A une semaine du second tour de l’élection présidentielle, rien n’est joué entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen. L’option du barrage, voire du front républicain invoqué par certains leaders pour empêcher Marine Le Pen de devenir présidente ne recueille pas toutes les faveurs.
Dans ce duel à couteaux tirés, le président sortant a un léger avantage sur sa rivale d’extrême droite, si l’on en croit les sondages d’opinion. Il l’emporterait dimanche prochain dans une fourchette de 53 à 55,5 % contre 44,5 à 47 % pour Marine Le Pen.
L’enjeu de ce second tour est de convaincre les indécis et les abstentionnistes, qui étaient au premier tour plus de 26 % de la population en âge de voter.
Le débat télévisé mercredi soir entre les deux rivaux jouera un rôle décisif. En 2017, la candidate du Rassemblement national avait sombré face à Emmanuel Macron. Elle estime être mieux préparée cette fois et se dit « extrêmement sereine ».
« Dans ma tête je suis prête à exercer le pouvoir », a-t-elle confié dans un entretien diffusé par TF1 dimanche soir. En attendant, elle a passé un dimanche de Pâques studieux pour « travailler et préparer le débat » en compagnie de plusieurs proches, a indiqué son porte-parole Sébastien Chenu.
Plusieurs d’entre eux sont revenus dans les médias sur son projet d’interdiction du voile dans l’espace public: il n’est plus la priorité dans la lutte contre l’islamisme.
L’interdiction n’est qu’un « objectif à terme », selon le président du RN Jordan Bardella, qui distingue « le voile pour les Françaises (…) issues de l’immigration dans les années 60-70 » du « voile devenu aujourd’hui un instrument de pression des fondamentalistes islamiques ».
« Boule puante »
Le camp Le Pen est monté dimanche au créneau sur un autre sujet, celui des accusations de détournement d’argent public européen visant leur candidate, en dénonçant « une boule puante ».
Marine Le Pen et ses proches sont accusés par l’office européen de lutte antifraude d’avoir détourné environ 600.000 euros au cours de leurs mandats d’eurodéputés, selon un nouveau rapport remis en mars à la justice française et révélé par Mediapart.
Depuis le premier tour, la stratégie de Mme Le Pen vise à asseoir sa crédibilité, et continuer à lisser son image.
Elle maintient la thématique du pouvoir d’achat, plutôt que l’immigration, et oppose deux France, celle des « élites » favorables selon elle à Emmanuel Macron et l’autre, populaire, qu’elle prétend incarner.
Son programme économique ne convainc pas le prix Nobel Jean Tirole, qui a jugé, dans une tribune parue dans La Dépêche du Midi, qu’il est « dissimulateur et non financé » et « appauvrira durablement notre pays ».
Côté syndicats, Laurent Berger et Philippe Martinez, secrétaires généraux respectivement de la CFDT et de la CGT, ont appelé à « ne pas confier les clés de la démocratie » à la candidate RN, dans un texte commun paru dans le Journal du dimanche, sans toutefois mentionner le nom d’Emmanuel Macron.
« Convaincre »
Entré tardivement en campagne, le président sortant se démultiplie en cherchant à mobiliser, convaincre et être « à l’écoute » des Français.
A Marseille samedi, il a fait un long plaidoyer en faveur de l’écologie — thématique cruciale à gauche et notamment chez les électeurs de Jean-Luc Mélenchon — tout en appelant au rassemblement derrière lui face à la montée de l’extrême droite.
Mais selon la consultation en vue du second tour lancée par M. Mélenchon auprès de ses 310.000 soutiens en ligne, le vote blanc ou nul (37,65 %) est en tête. Additionnés, vote blanc ou nul et abstention (près de 29 %) sont nettement majoritaires, tandis que le vote Macron ne représente qu’un tiers.
Pour le leader LFI, 3e homme du premier tour, ce résultat « n’est pas une consigne donnée à qui que ce soit ». Seul message martelé par M. Mélenchon dès le 10 avril au soir: « pas une seule voix » à Mme Le Pen.