Mercredi 1 août 2018
Salim Yezza : quand donc un juge aura le courage de cesser les honteuses compromissions ?
Salim est un Algérien, militant des droits de l’Homme, qui n’a commis qu’un seul crime, défendre les droits de l’humanité dans ce qu’ils ont d’intangibles. Voilà sa seule faute au regard de notre innommable régime algérien.
Le chef d’inculpation ? « L’incitation à la haine » pour le principal. À cette lecture, sans connaître le dossier, nous serions orientés vers un propos raciste, une délation, une apologie de la violence, une sédition ou toutes autres actions qui justifient habituellement ce motif d’inculpation.
Non, Salim Yezza a tout simplement agi en citoyen démocrate et humaniste que nous sommes tous lorsque nous dénonçons les injustices et les crimes perpétrés par un régime militaire, ce qui est quotidien depuis 1962. L’origine précise de son inculpation fut ses écrits sur sa page Facebook appelant à une solidarité avec les les militants de Gherdaȉa lors des événements du M’zab.
Il n’a pas assassiné, il n’a pas appelé au meurtre, il n’a pas organisé une milice ni intenté à quel que droit que ce soit. Il s’est tout simplement ému des droits de l’homme, a rédigé des mots qui exprimaient son indignation, en toute sincérité et avec son droit d’expression le plus légitime.
Mais alors, depuis 1991 que je fustige ce régime militaire, avec des mots et des accusations bien aussi forts, notamment lorsqu’il s’agit des droit identitaires, je risque quoi avec ces juges d’un autre temps, la peine de mort ?
Salim Yezza a été arrêté car il s’est rendu en Algérie pour un événement douloureux et privé. Il est revenu sur sa terre, celle que personne ne peut lui enlever quelle que soit sa résidence en France et son parcours personnel.
Il se trouve encore des juges en Algérie qui se compromettent à une barbarie pareille. Car, arrêter un homme, le juger et, peut-être, l’incarcérer pour ses opinions, j’ai beau chercher, je ne trouve pas d’autre qualificatif que celui de barbarie.
Ce jeune homme est militant de la plus belle des causes. Je ne le connais pas et ne sais même pas si ses opinions convergent toutes vers la même direction que les miennes. Mais le simple fait de s’exprimer pour les droits des êtres humains suffit à ma solidarité et à ma détermination à être toujours du même côté que ceux qui font face à ce régime militaire ignoble.
Le procès s’est ouvert la semaine dernière pour « incitation à la haine » et « incitation à attroupement ». Ce jeune homme risque deux ans d’emprisonnement dans les geôles inqualifiables de ces barbares. Deux ans de vie, de liberté et de jouissance des droits bafoués sans scrupules. Cela me révolte.
Selon ses avocats, la publication en question est couverte par la prescription. Mais qu’est-ce le droit au pays de ces tristes individus ? Et quels juges auraient, enfin un jour, l’honneur et le courage de cesser leur honteuse compromission ?
Aucune prescription ne couvre mes articles car dès la première convocation en 1992 chez le juge pour avoir fustigé les généraux, il ne s’est pas passé un seul trimestre sans que je récidive. Pour moi, c’est plus facile car, contrairement au jeune Salim, je n’ai plus aucunement l’intention de rentrer en Algérie dorénavant. Et c’est pour cela qu’il nous est fait un devoir de les traiter de barbares et d’être solidaire avec Salim Yezza.
Arrêter un jeune homme, le juger et l’incarcérer, que voulez-vous que je retourne faire dans ce pays de monstres ? Ce n’est pas le mien.
Le mien est ailleurs, dans les rêves de liberté et d’intelligence, profondément enfouis dans mon for intérieur.
Courage, Salim, ils prendront ta place, un jour ou l’autre !