Mardi 30 avril 2019
Quand Khaled Nezzar s’assume, c’est Ferhat Mehenni qu’on allume !
La sortie intempestive de Khaled Nezzar et le tollé provoqué par la visioconférence de Ferhat Mehenni à Tizi-Ouzou nous offrent une belle occasion d’évoquer quelques rappels sous forme de mises au point nécessaires pour que nos jeunes de moins de 40 ans sachent démêler le vrai du faux en procédant à des analyses personnelle.
Celles-ci sont seules à même de les rapprocher d’une objectivité plus que jamais de mise dans ce flux d’intox et d’amalgames volontairement entretenus ou non par ces héritiers de la famille militaro-FLiN-tox qui excellent dans l’art et la manière de se faufiler à travers moult chemins escarpés.
On ne sait pas trop ce qui a poussé le vieux général à la retraite à sortir de son silence pour se couvrir de toutes sortes d’auréoles et se vanter d’un credo démocratique superieur à faire pâlir de jalousie Martin Luther King et Nelson Mandela si ce n’est un petit coup de main au journal de son fils que l’on disait sur le point de jeter l’éponge !
Laissons de côté ces révélations trop tardives pour être honnêtes concernant Saïd Bouteflika ! Cette forme de « ce n’est pas moi, c’est lui » pour se dédouaner porte l’empreinte de chamailleries de cours de récréation. Inutile de s’y attarder !
Là où le texte de Khaled Nezzar devient intéressant et résume l’entêtement du personnage à assumer des dérives qui ont fait perdre 30 années au pays, c’est quand notre Général aguerri aux coups tordus assume l’arrêt d’un processus électoral qui avait connu toutes sortes de dépassements de la part des propres FIStons d’un système qu’il a loyalement servi !
Mais il se garde bien de rappeler que les élans de démocratie d’octobre 1988, c’est lui et lui seul qui les a étouffés et tués en usant de balles réelles contre de jeunes manifestants. Monsieur Nezzar se fait le chantre d’une démocratie dont il a de tous temps ignoré les contours, oubliant que c’est sous sa domination de ministre de la Défense que la constitution algérienne, laquelle venait d’introduire le multipartisme, avait été piétinée en légalisant une flopée de partis islamistes dont le FIS !
Monsieur Nezzar assume et s’assume mais il feint d’oublier que c’est au nom de sa propre vision d’un pouvoir exclusif des militaires que les hordes islamistes et les soldats de la république avaient livré une guerre sans merci contre des civils inoffensifs !
À lire leurs contributions, ni les civils ni les militaires du pouvoir ne font preuve d’un tant soit peu d’honnêteté pour oser faire part de quelques pincées de mea-culpa concernant des dérives dont ils se refusent à assumer la responsabilité pleine et entière ! C’est la faute aux autres, comme toujours…
Les erreurs commises par l’ancien ministre de la Défense sont si nombreuses qu’il y a de quoi remplir un bottin si on s’attelait à toutes les énumérer. Mais à quoi cela servirait quand tout indique que le personnage nierait tout en bloc, lui qui se confère la légitimité d’avoir toujours raison ?
Venons-en à Ferhat Mehenni ! Une simple visioconférence avec les étudiants de Tizi-Ouzou et voilà qu’un tollé de réprobations est déclenché ! Quelle genre de règle peut ainsi autoriser un général bourreaux d’Octobre 1988 à s’exprimer en toute légalité et que l’on interdise à un homme qui n’a tué, ni violonté personne, de prêcher ses idées (en pacifiste convaincu) chez lui ?
Décidément le chemin est encore long pour faire accepter à tout le monde la simple idée que tous les débats sereins, même ceux qui fâchent, se doivent d’être permis, si tant est que les fonds de nos discordes ne se transforment pas en pugilats et ne reintroduisent pas la loi du plus fort sur les estrades de nos amphis ! On en a suffisamment bavé avec les Boumediene, les Nezzar et les Bouteflika pour suivre des pistes à tout fulminer dès que les idées des autres ne nous conviennent pas !
Pour ceux qui ne le sauraient pas où ceux qui l’auraient oublié, il est utile de rappeler que Ferhat Mehenni a été arrêté 17 fois pendant les années sombres de Boumediene et Chadli et emprisonné à Tizi-Ouzou et Lambèse au milieu des années 1980 par ce même système. A l’époque, peu d’Algériens osaient levaient la voix contre le régime.
Ce même régime que beaucoup d’Algériens n’oseront dénoncer qu’en 2019 ! Aux premières loges d’un combat identitaire, il y avait de quoi se radicaliser à la suite du printemps noir de 2001 ! Un printemps qui, ne l’oublions pas, avait emporté 127 jeunes à la fleur de l’âge !
Rappelons aussi qu’avant d’être poussé à la politique par tant d’évènements dramatiques, Ferhat Mehenni était versé dans la chanson engagée, ce qui lui a valu le titre de maquisard de la chanson Kabyle attribué par notre regretté Kateb Yacine !
Ne serait-ce que pour les raisons révélées par ce résumé succinct, celles d’un combat pacifique dont il a payé le prix fort, si Ferhat Mehenni a des choses à dire, qu’on le laisse les dire ! Au nom de quoi le lui interdire ?