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« Por si un dia volvemos » de Maria Dueñas ou la mémoire des pieds-noirs revivifiée 

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« Por si un dia volvemos » /Au cas où nous reviendrions un jour, est le titre d’un roman de Maria Dueñas, l’une des meilleures écrivaines espagnoles de notre temps. Publié en mars 2025 à Barcelone par les éditions Plana, ce roman narre la vie d’une jeune femme qui en 1927 a involontairement tué pour se défendre, l’agresseur qui la violait.

Analphabète, pauvre au point de dormir par terre sur de la paille, se nourrissant d’un trognon de pain, sans habits autres que ceux qu’elle porte sur elle, elle s’empare des papiers de son assassin et s’engage sur le chemin que ce dernier s’apprêtait à prendre, celui de l’Oranais, celui de l’Algérie française où les émigrants espagnols de l’époque espéraient trouver une vie meilleure.

La trame narrative de María Dueñas c’est l’histoire de cette jeune femme qui sous le nom factice de Cécilia Belmonte traverse toutes les épreuves pour survivre et se reconstruire dans un environnement colonial marqué par les tensions sociales.

Sous l’essor de l’Algérie française qui depuis une centaine d’années a attiré de nombreux Espagnols du Levant et d’Andalousie, la ville d’Oran n’a cessé de croître.

Pour répondre aux besoins des administrations ou du public, il faut de la main-d’œuvre et ce sont les mains bronzées et gercées des Espagnols et des Arabes, des Italiens et des Maltais, leur sueur, leur réveil aux aurores qui l’apportent. Sans eux,l’expansion urbaine de cette ville commerciale et portuaire de près de 200 000 habitants aurait été irréalisable.

Maria Dueñas raconte la trajectoire vitale de son personnage pendant trois décennies. Elle apprend à lire, à écrire, à parler l’Oranais langue ou se mélangent le français, le valencien, l’espagnol et l’arabe.

Avec chaque fois, la volonté de se dépasser, elle sera tour à tour manœuvre agricole dans une plantation de tabac, lavandière, domestique, ouvrière dans la fabrique de tabac Bastos et enfin créatrice de son propre commerce de savon qui lui donne une autorité réelle et une place dans la société oranaise.

Tout au long de ce périple défilent ses amis, ses amours, la solitude, le deuil, les douleurs de l’émigration et de l’exil, les humiliations et le racisme mêlés aux rencontres heureuses.

Elle dit vouloir à travers ce roman sauver la mémoire des Pieds-Noirs espagnols d’Algérie. Elle ne les idéalise pas. Elle évoque leurs faiblesses, leurs tensions, la condition des femmes. Elle estime que c’était une communauté de migrants courageux et travailleurs qui apportèrent beaucoup à la société dans laquelle ils vivaient et qu’ils furent injustement oubliés par la France et par l’Algérie.

Mais, au-delà de l’histoire des Pieds Noirs espagnols d’Algérie, c’est toute l’histoire tragique de l’Espagne, de 1920 à son entrée dans l’Europe en 1986 que l’écrivaine réveille.

D’abord, le désastre d’Anoual ou l’armée espagnole en guerre contre les Berbères du Rif subit une défaite qui laisse 15 000 morts sur le terrain. Ensuite la guerre civile espagnole, de 1936 à 1939, dont on ne peut donner le nombre exact de morts

mais que l’on estime à 500 000. Puis, en 1940, l’arrivée au pouvoir de Philippe Pétain qui enferme les Républicains espagnols dans des camps de concentration ou les livre aux nazis. En 1954 enfin, la Guerre d’Algérie qui conduit les Pieds-Noirs Espagnols à quitter un pays qu’ ils pensaient devenu le leur, pour un second exil.

Maria Dueñas termine son roman parfaitement documenté qui devrait attirer de nombreux lecteurs francophones lorsqu’il sera traduit, par ces lignes émotives pour tous ceux qui ont vécu la perte de leur terre natale et ressenti les douleurs de l’exil :

Garde tout dans ta mémoire, Cécilia, nous ne devons rien oublier murmura Rafael quand la côte d’Oran se transforma en une ligne floue. Au cas où nous reviendrions un jour. Mais il n’en fut rien.

Emile Martinez

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