25 novembre 2024
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 Liberté confinée !

TRIBUNE

 Liberté confinée !

Ils se frottent les yeux, fronçant les sourcils et vocifèrent de colère quand, dans les manchettes qui recoupent leurs sombres contours et désignent leurs sinistres mensonges, ils trouvent, dressée, outrageusement vers les cieux, la vérité qu’ils craignent et répugnent.

Parce qu’ils sont des marchands de sabres et d’obséquieux colporteurs de mensonges qu’ils se hâtent, avec la vélocité d’un fauve, à aiguiser leurs couteaux sur l’autel de la vérité qu’ils confinent. Comme l’ont si bien fait leurs prédécesseurs, régents autoproclamés, colons repus ou caïds dociles, dans le sillage d’un héritage fort de plus d’un demi-siècle de dysenterie médiatique, ils façonnent un pays  à l’image de l’aveugle qui tâtonne, le sourd qui chantonne et le muet qui essaie en vain de convaincre. Pour eux comme pour leurs proches colporteurs, la résurgence de la libre pensée ne doit se frayer une trajectoire en dehors des biens pensants, des biens-pesants. Elle doit rester l’otage de cette volonté morbide, qui tend à faire taire toute vérité crue, la broyer comme une piteuse vermine, la recracher comme un vulgaire cadavre.  

C’est vrai que le pays compte une légion de journalistes dociles, s’accrochant ardemment au biberon de servitude, qui les abreuve de mensonges entre deux couches de nouvelles nauséabondes, toujours aussi abondantes, inlassablement annonciatrices de Fakhamatouhou, ses réalisations indécrottables, ses directives fluettes, sa vertu à l’habit de l’escroc qui se fait passer pour un moine. Fakhamatouhou a changé de portrait, mais garde, cérémonieusement, le même cadre, doré de mensonges, ceint de veuleries. 

La presse libre se fait rare, la presse libre est un ressac, qu’il ne faut en aucun moment fléchir, pour ne pas céder à cette pensée glauque, qui veut d’une parole qui bégaye, des mots, infiniment petits, qu’ils se passeraient de la pesée critique, du regard éthique, des yeux qui discerneraient le vrai du faux, le libre du cabinet qui scie. Cela augure mal la prochaine constitution que mijote le nouveau régent, non élu par la majorité d’un peuple révolté.   

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La presse libre, pour Saïd Mekbel, un quart de siècle après son assassinat, est toujours ce voleur qui, dans la nuit, rase les murs pour rentrer chez lui. Celui qu’on menace dans le secret d’un cabinet officiel, le témoin qui doit ravaler ce qu’il sait, ce citoyen nu et désemparé. Si Said Mekbel devait ressusciter, il écrirait la même chose, avec autant de virtuosité, autant de mots vrais, de mots proches de nous, de nos maux sur sa plume, de ses prodigieuses chroniques, tantôt lacérées tantôt douces. Humaniste, homme libre, il a laissé derrière lui une mémoire incorruptible, des écrits indélébiles que ni l’entrechoquement des sabres ni le bruit des bottes ne peuvent les faire oublier.

À l’instar du Matin d’Algérie, la presse libre vivra tant qu’il y aura, comme il y en a eu dans sa genèse faite de luttes et de sacrifices, des hommes libres. Des hommes qui, de l’aube annonciatrice de vérités jusqu’au crépuscule dénonciateur de mensonges, tremperont leur plume dans le sceau de la liberté.

Auteur
Mohand Ouabdelkader 

 




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