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Pourquoi la Kabylie ne peut demander son indépendance

Djebla
Djebla. Image par Aksel Mazigh de Pixabay

Pourquoi j’invoque cette pensée aujourd’hui ? Parce que je viens de lire un écrit qui remet le choix de l’indépendance comme option politique. On pourrait me rétorquer que c’est une opinion circonscrite à un groupe très minoritaire.

Peu m’importe, si l’idée est présente c’est qu’elle a été nourrie et théorisée par un mouvement qu’on ne peut rejeter d’une main méprisante.

La Kabylie ne peut pourtant pas revendiquer l’indépendance. Tout simplement parce qu’on ne devient pas indépendant de sa propre terre. L’Algérie est autant sa terre que celle de n’importe quel individu qui s’en revendique et qui ne la reconnait pas dans son droit entier.

Ensuite, parce que je l’aime et cela me suffit à ne pas concevoir cette folle idée qu’elle ne soit plus un jour de mon pays au sens juridique. De toute façon, elle le sera toujours au sens de mon identité.

Je suis Oranais, je suis donc Algérien et par conséquent citoyen de Kabylie. Que serais-je sans une partie de moi-même ?

Et puis, la Kabylie est déjà indépendante par son droit. Tous ceux qui ont des droits naturels et inaliénables sont libres et indépendants quels que soient ceux qui envisagent de les renier.

Elle est forte et invincible par ses convictions, son identité et la beauté de son territoire. Je suis donc invincible par mes convictions, mon identité et la beauté de mon territoire.

Voilà plusieurs décennies que je milite pour la reconnaissance de ses droits. Je dis toujours que je n’ai pas eu ni n’aurai plus à mon âge les épaules assez larges pour les faire admettre et imposer.

Je me fiche totalement de qui parle telle ou telle langue, de qui fait tel ou tel couscous, danse ou chante dans n’importe quel héritage familial.

Ce que je veux est que mes compatriotes soient heureux et libres. Cela me suffira car personne n’est d’une terre par un droit exclusif du fait de sa langue, de sa culture ou de sa coutume.

Chacun est de cette terre parce qu’il y est né, y a vécu ou l’a choisie. Il est de cette terre parce qu’il en ressent un attachement.

Voilà pourquoi je pense que la Kabylie a déjà son indépendance. Car les êtres humains ne sont jamais éternellement prisonniers de ce que les autres voudraient qu’ils soient.

Nous vaincrons ensemble ce régime militaro-civile et ensemble nous construirons un avenir meilleur. Pour ma part, cet avenir est déjà derrière moi, mais il me suffit de croire à sa réalisation future pour être heureux.

Alors nos enfants parleront la langue de leurs parents qui deviendra réellement officielle, mangeront le couscous de leur enfance, danseront et chanteront dans la joie de leur coutume ou de leur choix.

J’aurais tellement souhaité être né dans un pays qui n’a pas à se demander qu’elle est son identité officielle.

Car l’identité de l’être humain n’est pas la carte d’identité.

Sid Lakhdar Boumédiene, enseignant retraité

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