Lundi 23 avril 2018
Transition énergétique : que gagnerait l’Algérie à débuter par la sobriété ?
Comme à chaque crise et lorsque les horizons sont bouchés, on essaie de trouver une sortie par la phraséologie et les emblèmes afin de faire perdurer le régime en donnant de l’espoir au peuple. Rappelons nous, lorsque le FMI est venu gérer début des années 90 notre économie en faillite, nous, on ne rééchelonne pas notre dette on la « reprofile » seulement.
Lorsque l’Etat après une réorientation de l’économie nationale début des années 1980, au demeurant, totalement ratée, ne s’est pas désengagé du secteur public, mais cherchait disait-on de l’efficacité. Enfin lorsque récemment on a décidé de faire tourner la planche à billets pour venir à bout d’un Etat excessivement dépensier, pour nous, on est seulement dans le non-conventionnel.
Maintenant que le problème s’est compliqué aussi bien sur le court, moyen que le long terme par non seulement la baisse des prix du baril, mais aussi celui de la production des hydrocarbures et la croissance effrénée de la consommation interne de l’énergie, le long processus de la transition énergétique semble utilisé à tout bout de champ comme la solution idéale pour remplacer la rente pétrolière et pourquoi pas justement préserver les réserves des hydrocarbures en place, le temps de procéder à une réelle diversification de l’économie nationale.
Le Forum des chefs d’entreprises (FCE) veut mobiliser l’entreprise au service de l’économie nationale et voilà maintenant que Sonatrach s’y met dans sa 11éme édition des Journées scientifiques et techniques (JST) qui s’est tenu ce mois-ci à Oran.
Seulement tout porte à croire que la problématique de la transition énergétique semble selon toute vraisemblance mal posée parce qu’elle se présente chez nous comme un sujet bateau. On parle du solaire, du nucléaire en laissant de côté ce qui est possible et à notre portée.
C’est pour cela que personne n’y croit et à ce jour, rien de concret n’est entrepris dans ce domaine en Algérie par rapport à ses voisins immédiats. Que renferme ce processus ? Quel est cet effort fait par nos voisins ? Par quoi l’Algérie devra commencer d’abord ?
1- Circonscription du concept de la transition énergétique
Comprendre la transition énergétique comme le passage des énergies fossiles au bouquet de renouvelables c’est aller vers les deux extrêmes et aucun pays n’y arrive actuellement. C’est pour cela que les experts recommandent sa mise en œuvre progressivement et par étapes en fonction de la situation particulières de chaque pays. Pour Denis Simoneau, qui a longtemps travaillé chez les groupes Engie et l’Oréal, il circonscrit la transition énergétique par ce qu’il appelle «4 D» d’abord Digitaliser le système parce que les technologies de l’information sont très présentes dans le monde énergétique d’aujourd’hui qu’elles transforment profondément. Et si un pays est en retard dans ce domaine, le processus n’aboutira pas. Ensuite, la décentralisation, ne pas continuer à voir grand, un système dominé par des grandes structures (centrales thermiques de grande capacité, EPR de 1650 MW) à des unités de production qui sont beaucoup plus petites (comme le panneau photovoltaïque placé sur le toit d’une maison, en deçà du kWh); touchant tous les marchés, la décentralisation révolutionne le monde de l’énergie. C’est l’une des réussites de l’Allemagne fédérale.
La troisième phase dite de décarbonisation c’est-à-dire la réduction des émissions de gaz à effet de serre n’est certainement pas l’apanage d’un pays mais implique le monde entier dans un cadre organisé comme les différentes COP’S entre autres. Reste le plus important et par lequel devront commencer les pays à forte consommation interne comme l’Algérie, réduire la demande : c’est l’efficacité énergétique. L’auteur observe en Europe, depuis 2008, une décorrélation très nette entre le taux de croissance économique et le taux de consommation, qui s’est amorcée avec la crise économique mais qui se prolonge avec le souci de lutter contre le réchauffement climatique. C’est un premier pas mais pas suffisant.
2- Les pays voisins y pensent bien
Chaque pays de la rive méditerranéenne a fait un programme en fonction de ses moyens et de ses capacités. Le Maroc n’est pas un pays pétrolier et donc fortement dépendant des importations a préféré et n’a pas perdu de temps à investir dans le solaire. Il a défini un plan solaire extrêmement ambitieux, avec un objectif d’énergie renouvelable de plus de 50 % en 2030, et il y travaille très activement. En collaboration avec ENGIE, il a construit la plus grande centrale éolienne d’Afrique (avec 300 MW) à Tarfaya. Il s’est engagé aussi dans d’autres projets solaires ou hydroélectriques. La Tunisie a montré beaucoup de dynamisme en lançant la première phase d’un programme de production d’énergies renouvelables qui vise à développer plus de 1 000 MW d’énergies renouvelables sur la période 2017-2020. C’est aussi un projet sur lequel ses partenaires restent attentifs et assurés de sa concrétisation. Le Liban et la Jordanie se lancent dans des programmes d’énergie renouvelable, notamment solaire et éolienne. Le Liban le fait dans des conditions difficiles, compte tenu de sa proximité avec la Syrie, mais avec une maturité suffisante pour lancer des projets avec le soutien de plusieurs bailleurs qui semblent disposés à y être
L’Égypte affiche un objectif de 20 % de production d’électricité renouvelable d’ici 2020, et Engie est impliqué dans des projets, notamment d’éolien et de solaire dans la vallée du Nil ou au bord du Canal de Suez. Et, ceci, ne sont qu’un petit exemple.
3- L’Algérie voit grand pour en définitive ne rien entreprendre
Elle vient de s’engager dans un programme de 4 000 MW de solaire ; un appel d’offres est approuvé mais de nombreux experts pensent qu’il ne sera jamais réalisé. Ils recommandent de revenir aujourd’hui en poste et de penser à lancer des projets de taille modeste, en moyenne de 500MW. Une centrale nucléaire dans les 10 années à venir reviendrait très chère et sa réalisation peu probable. Par contre, la notion d’efficacité a toujours joué un rôle dans l’évolution de l’être humain. Elle est considérée comme une façon parmi tant d’autres de guider le comportement. Il en est de même pour l’idée de suffisance, dans le sens de la propriété de ce qui est suffisant. C’est une idée rationnelle et intuitive car pour toute consommation, il peut y voir assez ou trop. Tout est question d’équilibre pour s’adapter avec moins et ne pas gaspiller lorsqu’il en a trop.
Nous présenter aujourd’hui le gaz de schiste comme une solution sur les dix années à venir et que sur les 200 000 milliards de m3 en place, on peut récupérer 20 000 de m3 milliards. Pour doubler le niveau actuel de production du gaz qui est de l’ordre de 85 milliards de m3 il faudrait pouvoir forer un peu plus de 2600 puits par an. Seront-ils rentables avec la dégringolade du prix du million de BTU. Quand même ces grands projets annoncés pour la galerie se réaliseraient leur contribution ne dépasse guère les 20% de gain. Ce qui est quantitativement insuffisant.
Donc consommer moins par une sobriété énergétique et augmenter les réserves par un renforcement des investissements dans le conventionnel est la seule solution dans ces échéances à la portée de ma main