Pour un dialogue franc en vue d’une réconciliation nationale. Pour un compromis vers une solution équitable pour une paix durable.
Bouaziz Aït Chebib, le sage, l’homme de paix, modeste et modéré a été libéré après deux ans d’emprisonnement injuste et un long combat judiciaire. Je tiens ici à lui manifester mon soutien total et toute ma joie pour cette heureuse issue étant sorti indemne de cette rude épreuve.
J’ose espérer que cet acte de justice augure d’une nouvelle ère de détente du climat politique à la hauteur du slogan « La nouvelle Algérie » dont le pouvoir actuel se réclame. Une détente qui se traduirait par la libération de tous les détenus politiques pacifiques comme gage de bonne volonté du pouvoir de mettre fin au climat de tensions et de répression aveugle.
Les autorités en place ont le devoir historique d’assumer les torts et les injustices commis par l’État et leurs prédécesseurs à l’égard de la Kabylie, à travers le déni identitaire et la violence institutionnelle, pour amorcer un projet de réhabilitation et d’indemnisations des victimes afin de réconcilier les citoyens avec les institutions et les pouvoirs publiques.
Ce projet devrait consister en la mise à l’écart des conservateurs extrémistes au sein de l’Etat, partisans de l’identité arabo-islamique exclusive de la jeune nation algérienne voulant l’éradication du fondement amazigh et autres héritages méditerranéen et africain, ainsi que les kabyles radicaux réfractaires à tout compromis.
La Reconnaissance, la réhabilitation, la prise en charge politique et financière du patrimoine culturel ainsi que les identités plurielles des Algériens permettraient de réconcilier l’Algérie sans complexe avec son histoire authentique et sauver l’unité nationale in fine.
Depuis le mouvement de libération nationale, l’Algérie et la Kabylie ont vécu dans la défiance et la méfiance totale. L’État algérien ayant choisi l’arabe comme identité et langue officielle et fait du déni de celle de la Kabylie une constante nationale. Ce qui, accentué par la répression, a fini par faire glisser la revendication identitaire qui n’avait pas trouvé place dans le cadre du droit national vers le droit international, seule issue pour échapper à l’extinction.
Par conséquent, ceci est devenu une menace pour l’intégrité territoriale de l’Algérie. Si la situation de statu quo et d’injustice perdure, cela conduirait inéluctablement à la désintégration du pays.
Cependant, malgré tous les risques et la conjoncture historique périlleuse devant laquelle se trouve le pays, l’espoir est permis de préserver l’unité nationale de l’Algérie et les intérêts supérieurs de la Kabylie que sont son identité et sa langue millénaires, sa sécurité, son droit à s’autogouverner dans un cadre national fédéré où la diversité et les spécificités régionales trouveraient un espace d’expression et de développement interactif et intégré.
Il suffirait de mettre fin à cette politique répressive par l’amnistie générale des acteurs politiques pacifiques, supprimer les ISTN, permettre à la diaspora de rentrer sans risques, lever les interdits qui frappent l’activité politique et culturelle, puis enfin nouer le dialogue avec des hommes modérés pour préparer l’alternance dans un climat serein. Par cette politique volontariste, le pouvoir pourrait regagner en crédibilité à l’intérieur comme à l’extérieur. L’expérience du voisin marocain est très intéressante et on pourrait très bien s’en inspirer.
Soucieux de préserver son intégrité territoriale, ce dernier avait fini par proposer un plan ambitieux d’une large autonomie pour le Sahara, à l’exception du domaine régalien que sont la défense, la diplomatie et la monnaie. Cette contribution est le fruit d’une profonde et longue réflexion, d’observation de la scène nationale et internationale, de la présence de menaces réelles aux frontières avec des velléités des ennemis de désintégration du pays, ainsi que de consultation de certains amis encore au sein de la mouvance souverainiste et qui n’attendent qu’une main tendue des pouvoirs publiques pour œuvrer dans le sens d’une réconciliation et d’un compromis historique allant vers une solution juste où il n’y aurait ni vainqueur ni vaincu.
Ainsi des régions entières ou collectivités territoriales pourraient accéder à l’autogouvernance sans qu’il y ait la moindre menace sur l’unité nationale et la stabilité régionale.
Une solution équitable qui, indéniablement, remportera de plus en plus l’adhésion de la communauté et des institutions internationales ainsi que des modérés parmi les souverainistes. Je suis convaincu que les hommes visionnaires rentrent par la grande porte dans l’histoire en propulsant leurs pays dans une ère nouvelle consacrée à la stabilité et au développement loin des turbulences politiques et des menaces sur l’unité nationale et territoriale.
Muhend Beloucif, ancien responsable au MAK/GPK.