Après des jours de harcèlement nauséabond, Imane Khelif a répondu à ses détracteurs sur le ring et a obtenu, malgré l’adversité, la médaille d’or. Rien que cela.
Il faut que je prévienne que je suis loin d’être un inconditionnel des Jeux Olympiques et je n’ai suivi que deux ou trois compétitions, parmi lesquelles la finale mixte de judo où j’ai été heureux de voir la remontada de l’équipe de France avant le coup de génie terminal de Teddy Riner et la finale de l’équipe de France de football contre l’Espagne. J’ai également, parce que ça passait dans mon quartier, à la compétition cycliste qui a vu le Belge Evenepoel.
Je me suis intéressé au cas de la boxeuse algérienne sans aimer la boxe ― juste parce que j’ai été choqué par ce harcèlement planétaire qui va des Russes, point de départ de l’abjection, aux milliardaires des États-Unis, Elon Musk et Donald Trump en tête. À croire qu’ils n’avaient que ça à faire pour des dirigeants de cette trempe !
En regardant cette femme se battre sur le ring, je me suis rendu compte que ses poings ne visaient pas uniquement ses adversaires mais les opinions préconçues, la patriarchie, les ragots, l’intoxication des réseaux sociaux mais pas que… et surtout les féministes de pacotille qui auraient aimé la voir sous un hidjab pour mieux défendre le combat des femmes sous domination masculiniste.
Sauf que cette femme est tout sauf une femme à genoux. Son combat de quelques jours contre cette obscénité a fait d’elle celle qui a redressé l’image de la femme nord-africaine comme nulle organisation féministe ne pouvait en rêver. Il parait que des milliers de petites filles se sont inscrites, dans la foulée, dans les clubs de sport. Elle a surtout mis à jour les grilles secrètes du monde de la boxe et des caniveaux où l’argent a remplacé depuis longtemps les beaux gestes du sport. Parlons-en et commençons par la genèse.
Cela fait déjà des années que les premières querelles ont éclaté entre le CIO et l’IBA. Lors des Jeux olympiques de Pékin en 2008, de Londres en 2012, puis de Rio en 2016, les combats sont organisés par ce qui était appelé à l’époque l’Association internationale de boxe amateur (AIBA), ancien nom de l’IBA.
Durant les trois éditions de ces Jeux, d’importants soupçons de corruption concernant les arbitres émergent. Une enquête indépendante est ouverte à la fin des JO de Rio et l’intégralité des 36 juges et arbitres qui y ont officié sont suspendus. De plus, le président de l’AIBA, Wu Ching-kuo, en poste depuis une décennie, est accusé de malversations financières. Il finit par démissionner en novembre 2017. Ce qui ne signifie pas pour autant la fin des problèmes.
La présidence de Rakhimov sera d’ailleurs de courte durée, puisque 14 mois après avoir assuré la présidence de l’AIBA, il démissionne. C’est là qu’en 2020 arrive le fameux Umar Kremlev. Ce proche de Vladimir Poutine est élu président de l’AIBA et promet de restaurer la réputation de l’organisation. Afin de repartir sur de bonnes bases, rien de mieux que de changer le nom de l’organisation qui devient l’International Boxing Association (IBA).
Durant les Mondiaux de boxe de 2023 organisés par l’IBA, Imane Khelif bat à plate couture Azalia Amineva, une boxeuse russe jusqu’alors invaincue. Quelques jours plus tard, alors que la compétition bat toujours son plein, la boxeuse algérienne, ainsi que la Taïwanaise Lin Yu-ting sont disqualifiées de la compétition.
L’IBA déclare dans un communiqué que celles-ci ont « échoué à se conformer aux critères d’éligibilité pour participer à la compétition féminine », sans donner aucun détail sur les tests pratiqués. Il fallait les croire sur parole. Imane Khelif venait de se qualifier pour la finale et Lin Yu-ting de recevoir la médaille de bronze.
Trois mois plus tard, le CIO écarte de nouveau l’IBA pour l’organisation de la boxe olympique lors des Jeux de Paris 2024. Il lui reproche, entre autres, son manque de transparence concernant le financement fourni par la compagnie gazière russe, Gazprom.
Le comité olympique décide alors de se charger lui-même de la boxe pour 2024 et ne reconnaissant pas les tests de l’IBA qui n’ont jamais été divulgués, il autorise Imane Khelif et Lin Yu-ting à participer aux Jeux.
La guerre est alors déclarée entre l’IBA et le CIO. Dans plusieurs vidéos publiées sur ses réseaux sociaux, Umar Kremlev, s’en prend directement à Thomas Bach, président du Comité international olympique. Il l’accuse d’être « maléfique » et « corrompu ». Et il réitère que les tests effectués montrent qu’Imane Khelif et Lin Yu-ting « sont des hommes » mais ne met en avant aucune preuve.
De son côté, le CIO ne cède pas, et dénonce les propos misogynes de l’IBA et de son dirigeant. « Il ne s’agit pas de cas de transidentité (…) Nous avons deux boxeuses qui sont nées femmes, qui ont été élevées comme des femmes, qui ont des passeports indiquant qu’elles sont des femmes, et qui participent à des compétitions depuis des années en tant que femmes ».
Voilà juste une mise au point définitive au vu de l’infamie que j’ai relevée ici ou là et surtout après avoir consulté des dizaines de sites sur internet.
Fermez le ban !
Kamel Bencheikh