d’échange en baisse depuis l’avènement du gaz de schiste, les Etats-Unis exportent notamment des biens d’équipements et des céréales et importent quasi-exclusivement le pétrole algérien considéré à la côte Est des Etats-Unis comme le moins polluant de par sa légèreté et son taux de soufre réduit.
Au moment de cette visite, qualifiée par les médias algériens d’historique, il y avait en Algérie une présence très réduite des compagnies américaines à l’exception de quelques rares multinationales (Coca-Cola, Citibank) qui ont décidé de s’implanter dans une économie en pleine restructuration après 30 ans de socialisme, les sociétés américaines présentes en Algérie sont cantonnées à la prospection et l’exploitation des gisements de pétrole hautement sécurisés du Sahara.
Le président Bouteflika avait profité de ce voyage pour réitérer ses appels à la diversification des investissements privés tandis que, de leur côté, les opérateurs américains souhaitaient intensifier leurs achats de gaz naturel algérien, un marché largement contrôlé par les sociétés françaises (Total et Gaz de France). Fin connaisseur de l’industrie des hydrocarbures, le vice-président de l’époque Dick Cheney aura des entretiens avec Abdelaziz Bouteflika.
Les deux hommes s’étaient déjà vus à Alger en 2000, Dick Cheney étant alors président du groupe pétrolier Halliburton. Un «accord-cadre» d’incitations aux investissements américains devrait par ailleurs être signé dans le cadre du «Programme américain pour l’Afrique du nord » (PAN), une initiative qui vise à promouvoir l’intégration économique régionale du Maghreb.
Aujourd’hui le domaine minier algérien intéresse au plus haut niveau les compagnies multinationales dont ExxonMobil mais recherchent une stabilité politique qui ne la retrouvent plus étant donné la crise politique que traverse le pays.
Après analyse minutieuse, il semble que les Etats Unis se sont rangées du côté de la population.