Il m’est impossible de ne pas prendre du recul par rapport à l’immense joie légitime et méritée en France suite à la victoire du PSG dans la Coupe d’Europe des champions.
Le match a été sublime et les sensations humaines exultées. Malgré mes très grandes réserves sur les dérives du football dans ce qu’il a de détestable, débordant souvent jusqu’à la vulgarité, son spectacle me transporte, comme des milliards d’êtres humains, depuis ma jeunesse à Oran.
Supporter un club, c’est au-delà du plaisir, c’est la transcendance, je le reconnais. C’est aller au plus profond de soi pour s’évader un court instant des épreuves de la vie.
Tout cela est vrai et heureusement que l’humanité, depuis l’antiquité, connait et porte le spectacle de la compétition physique comme une compétition avec soi-même. Hier soir, ce rapport a été bien au-delà de tout espoir. C’était beau, c’était grandiose.
Cependant, il faut toujours remettre les pieds sur terre et immédiatement prendre du recul par rapport aux sentiments qui vous emportent. Il y a eu deux morts, certes en marge de la compétition et de la manifestation de joie, mais deux morts tout de même. 5 buts magnifiques, deux morts, c’est ce qu’aura coûté la joie.
Je n’aurai pas l’indignité de mettre sur un pied d’égalité, les blessures, assez graves pour certains ainsi que les vols et les dégâts matériels, même s’ils sont révoltants. Deux vies humaines ont été sacrifiées au temple des débordements des sentiments de bonheur. Le bonheur, ce n’est pas son rôle d’apporter mort et désolation, c’est donner à la vie et à l’espoir humain une force qui les accompagnent.
Je ne pouvais pas éviter d’avoir une pensée, à l’heure de la rédaction de cette chronique, pour les vies enlevées et la destruction de deux familles pour une compétition qui reste malgré tout un jeu de baballe pour milliardaires entourés d’une foule qui hurle la gloire aux dieux du stade comme dans les jeux antiques. Pour moi, ce n’est pas du sport, c’est un spectacle, il devrait porter cette qualification.
Rien ne valait qu’on n’en n’arrive à ce point de danse du veau d’or. Ce qui m’a heurté est le silence des joueurs, pas un mot, en tout cas au niveau exigé par le drame. Ils n’ont pas eu la décence de le faire et auraient dû offrir symboliquement cette coupe aux deux sacrifiés par leurs passions, celles qui enrichit et portent les joueurs au sommet de la gloire et de leur richesse.
Aujourd’hui, par cette chronique, je baisse la tête en respect de ces deux très jeunes hommes (17 et 2à ans, à vérifier), ils ont été fauchés par la mort à un âge où toute une vie leur était promise.
Les footballeurs vont maintenant encaisser une fortune, les deux jeunes ont payé les places les plus chères pour les financer, celle de leur vie.
Aujourd’hui, tout le monde va parler avec enthousiasme de la joie de la grande soirée d’hier. Aujourd’hui, des familles vont parler du malheur de la soirée qui leur a enlevé l’être cher.
Aujourd’hui, les footballeurs les ont oubliés, pas moi.
Boumediene Sid Lakhdar