Mardi 19 janvier 2021
Pourquoi Abdelmadjid Attar joue-t-il sur les mots ?
Dans une synthèse portant sur le bilan annuel des réalisations provisoires du secteur de l’année 2020 et adressée, dimanche 17 janvier 2021, à l’Agence Presse Service (APS) et reprise par de nombreux revues et journaux nationaux et étrangers, le ministère de l’Energie, sous la conduite d’Abdelmadjid Attar, a évalué le volume global des exportations d’hydrocarbures à 82,2 millions de tonnes équivalent pétrole (TEP) pour une valeur, lit-on, de 20 milliards de dollars.
Que ce soit en volume ou en valeur, la baisse respectivement de 11% et de 40% par rapport à 2019 a été relevée et « automatiquement » imputée à « une tendance baissière durant l’année 2020, en raison de l’impact de la pandémie du Covid-19 sur l’économie nationale. » (01)
Tous ces résultats au demeurant décevants ont été évalués sur la base d’un prix moyen annuel, puisque l’année est finie, de 42 dollars le baril alors qu’il était en 2019 autour de 64 dollars le baril. Bien que les chiffres arrondis et les motifs restent discutables, jusqu’à cette partie de cette synthèse, il n’y avait rien de nouveau et encore moins d’étonnant.
Mais le dernier paragraphe du rapport qui compte les exportations « hors hydrocarbures » dont celles pétrochimiques et autres restent inaccoutumées pour être comptabilisées comme il y est bien mentionné « gonfler » le montant des recettes à 22 milliards de dollars. Est-ce pour se rapprocher des chiffres qu’il avancés en juillet à peine moins d’un mois après son installation au ministère de l’énergie et repris par l’agence Reuters qui cite sa déclaration directe à la Radio de la chaine national ? (02).
En effet, il a déclaré « les revenus issues de l’exportation de pétrole et du gaz devraient atteindre 23 milliards de dollars » Ses prévisions par rapport à ce qui a été effectivement réalisé varient de près de 3 milliards de dollars soit près de 15% d’écart pour un responsable au ce niveau de l’Etat.
Ce n’est pas un abaissement de reconnaître s’être trompé mai une ruse calculée de jouer avec les mots, pourrait être « imprudent. » Ce qui en plus rend insolite cette comptabilisation dans ce rapport, c’est que le hors hydrocarbures lorsqu’il sert de feedstock à l’industrie n’est plus des prérogatives du secteur de l’énergie mais de celui de la douane dépendant du ministère des finances seule habilitée à compter ce qui sort et rentre dans les frontières du pays et est en contact direct avec les organes du commerce.
Or, le directeur général du commerce extérieur Khaled Bouchlaghem avait déclaré le 14 janvier 2021 dans un entretien à l’APS que « Selon les indicateurs prévisionnels préliminaires de 2020, la valeur des importations a reculé de 18% soit 34,4 milliards dollars par rapport à l’année 2019 qui s’étaient établies à 42 milliards de dollars, tandis que les exportations ont baissé à 23,8 milliards de dollars contre 35,8 milliards de dollars en 2019, du fait de la chute des prix du pétrole sur les marchés mondiaux, en raison de la récession de la demande induite par les mesures de bouclage économique » (03)
1- En plus, de juillet à décembre, les prix du baril se sont stabilisés
Le Sahara Blend, la référence Algérienne qui s’approche de Brent qui lui reste celle Européenne ont gagné en moyenne pour le deuxième semestre 2020 allant du premier juillet au 31 décembre 2020 plus de 2 dollars pour s’établir à une moyenne de 44,30 dollars le baril alors qu’il a atteint parfois moins de 15 dollars de janvier à fin juin 2020. Le Sahara Blend a clôturé l’année 2020 en gagnant 7,40 dollars (04). Donc, tout le semestre était favorable au Sahara Blend avec la reprise de l’activité raffinage qui agrée ce brut léger et moins sulfureux. Il y a eu aussi durant ce semestre une reprise des exportations de gaz vers l’Espagne après les accords passés avec Naturgy et la visite du premier ministre de ce pays en Algérie à partir du 7 octobre 2020.
2- Sur le fond de la composition des produits hydrocarbures à l’exportation
Sonatrach compte pour évaluer ses recettes périodiques l’exportation, d’abord le pétrole brut, les produits raffinés, le condensat, le GPL (gaz de pétrole liquéfié) le GN (gaz naturel), le GNL (gaz naturel liquéfié) et enfin les produits pétrochimiques dont parle ce rapport de synthèse du ministère de l’énergie et qui prétend booster les recettes de 20 à 22 milliards de dollars. C’est ce bouquet de produits d’hydrocarbures qui permet d’évaluer les revenus périodiques.
Un premier point de situation a été fait selon plusieurs sources concordantes par la direction commerciale de Sonatrach, ce qui est entièrement de son ressort la fin août pour évaluer les dégâts causés par le Covid-19 d’abord sur la demande, l’excès de l’offre par un surstockage et conséquemment sur les prix du baril. Ce bouquet a ramené à cette date fin août près de 14,7 milliards de dollars (06) avec des prévisions pessimistes de terminer l’année avec moins de 20 milliards de dollars.
Cette même situation a été refaite et suivie au deuxième semestre vers mi décembre 2020, ce bouquet valait en moyenne à 40,76 dollars le prix du baril à 20,334 milliards de dollars. C’est sur cette base de calcul que le PDG de Sonatrach Tawfiq Hakkar situait les recettes cette année entre 20 à 21 milliards de dollars dans un entretien qu’il a accordé à Echorouk. (05)
Etant donné ce gain sur le prix du baril et, partant celui du million de British unit (BTU) du gaz, durant le mois de décembre, on devrait se rapprocher de 21 et plus que de descendre à 20 milliards de dollars. Le prix d’évaluation n’est plus 40,76 dollars le baril pris dans l’évaluation de Sonatrach mais 42 dollars tel que annoncé dans cette synthèse du ministère de l’énergie.
Rabah Reghis
Renvois
(05)-https://www.facebook.com/EchorouknewsTV/videos/408320980368049