Mardi 14 avril 2020
OPEP+ : pourquoi Trump parle d’une réduction de 20 mb/j
Il faut reconnaître d’emblée que les tweets du président américain ont toujours influencé le marché pétrolier au point où de nombreux analystes constatent la mise en place d’un nouveau modèle de détermination des prix que Trump a créé et semble fonctionner depuis son élection.
En effet, quand les prix sont très hauts, ce qui induit un carburant cher pour ses électeurs, il actionne l’Arabie saoudite pour ouvrir les vannes mais lorsqu’il est trop bas pour la rentabilité de ses producteurs de schiste, il appelle plutôt son allié pour freiner un peu la production pour permettre au prix de remonter.
Dans cette démarche, les prix du baril notamment du Brent proche de celui algérien le Sahara Blend sont restés confinés dans une moyenne de 64,15 dollars le baril du 8 novembre 2016, date de son élection à ce jour avec un pic qui n’a jamais été dépassé de 86, 14 en septembre 2018. Dans cette fourchette de nombreux pays, comme la Russie et les producteurs de schiste américains trouvent leur compte pour un équilibre de leur budget, à l’exception de la majorité des pays de l’Organisation des Pays exportateurs de pétrole (OPEP) qui se sont adaptés à ce modèle voilà un peu moins de quatre ans.
Depuis l’avènement du coronavirus, suivi, début mars, par une guerre des prix, le prix de la même référence pour ne prendre que celui-là, est descendu au plus bas, frôlant les 20 dollars le baril ce qui a fait mal à tout le monde. Le début avril, le président américain devait intervenir toujours par tweet et dit avoir contacté les deux protagonistes dans cette guerre des prix pour se réunir et réduire leur production de 10 à 15 millions de barils, le marché lui a été très sensible pour faire remonter les prix au -delà de 20 dollars le baril et grâce à lui qu’on a évité le pire de voir les 90% des gisements dans le monde produire au dessous de leur seuil de rentabilité.
Cette réunion a bien eu lieu, le jeudi 9 et une partie du vendredi 10 avril 2020, l’accord est scellé le dimanche 12 avril après une intervention de Donald Trump auprès du président mexicain qui avait joué la veille le trouble fête en claquant la porte car il n’était pas d’accord de réduire sa production de 400 000 barils par jour mais voulait se limiter à 100 000 barils par jour. En effet, on apprendra le vendredi vers 15 h par une déclaration solennelle du président mexicain, Andrés Manuel Lopez Obrador, que lui et Donald Trump sont parvenus à un accord pour réduire la production de pétrole du pays, question qui bloquait un accord en gestation entre pays producteurs pour une baisse massive de l’offre d’or noir. Il a précisé que son pays allait réduire ses pompages de 100.000 barils par et que les États-Unis allaient de leur côté diminuer les leurs de 250.000 barils jour supplémentaires par rapport à leurs engagements précédents pour compenser la part mexicaine.
Les tweets ne fonctionnent pas toujours lorsque les fondamentaux sont touchés
Juste après cette réunion par visioconférence entre pratiquement tous les pays producteurs de la planète, Donald Trump qui semble tout contrôler, tente d’envoyer un signal fort à son électorat dans une Amérique rongée par le coronavirus « Le grand accord pétrolier avec l’OPEP Plus est terminé. Cela permettra d’économiser des centaines de milliers d’emplois énergétiques aux États-Unis. Je voudrais remercier et féliciter le président Poutine de Russie et le roi Salman d’Arabie saoudite. Je viens de leur parler du bureau ovale. Beaucoup pour tous! » Il se trouve que le marché caractérise par une demande renfrognée et une offre surabondante, n’a pas réagi comme le président américain l’avait espéré, alors il accentue la cadence le lendemain « Après avoir été impliqué dans les négociations, pour dire les choses doucement, le nombre que l’OPEP + cherche à réduire est de 20 millions de barils par jour, et non pas les 10 millions qui sont généralement rapportés. Si quelque chose se produit près de cela, et le monde reprend ses activités à partir du Covid 19 ….. », Il se trouve que le marché reste toujours en berne. 2-Les calculs de Trump ne sont pas faux pour autant
Dans la mesure où la production actuelle de l’OPEP+ est supérieure à celle à la date de référence d’octobre 2018, c’est un total de 14,5 Mbj par rapport aux niveaux de production de début avril qui seront retirés du marché par l’OPEP+ c’est du moins ce que laisse entendre le secrétaire d’Etat américain à l’énergie . Ainsi, selon d’autres sources citées par l’agence Reuters, ce sont près de 20 millions de barils qui devraient sortir du marché pendant les mois de mai et juin, ce qui correspond à environ 20% de la demande mondiale avant la pandémie de Covid-19. Donald Trump a lui aussi cité le chiffre effectif proche de 20 millions de barils par jour dans un Tweet publié lundi.
Les Etats-Unis, le Brésil et la Canada, vont contribuer à l’effort pour 3,7 millions par jour supplémentaires. Les États-Unis, premier producteur mondial, ne sont pas membre de l’alliance OPEP+ mais selon Alexander Novak, ils « soutiennent l’accord », favorable à leur industrie de pétrole de schiste, en grande difficulté. « Ils disent qu’ils sont prêts à contribuer à la baisse de la production : on a entendu des chiffres allant de 2 à 3 millions de barils par jour », a indiqué le ministre russe dimanche.
Il a dit ne pas attendre un retournement favorable de la conjoncture économique « avant la fin de l’année, dans le meilleur des cas ». «Lorsque vous additionnez toutes les réductions de production dans le monde, nous allons être beaucoup plus proches de 20 mb/j qui sortiront du marché.» précise le secrétaire américain à l’Énergie Dan Brouillette sur Fox Business. Il se trouve désormais que ces effets d’annonce ici et là n’ont pas l’air de faire sortir le baril de pétrole de son confinement
R. R.