21 décembre 2024
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Mme Zohra Drif, taisez-vous ! 

TRIBUNE

Mme Zohra Drif, taisez-vous ! 

Encore une fois, c’est pour voler au secours de ceux et de celles qui ont mis l’Algérie dans un état de décomposition avancé que l’ancienne sénatrice désignée par le Président Bouteflika dans le tiers présidentiel, prend la parole (1).

Elle s’abrite pour exiger que justice soit rendue à l’ancienne ministre de la Culture, Khalida Toumi (inculpée puis placée en détention préventive, le 4 novembre dernier, pour des faits de corruption et de dilapidation des deniers publics) derrière sa parfaite conviction de l’intégrité morale de l’intéressée, conviction que viendrait renforcer ses états de service durant la guerre de libération nationale, comme si la première et les seconds pouvaient avoir la moindre relation avec les preuves et les charges retenues contre l’ancienne ministre de la culture. 

A se taire, Zohra Drif aurait beaucoup gagné. Elle a, en effet, abondamment profité des largesses de Bouteflika dans tous les domaines. Elle a cautionné ses  dérives et ses frasques en parfaite connaissance de cause. Au lendemain du 22 févier 2019, elle a eu le front de se mêler au Hirak, adoubant ses mots d’ordre, alors que ceux-ci rejetaient totalement le régime dont elle avait été une des figures les plus emblématiques.

Aujourd’hui, elle se donne les gants pour blanchir Khalida Toumi, alors qu’elle n’a pas eu accès à son dossier que la police judiciaire traite depuis plus d’une année dans le but d’accumuler des éléments à charge qui soient probants et convaincants.

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La présomption d’innocence consacrée par la Constitution est la loi d’airain de la justice pénale algérienne ; ceci n’empêche pas de rappeler le rapport de la Cour des Comptes de 2011 épinglant l’ancienne ministre de la Culture sur les conditions particulièrement opaques d’utilisation de certains comptes d’affectation spéciale dont elle était l’ordonnatrice.

Il ne pouvait y avoir aucune suite à ce rapport pour deux raisons : la situation d’impunité dont bénéficiait alors l’égérie du régime de Bouteflika, d’une part, la marginalisation voulue et programmée de longue date de la Cour des comptes, d’autre part. 

Hier, Zohra Drif prenait la défense de Louisa Hanoune. La Secrétaire générale du Parti des travailleurs continue de bénéficier de la présomption d’innocence, ayant fait appel de sa condamnation par le Tribunal militaire de Blida à 15 ans de réclusion  criminelle, mais il ne fait aucun doute que Louisa Hanoune avait donné son accord pour l’élimination du chef d’état-major et de l’ensemble des membres du Haut commandement militaire, celle-ci ayant été décidée par le général Mediène et Saïd Bouteflika. Louisa Hanoune a toujours entretenu des liens  très étroits avec le ci-devant patron du DRS que l’histoire retiendra comme un des plus grands fossoyeurs de l’Algérie, peut-être même à un niveau supérieur à celui dont est affligé Bouteflika lui-même(ce qui n’est pas peu dire), dans la mesure où le général Médiène a officié à la tête des services de sécurité de 1990 à 2015, c’est-à-dire durant un quart de siècle.

De cela bien entendu, Zohra Drif n’a cure. Tout ce qui peut la faire sortir de son silence, c’est le sort que subissent ses complices d’un régime qui a siphonné les ressources du pays, fait émerger une des pires  ploutocraties du monde et, par voie de conséquence, rendu le redressement du pays quasiment impossible.   

 Il est, enfin, symptomatique de relever que la sollicitude, l’émoi ou la compassion de Zohra Drif ne sont jamais allées en direction de celles et de ceux que la justice de Bouteflika, Ahmed Ouyahia, Mohamed Mediène, Tayeb Belaiz et Tayeb Louh a broyé à jamais, détruisant leur vie privée mais aussi familiale et professionnelle.  

Zohra Drif ne peut prétendre à aucune crédibilité ni se prévaloir d’aucune autorité morale pour défendre quelque cause que ce soit, ayant vendu son âme au diable dès 1999 et cela, jusqu‘en 2019, sans désemparer.

Le Hirak n’a été dupe d’aucune de ses piteuses postures. Le plus grand service qu’elle puisse apporter aux Algériens désormais est de se taire et de se réjouir de n’avoir pas à rendre compte de tous les méfaits, trahisons et ignominies que l’histoire inscrira au passif de son bilan. 

Ali M.

1/ El Watan du 6 novembre 2019

Auteur
Ali Mebroukine, Professeur de droit 

 




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