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Sahara occidental : le roi Mohammed VI renouvelle son offre de dialogue, Alger garde le silence 

Mohammed VI

Mohammed VI tend la main à l'Algérie

À l’occasion de la Fête du Trône, célébrée le 30 juillet, le roi Mohammed VI a, une fois de plus, tendu la main à l’Algérie en appelant à un «dialogue franc, sincère et responsable ». Dans un discours empreint de solennité, le souverain marocain a réitéré sa volonté de dépasser les différends historiques avec Alger, notamment le contentieux central du Sahara occidental.

« Le peuple algérien est un peuple frère », a souligné le roi, rappelant les liens profonds unissant les deux peuples — langue, religion, géographie et mémoire commune. Fidèle à ce qu’il appelle « la politique de la main tendue », Mohammed VI a plaidé pour une désescalade diplomatique et un dépassement des tensions qui minent les relations bilatérales depuis des décennies.

Une main tendue dans un contexte géopolitique favorable à Rabat

L’offre marocaine intervient dans un environnement diplomatique où Rabat bénéficie d’un soutien international grandissant à sa proposition d’autonomie pour le Sahara, présentée comme la seule solution « réaliste et pragmatique » au conflit. Le roi a salué dans son allocution les positions constructives du Royaume-Uni et du Portugal, venus s’ajouter aux soutiens déjà exprimés par des acteurs majeurs comme les États-Unis et la France, membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU.

Cette dynamique consolide la stratégie marocaine d’internationalisation du dossier, visant à faire reconnaître sa souveraineté sur le territoire contesté tout en se posant en acteur de compromis. Elle accentue cependant la pression sur l’Algérie, qui campe sur une position de principe inchangée : le droit à l’autodétermination du peuple sahraoui et le soutien à la République arabe sahraouie démocratique (RASD), autoproclamée.

Silence persistant d’Alger face aux ouvertures de Rabat

Malgré les appels répétés du monarque à la réouverture des canaux diplomatiques et à la relance de l’Union du Maghreb arabe — qualifiée d’« impensable » sans l’implication conjointe du Maroc et de l’Algérie — aucune réaction officielle n’a été enregistrée de la part d’Alger. Ce silence, désormais récurrent, témoigne de la profondeur du fossé qui sépare les deux voisins.

Historiquement, les multiples offres marocaines de dialogue, souvent lancées à l’occasion de la Fête du Trône ou de la commémoration de la Marche Verte, n’ont jamais reçu de réponse formelle. L’Algérie a régulièrement qualifié ces initiatives de « non-événements », les percevant comme des gestes unilatéraux masquant un agenda diplomatique favorable au Maroc.

Une méfiance durable alimentée par des contentieux non résolus

La méfiance algérienne s’enracine dans des griefs de long terme : fermeture des frontières, campagnes médiatiques hostiles, différends sécuritaires et géopolitiques. Alger conditionne toute normalisation à des gestes concrets : l’arrêt du « dénigrement », et surtout le respect de sa position sur le Sahara occidental, qu’elle considère comme un territoire à décoloniser sous mandat onusien.

Or, aucun de ces points n’a été abordé explicitement dans les récentes prises de parole du roi Mohammed VI. En conséquence, la main tendue de Rabat, bien que symboliquement forte, reste perçue à Alger comme incomplète et politiquement insuffisante.

Vers une impasse diplomatique durable ?

Le statu quo semble s’imposer. Pour les analystes, le silence d’Alger relève moins d’un simple désintérêt que d’une stratégie de rejet prudent, visant à ne pas légitimer la proposition marocaine tout en maintenant sa posture de défense du droit international et des résolutions onusiennes.

L’Algérie continue de défendre fermement l’organisation d’un référendum d’autodétermination, conformément aux engagements historiques des Nations unies, et rejette toute solution imposée, y compris celle de l’autonomie sous souveraineté marocaine. Au-delà de ces questions cruciale, il faudra bien que les deux pays sortent par le haut de cette crise dont aucun ne tire un quelconque bénéfice.

Une Afrique du Nord paralysée par les dissensions

Dans ce contexte tendu, la perspective d’une région Afrique du Nord unie et intégrée semble de plus en plus lointaine. L’Union du Maghreb arabe, pourtant perçue par Rabat comme essentielle à la stabilité et au développement régional, reste paralysée par l’antagonisme entre ses deux piliers fondamentaux.

Tant que le dossier du Sahara occidental continuera de cristalliser des divergences idéologiques, géopolitiques et identitaires aussi profondes, les mains tendues de part et d’autre risquent de se croiser sans jamais se saisir.

En somme, le discours de Mohammed VI s’inscrit dans une logique de continuité diplomatique marocaine : afficher une posture d’ouverture, consolider le soutien international à sa position, et placer Alger face à ses responsabilités régionales. Mais sans changement de paradigme ni concessions réciproques, le rapprochement entre Rabat et Alger reste, pour l’heure, un horizon lointain.

Samia Naït Iqbal

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