Aux kiosques de journaux marseillais, une image accroche le regard. En une, la couverture sombre et intrigante du Tome 2 de Lakestone. Ce visuel récurrent, placardé sur les vitrines vitrées des points de presse, a été mon point de départ : qui est cette autrice algérienne devenue phénomène littéraire sans jamais dévoiler son visage ?

Née à Alger en 1999, Sarah Rivens s’est imposée dans le monde de l’édition sous le pseudonyme theblurredgirl. Elle débute en 2019 sur Wattpad, plateforme d’écriture en ligne, et ne tarde pas à fédérer une immense communauté de lecteurs grâce à sa trilogie Captive, œuvre emblématique de la dark romance. À travers une écriture viscérale, elle raconte les relations les plus sombres, mêlant obsession, amour brutal et désirs interdits.

Très vite, ses textes embrasent les réseaux sociaux, notamment TikTok, où le hashtag #captivewattpad attire des millions de lectrices. En quelques mois, Captive devient plus qu’un roman : un phénomène générationnel. La maison d’édition Hachette, flairant le succès, publie l’autrice tout en respectant son anonymat. En avril 2023, la trilogie s’était déjà écoulée à plus de 350 000 exemplaires papier, 50 000 en numérique, et continue de se vendre à plus de 5 000 exemplaires par semaine.

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Mais ce succès est aussi traversé de critiques : certains dénoncent la pauvreté littéraire du texte, d’autres s’inquiètent de la glorification des relations toxiques. L’écrivaine Camille Emmanuelle n’hésite pas à parler d’une « culture du viol » présente dans la dark romance. Le lectorat, souvent très jeune, soulève aussi des questions de responsabilité éditoriale.

Rien ne semble pourtant freiner l’ascension de Sarah Rivens. En janvier 2024, elle publie Lakestone, une nouvelle duologie toujours aussi sombre, haletante, portée par une campagne originale. Le tome 1 grimpe immédiatement en tête des ventes, devançant même Avec les fées de Sylvain Tesson. Le tome 2, sorti en avril 2025, consolide son règne.

Discrète, entre Alger et Paris, Sarah Rivens continue de tisser son œuvre dans l’ombre. Elle refuse les plateaux, fuit les photos, cultive une absence devenue sa signature. Une voix floue, mais obsédante.

Sarah Rivens ne se contente pas d’écrire : elle tisse une toile dont personne ne ressort intact. Dans son univers où amour et obsession se confondent, chaque page est une promesse d’ombre, chaque mot une invitation à se perdre — ou à se retrouver dans le chaos. Et derrière cette voix floue, une vérité brûlante : celle d’une génération qui refuse la lumière douce pour mieux embrasser ses ténèbres.

Djamal Guettala  

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