26 novembre 2024
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Peut-on construire un Etat démocratique en Algérie avec les islamistes ?

REGARD

Peut-on construire un Etat démocratique en Algérie avec les islamistes ?

Il y a au moins un sujet qui fâche les éradicateur algériens c’est bien la place des Islamistes dans l’édification de l’Etat démocratique. Alors que la rue algérienne reste silencieuse sur le sujet, les animateurs des réseaux s’adonnent à cœur joie au dissentiment et à l’aigreur par l’évocation d’une douleur pourtant partagée par les deux camps extrêmes de l’échiquier politique algérien.

Pas plus qu’hier, les protagonistes du dissentiment court-circuitent le hirak comme émanation du peuple volontaire qui dans un premier temps veut achever le processus de l’indépendance en esquissant l’autonomie de la société vis à vis d’un l’Etat usurpateur de la révolution, et en second temps, parachever la construction d’un Etat démocratique dont les bases ont été élaborées lors du congrès de la Soummam. Importe la lecture des uns et des autres des conclusions du congrès mais toujours est-il que dans la majorité des cas, la plupart des

Nationalistes étaient animés par l’esprit républicain qui hélas a été galvaudé au point où il est devenu l’esprit et la lettre de la dictature comme forme sublimée de l’Etat national. A l’entre-croisement des idéologies superposées du nationalisme arabo-musulman, la dictature de l’Etat s’est approprié l’emblème et la bannière d’un islam par l’adjonction homéopathique des ordonnancements laïques du raisonnement politique.

En effet, ce qui semble être flou dans la cristallisation idéologique de l’Etat national c’est précisément l’apanage des luttes de classement par la captation des différents courants politiques (arabo-islamisme, marxisme, etc.,) au nom du tiers-mondisme libérateur. A l’ère de l’euphorie indépendantiste au moins deux courants (le berbérisme et l’islamisme) ont été sévèrement combattus par le pouvoir de l’Etat. Si le second courant a été plus combattu en Egypte, le premier l’a été tout autant en Algérie.

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Paradoxalement avec la montée en puissance des Islamistes, le téléscopage idéo-politique a accentué la confrontation directe entre ces derniers et les laïcs. L’interruption du processus électoral en Algérie par l’armée aiguisera les armes d’une lutte sans merci entre les franges les plus radicales des deux courants idéo-politiques.

Rien n’y fait, malgré la diplomatie déployée par quelques figures historiques du mouvement national pour mettre fin à la guerre civile dont l’appareil de l’Etat contrôlé par les faucons était en ces moments-là l’instigateur de la guerre contre le peuple et le manipulateur des consciences. Toujours au service d’une oligarchie militaro-financière, l’Etat algérien s’en accommodera de ce rôle jusqu’à l’épuisement de ses ressources en soutien pour servir les intérêts d’une caste interchangeable selon les alliances du moment.

Sous le règne de Bouteflika, la décrépitude de l’Etat s’est accélérée au point que le « compromis » des trois versants idéologiques (Nationalistes, Islamistes modérés et démocrates) utilisées par l’omnipotent président se sont épuisées pour laisser place à une oligarchie compradore composée pour l’essentiel des recyclés de l’administration et de l’armée.

Pour l’essentiel cette oligarchie militaro-affairiste s’est accaparée de tous les leviers de commande de l’Etat pour en faire un instrument d’enrichissement personnel. A tel point que le recyclage de tout ce personnel comme système d’ »enrégimentement » de l’Etat a atteint les limites de sa capacité de se régénérer pour laisser place au délabrement de presque toutes les structures étatiques.

Au point que l’Etat comme organisation de souveraineté s’est accommodé des pratiques mafieuses. L’exemple de la corruption généralisée le plus connu est incontestablement l’affaire de la cocaïne qui a dévoilé la responsabilité des hauts fonctionnaires de l’Etat. En prenant en considération la libération de la parole du peuple dont est synonyme l’occupation de l’espace public par la société civile, il ressort que l’entre-coup du mouvement populaire est une réaction salutaire contre des dirigeants pourris et de surcroît répressifs et parfois sanguinaires envers la population.

En effet, ce tableau très peu reluisant du système FLN postindépendance que combattent les Algériens ouvre la perspective de la construction d’un Etat démocratique sous les décombres de l’ancien système agonisant. Il se laisse dire que les contingents des contestataires sont diversement affiliés des principaux courants politiques: les Démocrates, les islamistes et les Nationalitaires. Il est certain qu’après l’expérience catastrophique de Daech, le courant islamiste algérien n’a plus la même aura que dans les années 80/90 et que la faillite du Califat ainsi la tournure dictatoriale de l’AKP en Turquie limitent considérablement les prétentions de l’Islam politique. Nous avons à plusieurs reprises montré les limites de l’islam politique lorsqu’il s’agit du pouvoir de l’Etat.

Sauf erreur, il n’y a jamais eu une expérience positive de l’islam dans l’exercice du pouvoir de l’Etat qui a généralement débouché sur la dictature absolue. Au plus, même en tant qu’alliés, les Islamistes finissent par trahir la « cause du peuple » comme ce fut le cas en Iran lorsque l’Ayatollah Al Khomeini a décidé d’éliminer le président Bani Sadr élu au suffrage universel et représentant d’un courant très modéré de l’islam persan. Pour asseoir son pouvoir, il n’hésita pas une fois le shah éliminé à pourchasser les communistes qui étaient pourtant des alliés de la révolution iranienne.

Il est tout naturel que l’islam politique miné dès l’origine par la querelle du pouvoir (Fitna) n’a jamais pu atteindre la maturité requise d’une démocratie considérée par les islamistes radicaux aussi bien dans le raisonnement (Munaza’a) que dans ses structures fonctionnelles, d’impie. A la limite, seule, il reste l’expérience tunsienne qui patauge dans des considérations dithyrambiques.

A cette fin, l’acte inaugural d’une vraie démocratie algérienne doit veiller à ce que les Islamistes adhèrent nécessairement au pacte consensuel et ils doivent être les cosignataires avec le courant des Démocrates algériens d’une charte donnant naissance à un Etat libre et démocratique tel qu’il est voulu par la rue algérienne.

Du coup, ce minimum requis nous impose une vigilance accrue pour que le pacte porte le sceau d’une adhésion totale au projet d’une société libre. Il reste qu’en remplacement de l’Etat national jacobin, la forme et la structure de l’Etat doivent être discutées pour faire valoir l’option la plus commode pour servir le peuple et uniquement le peuple. Et ce qui n’est pas une mince affaire.

Auteur
Fatah Hamitouche

 




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