Ce risque en amont pétrolier est triple. Il est d’abord sécuritaire étant donné que l’évacuation des mercenaires et des forces étrangères n’étant pas encore totale même après les élections. Il est aussi géologique dans des gisements à risque à faible potentiel à déligner et préciser non encore développables immédiatement.
Enfin, un risque d’envergure de l’associer à ce partenariat dont les responsables viennent de tourner le dos à l’Algérie en se tournant vers le Maroc, sachant pertinemment les causes de sa détérioration de sa relation avec l’Algérie.
En effet, depuis le début de ce qu’on peut appeler la crise libyenne, les responsables politiques avec à leur tête le chef de l’Etat n’ont cessé de tendre la main à ce pays pour l’accompagner dans les différentes étapes d’un règlement politique et d’édification d’un Etat stable loin de cette guerre des clans.
Rappelons aussi que quelques jours après la visite du ministre des Affaires étrangères libyenne au Maroc pour sceller un accord en ce sens le 27 juin 2021, le chefs de l’Etat, Abdelmadjid Tebboune déclarait le 8 juin 2021 que l’Algérie était prête à « intervenir d’une manière ou une autre » en Libye voisine pour stopper l’avancée des forces du maréchal Khalifa Haftar, lors de leur offensive lancée sur la capitale Tripoli depuis 2019.
Pour le chef de l’Etat, la Libye « est une ligne rouge ». Sur le plan économique, Sonelgaz a pu percer en Libye en intervenant dans son domaine pour leur rétablir le réseau électrique. Cette intervention qui avait agréé les deux parties au point où le mastodonte algérien d’électricité et de gaz réussit à sceller un contrat de partenariat pour livrer à nos voisins libyens des turbines électriques. Il se trouve que des sources anonymes proches du dossier ont révélé que ce contrat a été mal négocié « du côté « algérien », et par voie de conséquence, a compromis son exécution pour être tout simplement annulé.
Des mauvaises langues sont allées jusqu’à le lier au limogeage de Chaher Boulakhras ex Président directeur général du groupe Sonelgaz, pourtant apprécié par le président de la république qui l’a nommé au conseil scientifique national.
Pour Sonatrach, il s’agit d’une incohérence du financement de ses investissements
Lorsque les capitaux sont limités en quantité face à une crise mondiale due à la pandémie de la Covid-19, l’agencement par priorité des projets capitalistiques reste de mise aussi bien pour Sonatrach que ses pairs dans le monde.
Ainsi, dans un entretien qu’il a accordé à la nouvelle chaine algérienne internationale AL24 le Président-directeur général (PDG) de Sonatrach a révélé que son groupe « œuvre avec ses partenaires libyens pour réunir les conditions favorable d’un retour dans ce pays » Il prévoit ce retour au plus tard foin février 2022.
Il a déclaré aussi que l’assemblée générale tenue le 30 décembre 2022, a validé le plan de développement moyen terme (PMT) du groupe Sonatrach 2022-2026 pour un montant global à investir de 40 milliards de dollars à raison d’une moyenne de 8 milliards de dollars par année.
Contrat Sonatrach/ENI : dans la continuité de la ligne Ould Kaddour
Pour le PDG, il en fait de ce retour une priorité voire une urgence parce que Sonatrach « a déjà engagé d’importants investissements dans la prospection et la recherche du pétrole et du gaz de ces gisements » faisant allusion au fameux projet de 2009. Or, l’incohérence réside dans les priorités du groupe face à une pénurie de disponibilité de capitaux. Ensuite la politique du gouvernement Aimen Benabderrahmane a promis de ne plus faire des ponctions sur le bénéfice de Sonatrach sous entendu par là pour qu’elle puisse se débrouiller du financement de ce qu’elle projette.
Il se trouve justement qu’à partir de l’année 2022, Sonatrach devra payer ses charges, ses dettes bancaires d’exploitation et mettre de côté 8 milliards pour financer ces projets. Est-ce possible ? Difficile à dire par manque de visibilité sur les prix du baril avec l’évolution de la pandémie dans le monde.
En supposant que les prix se maintiennent autour de 70 dollars, les 8 milliards doivent être répartis pour les projets de toutes les entreprises du groupe et toute la chaîne pétrolière et gazière de Sonatrach mère.
Il est donc peu probable que ce montant soit suffisant donc il faudrait prioriser les projets. Le ministre de l’Energie Mohamed Arkab avait annoncé que 150 gisements sont prêts à préciser et à développer en Algérie mais attendent les apports des investisseurs étrangers. Donc on peut s’interroger sur la nécessité d’aller investir dans des gisements à haut risque en Libye et de continuer d’attendre les investisseurs qui ne se manifestent pas dans des gisements à majorités sans risque.
Le contrat ENI/Sonatrach sur le champ de Berkine Sud est un exemple de projet non risqué par excellence que Sonatrach aurait pu prendre seul. Quant aux investissements consentis en Libye depuis 2009, ce sont des actifs régis par des contrats pétroliers, ils resteront dans le portefeuille de Sonatrach et il appartient aux autorités libyennes de créer les conditions sécuritaires favorables aux investisseurs et en aucun cas aux Algériens. A limite, ces actifs sont cessibles à d’autres groupes présents dans ce pays.
Rabah Reghis