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vendredi 8 août 2025
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Quand le régime algérien choisit les Algériens à exclure

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L’affaire pourrait paraître anecdotique, si elle ne révélait un profond désordre moral et politique : deux ressortissants algériens, l’un journaliste, Farid Alilat, l’autre militante des droits humains, Nassera Dutour, présidente du Collectif des Familles de Disparus en Algérie (CFDA) se sont vu refuser récemment l’accès à leur propre pays.

Tous deux Algériens, et pourtant considérés comme indésirables sur le sol national. Au même moment, l’État algérien accuse la France de violer ses obligations à l’égard de ses ressortissants, notamment dans le cadre des procédures d’expulsion liées aux Obligations de Quitter le Territoire Français (OQTF). Il y a là, sinon une contradiction, du moins une hypocrisie manifeste.

D’un côté, la France applique une politique migratoire conforme à son droit national et à ses engagements internationaux. Les OQTF visent, pour l’essentiel, des étrangers en situation irrégulière, parfois multirécidivistes, souvent auteurs de délits ou de violences. Il ne s’agit ni d’une chasse arbitraire ni d’un ciblage ethnique, mais d’une régulation nécessaire. Tout État souverain a le droit – et le devoir – de reconduire à la frontière les personnes étrangères qui n’ont plus vocation à rester sur son sol. 

De l’autre côté, l’État algérien, au lieu d’assumer la reprise de ses ressortissants « indésirables », refuse régulièrement de délivrer les laissez-passer consulaires, pourtant indispensables à l’exécution des OQTF.

Cette obstruction est ancienne, systématique, et a déjà conduit la France, en 2021, à réduire temporairement le nombre de visas délivrés à l’Algérie. Le message était clair : on ne peut refuser ses responsabilités tout en exigeant les privilèges du partenariat.

Et voilà que le régime algérien, dans un communiqué de son ministère des Affaires étrangères, s’arroge le rôle du défenseur des droits de ses ressortissants. Il accuse la France de violer une série d’accords bilatéraux :

• L’accord franco-algérien du 27 décembre 1968, relatif à la circulation, à l’emploi et au séjour des Algériens en France,

• La convention consulaire de 1974,

• L’accord de 2013 sur l’exemption de visas pour les détenteurs de passeports diplomatiques,

• et même, de manière plus spectaculaire, la Convention européenne des droits de l’homme de 1950, notamment son article 8 relatif au droit au respect de la vie privée et familiale.

Mais ce discours victimiste masque une réalité bien plus gênante : l’Algérie officielle ne protège pas tous ses ressortissants. Elle sélectionne. Et elle exclut. Les plus vulnérables, ceux qui délinquent à l’étranger et entachent l’image du pays, devraient logiquement être repris avec sérieux et discrétion ― ce serait la moindre des responsabilités étatiques. Mais non : ces Algériens-là, l’État les laisse dériver, tout en accusant les autres de les maltraiter.

Et que fait-il, en revanche, de ses ressortissants les plus respectables ? Ceux qui osent parler, critiquer, défendre les droits humains ? Il les bannit. Il les empêche de poser le pied sur le sol natal. Le journaliste Farid Alilat, récemment refoulé à la frontière, en est un exemple frappant.

À ses côtés, une militante des droits humains a connu le même sort. Tous deux sont Algériens. Tous deux, pourtant, traités comme des intrus, voire comme des traîtres.

Ce double standard est insupportable. Car il ne s’agit plus seulement d’un désaccord diplomatique. Il s’agit d’un renversement des valeurs. Ce n’est plus la France qui expulse arbitrairement : c’est l’Algérie qui abandonne les siens les plus fragiles et écarte les siens les plus courageux.

En refusant d’assumer ses obligations en matière de réadmission, Alger viole non seulement l’accord franco-algérien de 1994, mais aussi l’esprit même de la coopération bilatérale. En interdisant à ses propres citoyens le retour au pays, elle transgresse un principe fondamental du droit international : le droit pour un individu de revenir dans son propre pays (garanti notamment par l’article 12 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques adopté par l’ONU en 1966).

Et que dire, enfin, du devoir consulaire que l’État algérien prétend défendre ? Comment peut-on invoquer le « devoir de protection consulaire en tout temps et en tout lieu », quand on refuse d’ouvrir ses propres consulats aux ressortissants expulsés ? Quand on ferme sa porte à ceux qui n’ont plus de papiers, mais toujours une nationalité algérienne ?

La vérité est là : le régime algérien instrumentalise le statut de ses ressortissants à des fins politiques. Il les défend quand cela l’arrange, les abandonne quand cela l’ennuie, les bannit quand cela le dérange. À l’inverse, la France, quoi qu’on pense de sa politique migratoire, agit dans un cadre juridique clair, contrôlé, et souvent sous la surveillance du juge administratif ou judiciaire.

Il ne s’agit pas de faire la morale, ni d’idéaliser un État contre un autre. Il s’agit de rappeler que la souveraineté n’est pas à géométrie variable. On ne peut, en même temps, réclamer le respect des droits de ses ressortissants à l’étranger et bafouer les droits fondamentaux de ses propres citoyens chez soi.

Quand un État se refuse à accueillir ses délinquants et rejette ses justes, ce n’est pas la souveraineté qu’il défend : c’est l’arbitraire qu’il exerce.

Kamel Bencheikh

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1 COMMENTAIRE

  1. De toute évidence Teboune et Chengriha essayent de créer le chaos migratoire en France. Le régime Teboune ne protége et ne defend aucun algérien dans le monde ou en Algérie. Bien au contraire : l’objectif actuellement c’est d’amener la France à détruire la communauté algérienne de France. Ensuite, Le régime pourra à nouveau jouer les victimes et se réinventer un ennemi exterieur.
    Il n’y a pas d’ennemis exterieurs ! Qui chercherait à cibler un pays que ses enfants et même les familles fuient au risque de leur vie comme si nous étions en guerre ? Qui aurait besoin de destabiliser un pays dont le Président est un mythomane ? Il n’y a pas de complot exterieur. Il y a un complot de Teboune et Chengriha contre l’Algérie et contre la diaspora algérienne à qui ils ne pardonnent ni la mobilisation pendant le Hirak ni le quasi boycott des dernières élections presidentielles. Ouvrons les yeux : Ce n’est pas Retailleau qui a mis le pays dans l’état où il est ! Ce n’est pas retailleau qui pousse des dizaines de milliers d’algériens à fuir leur pays. Ce n’est pas Retailleau qui nous étouffe, qui nous asphyxie ! C’est Teboune

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