De Toulon à Marseille, des voix s’élèvent pour soutenir les bateaux partis briser le blocus imposé à la bande de Gaza. Hier comme aujourd’hui, plusieurs organisations de solidarité – Waves of Freedom, Flottille de la liberté, Thousand Madleens – ont mobilisé sympathisants, militants et élus pour rappeler que la Méditerranée est aussi un espace de résistance.
Des voiles contre un blocus
Depuis le printemps, la « Flottille de la liberté » a repris la mer. En juin, le voilier Madleen a quitté Catane, en Sicile, avec à son bord militants, syndicalistes, et même Greta Thunberg, venue témoigner de son engagement. Le navire transportait une cargaison symbolique mais vitale – lait en poudre, farine, matériel médical – destinée aux civils de Gaza, soumis à un blocus terrestre, maritime et aérien depuis plus de quinze ans.
Intercepté par l’armée israélienne en pleine mer, le Madleen n’a jamais atteint les côtes palestiniennes. Mais l’initiative a marqué les esprits, donnant un relief international au drame humanitaire. En France, l’interception avait suscité des appels à manifester, notamment de la France insoumise et des Écologistes, dénonçant une « violation flagrante du droit international ».
Le relais du Handala
Un mois plus tard, une nouvelle étape s’est ouverte avec le départ du Handala depuis Gallipoli, en Italie. À bord, deux députées de la France insoumise : Gabrielle Cathala, élue à l’Assemblée nationale, et Emma Fourreau, députée européenne. Le navire, qui transportait également journalistes et membres d’ONG, s’est rapidement retrouvé dans le viseur des autorités israéliennes.
Avant même de prendre la mer, l’équipage avait dénoncé plusieurs sabotages : une corde enroulée autour de l’hélice, des produits corrosifs versés dans un réservoir d’eau, provoquant des brûlures. Une fois en route, le bateau a été la cible d’interférences et de survols de drones, avant d’être intercepté à son tour par la marine israélienne.
Un départ depuis Marseille
Dimanche 31 août, c’est depuis Marseille qu’un nouveau chapitre de cette mobilisation s’est écrit. Un voilier du mouvement Thousand Madleens pour Gaza a pris le large, chargé d’aide humanitaire. Selon l’organisation, la flottille internationale mettra ensuite le cap vers l’enclave palestinienne à la mi-septembre, avec un double objectif : dénoncer le blocus et réclamer un cessez-le-feu.
Au large, une quinzaine de zodiacs et de voiliers, drapeaux palestiniens au mât, naviguaient entre les bateaux de plaisance, suivis de près par une unité nautique de la police nationale et les regards des dizaines de militants et de curieux restés sur le rivage. Le rendez-vous était donné sur le quai du musée des Civilisations de l’Europe et de la Méditerranée (Mucem), où s’est déroulé le départ du bateau français.
Une solidarité assumée
« J’étais présent hier à Toulon et aujourd’hui à Marseille, en soutien à plusieurs organisations qui orchestrent des départs de bateaux en direction de Gaza (Waves of Freedom, Flottille de la liberté, Thousand Madleens). Gloire à celles et ceux qui embarquent pour tenter de briser le blocus en apportant de l’aide humanitaire, avec parmi eux deux députés de la France insoumise. »
Ce message, relayé notamment par le député marseillais Manuel Bompard (LFI), illustre la fierté et la détermination des soutiens. Plusieurs centaines de personnes se sont rassemblées ce week-end, d’abord à Toulon puis sur le Vieux-Port de Marseille, pour accompagner symboliquement le départ des navires.
Le collectif Thousand Madleens, né à Marseille, coordonne localement campagnes de dons et actions de sensibilisation. « Chaque départ est un acte de désobéissance civile, mais aussi un cri d’alerte », explique un militant.
Une bataille politique et symbolique
Les autorités françaises, de leur côté, se montrent prudentes. Après l’interception du Madleen, Emmanuel Macron avait demandé « le retour des citoyens français » tout en évitant de critiquer ouvertement l’opération israélienne. Une position qui alimente la colère des collectifs : « On ne peut pas se contenter d’attendre le rapatriement des élus, il faut dénoncer l’illégalité du blocus », s’insurge une militante.
Pour les organisateurs, l’enjeu dépasse la simple livraison d’aide. La flottille se veut un levier politique : forcer le débat, médiatiser l’enfermement de Gaza, rappeler que la Méditerranée est traversée par des routes d’exil, mais aussi de résistance.
Des voiles comme messagers
« Gloire à celles et ceux qui embarquent », répètent les soutiens à Toulon comme à Marseille. À travers les noms donnés aux bateaux – Madleen, Handala – s’affirme une mémoire : celle d’une lutte palestinienne qui refuse l’effacement.
Si les navires ne parviennent pas toujours à franchir les barrages militaires, leur traversée est en soi un acte politique. À Marseille, port historique des solidarités méditerranéennes, beaucoup l’ont rappelé ce week-end : « Chaque départ est une victoire symbolique. Car il oblige les consciences à regarder vers Gaza. »
Djamal Guettala