25 novembre 2024
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Lounis Aït Menguellet revisité : « Avehri » c’est toute une philosophie

POESIE

Lounis Aït Menguellet revisité : « Avehri » c’est toute une philosophie

Bien que ne faisant pas partie des grands succès de Lounis Aït Menguellet, le titre Avehri du monumental Ammi, sorti en 1983, mérite le détour. 

Mot à mot Avehri signifie brise mais pour des raisons faciles à deviner quand on a lu la traduction ci-après, nous lui préférons le mot vent (se traduisant par adhu en kabyle) car la chanson parle du vent justement, un vent singulier et sournois facile à décrypter. 

Dès les premiers couplets on en saisit toute la philosophie. Une philosophie déjà bien creusée dans l’album précédent, avec le très populaire Ettes ettes mazal el-hal. À la différence que Ettes ettes décortique des contours spécifiques à l’Algérie, alors que Avehri a une connotation universelle indéniable. Notre poète s’adresse aux hommes au sens générique, c’est-à-dire à l’humanité dans son ensemble. 

C’est dire la maturation et le recul avec lesquels les textes sont élaborés par Lounis Aït Menguellet. Que l’on soit né juif, chrétien, bouddhiste ou musulman b’seif, on puise dans Avehri cette lucidité qui manque tant à ces va-t’en-guerre toujours prêts à s’exciter et suivre des chants de sirènes fallacieux (l’exemple d’un Donald Trump galvanisant moult foules pour inverser les résultats de l’élection 2020 en est le plus probant). C’est le drame de l’humanité depuis que le monde est monde. Il suffit qu’une petite minorité excitée se laisse entraîner par un panurgisme aveugle pour que tout bascule dans la folie et l’horreur.

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Le monde meilleur dont rêvent les majorités ne pointe malheureusement pas à l’horizon de ces lendemains incertains.

Petite pensée à Chaâvane, un ami d’enfance qui avait lancé à l’écoute de Avehri : choukagh, taqsit-agui ghaf’elboun-diou itsid’yawbi Lounis à Velka !? Dans le mille à Chaâvane aghma !

« Avehri », vent sournois

Oh vent sournois

Dis-nous qui tu es

Ne me connaissez-vous donc pas

Vous croyez tous en moi

C’est vous qui m’avez créé

 

C’est vous qui me créez 

Quand vous êtes déroutés

Celui qui s’égare de ses trajets

Fait appel à moi

Que puis-je donc accomplir

Tout ce que moi je sais

Vous le savez aussi

Je ne puis rien faire

De facile ni de difficile

Oh vent sournois

Tous en toi nous croyons

Tant qu’en moi vous croyez

Vous devez avoir un osselet 

Planté dans le cervelet

 

Quiconque croit en moi

Se fait du tort à lui-même

Les racines du mal sont en vous

Sans relâche vous les irriguez

Tout ce qui apparait

C’est vous qui l’implorez

Une fois dénommé

Contre vous il s’est retourné

Et repart là où il était

Oh vent sournois 

Où est la lumière

À chaque fois qu’elle jaillit

Vous vous endormez

Quand survient l’obscurité

Vous vous réveillez

Même les saisons vous les brouillez

 

Quand jaillit la lumière

Vous cherchez l’obscurité

Quand vient l’obscurité

C’est la lumière que vous réclamez

Ce que vous ne cessez de chercher

Vous ne l’avez pas encore compris 

Devant vous il est peut-être tapit

Vous ne le voyez pas

Oh vent sournois

Sur nous ne veilles-tu pas

Celui qui me croit sur lui veiller

Quand son dû pointera

Glacé il l’avalera

 

Celui qui me croit sur lui veiller

N’est qu’un dadais il fait pitié

Quand il cherchera ce qui lui revient

Il ne le trouvera point

Si vous me laissez sur vous veiller 

Sans fondements vous édifiez

Un jour sur vous le mur s’écroulera 

Plus personne ne survivra

Oh vent sournois

Tu as tout brouillé 

Celui qui rêve qu’il atteint ses fins

Qu’au réveil on a maraudé son butin

C’est moi qu’il accuse du larcin

 

Auteur
Kacem Madani

 




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