Le mercredi 19 novembre 2025, les jeunes médecins tunisiens ont lancé une grève nationale d’une journée, accompagnée d’un rassemblement devant le Parlement, sous le slogan « Nous sommes excédés ». Cette mobilisation touche toutes les facultés de médecine et institutions de santé, à l’exception des services d’urgence, qui continuent à fonctionner pour garantir les soins essentiels.
Cette action fait suite à plusieurs mois de promesses non tenues par le ministère de la Santé, malgré un accord signé le 3 juillet 2025. Les jeunes médecins dénoncent le retard dans le versement des indemnités de continuité, le non-respect des engagements concernant le logement pour certaines catégories d’internes et résidents, le report de la revalorisation salariale et l’absence de couverture sociale complète. L’Organisation tunisienne des médecins jeunes qualifie ces manquements de « renversement flagrant d’un accord national », soulignant l’incapacité du ministère à honorer ses engagements.

Le président de l’organisation, Wajih Dhakar, rappelle que ces médecins ne sont pas des militants de la grève, mais que le non-respect des engagements ministériels les a contraints à passer de l’hôpital à la rue. « Nombre d’entre eux travaillent encore sans rémunération, tandis que d’autres attendent des paiements datant de plus d’un an », souligne-t-il. Le vice-président, Bahaeddine Rabii, insiste sur le fait que la formation médicale en Tunisie vise à servir la santé publique, et non à pousser les jeunes médecins à l’émigration forcée. Chaque année, près de 1 600 médecins quittent le pays, sur environ 1 900 diplômés, un signe alarmant des difficultés du secteur public.
L’accord de juillet 2025 visait à régulariser les conditions de service, notamment en établissant un système d’évaluation des stages et de continuité, en augmentant la prime de service civil à 2 000 dinars, et en garantissant la couverture sociale. Mais plusieurs mesures n’ont pas été mises en œuvre : les textes officiels concernant le logement fonctionnel, la revalorisation salariale et les indemnités sont restés en suspens, aggravant la frustration des jeunes médecins.
Depuis avril 2025, l’Organisation a mené une série d’actions de protestation : grèves, marches et rassemblements pour faire valoir ses droits et améliorer les conditions de travail. Le mouvement du 19 novembre représente une nouvelle escalade, dénonçant la lenteur et la négligence du ministère. La participation citoyenne est jugée essentielle par les médecins pour faire pression et exiger l’exécution complète de l’accord.
En toile de fond, cette mobilisation souligne les difficultés structurelles du système de santé publique en Tunisie, marqué par le sous-financement, la bureaucratie et la perte de confiance des professionnels. Les jeunes médecins réclament une reconnaissance réelle de leurs efforts et une réorganisation urgente des services, afin de garantir la continuité des soins et la stabilité du secteur médical national.
Le message est clair : « Nous sommes excédés », et cette exaspération pourrait se transformer en mobilisation encore plus forte tant que les promesses resteront lettre morte.
Mourad Benyahia

