Paru en novembre 2023 chez les éditions La Pensée de Tizi Ouzou, le recueil de poèmes « Plume vacillante » de Sadrina Aissani, cette nouvelle plume dans l’univers des lettres née en 1963 à Sidi-Aich en Kabylie, est une virée dans le monde de l’émotion et de la sensibilité.
A travers ses cent poèmes, la poétesse d’Ath-Waghliss, cette ville-phare, toute en charme, sur les rives de la Soummam, nous offre une vision panoramique sur ses états d’âme, ses ressentis et ses passions. Sorte de voyage émotionnel avec différentes escales, ponctué de réflexions.
Pour l’auteure, la poésie se pose en protectrice, en enchanteresse et en vigile de notre moi intime. C’est une citadelle à l’intérieur de laquelle on se réfugie pour sauvegarder notre sensibilité d’êtres humains. Les poèmes de ce premier recueil, prometteur à bien des égards, se dressent comme des locomotives d’un même train, sur les rails de l’humain. L’humain, dans toute sa fragilité, sa grandeur, sa splendeur.
Sadrina Aissani se veut messagère de paix, d’espérance et d’humanité, en explorant des thèmes universels qui lui tiennent à coeur. Il y a comme une quête de sens à un monde qui n’en a plus.
Un monde déréglé où la douceur d’une ode d’espoir n’a plus pignon sur rue. La poétesse revivifie l’appel à la fraternité, à la solidarité et à l’amour. Un poète est, pour elle, un passeur de bonnes ondes qui est à la recherche effrénée d’un idéal d’existence, au travers de la beauté des mots.
En amatrice des belles lettres, Sadrina Aissani veut transmettre cet amour des mots à ses lecteurs, aux générations montantes et à la société où elle vit. « La lecture, pense-t-elle, est le parent pauvre au sein de notre société et il faut que nos jeunes apprennent, dans l’urgence, à en tirer profit ». Cela nous rappelle cette fameuse « plante de la vie » dans l’épopée sumérienne de Gilgamesh.
Si cet héros-là était parti, il y a plus de quatre mille ans, en guerre contre les monstres et les Dieux, c’était en partie pour leur arracher le secret de l’immortalité. Au bout du compte, il avait compris qu’il n’y a que ses traces dans le monde d’ici-bas qui puissent le rendre éternel ! C’est pourquoi il s’est efforcé à conquérir le savoir et la connaissance, cette « plante de la vie » utile en tous lieux et en tous temps!
Le parallèle n’est pas des moindres, d’autant que, de nos jours, même si les jeunes fuient la lecture et les arts dans ce désert culturel qui est le nôtre, il n’en reste pas moins que ceux-ci forment partie des nécessités impérieuses de notre époque.
En cela, on peut dire que Sadrina Aissani a réussi un pari dans son recueil : nous faire comprendre que, sans le remède du savoir, toute société est vouée à la déchéance, à la perdition, à la disparition tout court.
Ses poèmes, en traitant divers thèmes, que ce soit l’amour, l’espoir, la désillusion, la traîtrise, le désenchantement, nous ramènent, d’une part, à l’explication de la fragilité de la condition humaine. Et de l’autre, ils sont une invitation implicite au retour à l’univers de la culture et du savoir, les seules garanties d’un monde équilibré et prospère.
C’est, somme toute, un recueil qui mérite d’être lu, pour le plaisir des mots et pour une pincée de sagesse qui transparaît en filigrane dans chaque vers. Sadrina Aissani nous fait voyager, aimer la vie avec tous ses revers, apprécier les mots pour ce qu’ils portent de vertueux et de cathartique, si l’on ose l’expliquer ainsi.
Bref, allons à la découverte de ce bijou !
Kamal Guerroua
Sadrina Aissani, Plume vacillante, Editions la Pensée, Tizi Ouzou, Novembre 2023, 103 pages, prix public 500 DA.
