Le Conseil de l’Ordre national des avocats de Tunisie a publié, le samedi 29 novembre 2025, un communiqué dénonçant la sévérité des peines prononcées dans le cadre de l’affaire criminelle en appel n°44250, connue sous le nom de « l’affaire du complot ».
Les jugements rendus par la Cour d’appel de Tunis lors de la séance du 27 novembre ont infligé des peines allant de dix à quarante-cinq ans de prison pour les détenus, et de cinq à trente-cinq ans pour les prévenus en liberté, avec des sanctions financières et la confiscation de leurs biens. Le Conseil des avocats estime ces peines « excessives et inacceptables ».
Dans son communiqué, l’Ordre souligne que ces décisions ont été prises malgré l’insistance de la défense et du Conseil pour garantir les droits des accusés. Les avocats avaient notamment contesté la tenue de la procédure à distance, non conforme à la loi et refusée par les prévenus, et avaient demandé que les détenus puissent être présents physiquement pour contester les preuves et présenter leur défense. Selon l’Ordre, les accusés n’ont pas eu accès à l’ensemble des pièces du dossier, et les procédures préalables au jugement se sont déroulées sans interrogatoires, sans débats et sans audience, empêchant les accusés d’exercer leur droit à être entendus.
Le Conseil des avocats a également dénoncé le rejet injustifié de demandes de récusation formulées contre certains membres de la juridiction, et a affirmé que la Cour avait persisté dans sa décision sans examiner les arguments de la défense. L’Ordre estime que ce processus constitue une violation flagrante du droit tunisien et du droit à un procès équitable, imputant la responsabilité de la situation à l’administration de la justice, qui a refusé de compléter la composition du Conseil supérieur provisoire de la magistrature.
Le communiqué réaffirme le soutien total aux avocats et aux autres prévenus pour avoir exercé leur droit à la différence politique, et appelle les autorités à mettre fin à ces procédures et à libérer les détenus. L’Ordre insiste sur le fait que le rôle d’un pouvoir judiciaire indépendant est de garantir l’application de la loi dans le respect de l’équité et de l’égalité, et non de régler des différends politiques.
Ces condamnations ont provoqué une large indignation dans les milieux politiques et de la société civile. La coalition d’opposition Jabhat al-Khalas (Front du salut national) a dénoncé le jugement comme injuste et entaché d’une farce judiciaire, affirmant que le véritable complot révélé par l’affaire est celui de l’autorité sur l’opposition politique. Selon la coalition, ce sont les manipulations du pouvoir judiciaire, et non l’action des opposants ou des associations civiles, qui portent atteinte à la réputation de la Tunisie.
Par ailleurs, certains observateurs notent que des peines ont été confirmées ou alourdies pour les prévenus en fuite, tandis que des mesures financières et la confiscation de leurs avoirs ont été appliquées. Ces décisions interviennent dans un contexte de tension politique et de contestation de l’indépendance judiciaire, renforçant le débat sur l’état du droit et de la démocratie en Tunisie.
Le Conseil des avocats conclut son communiqué en affirmant sa volonté de continuer à défendre les droits et libertés fondamentales de tous les Tunisiens, en collaboration avec la société civile, en insistant sur la nécessité de garantir le droit à un procès équitable et à une défense pleine et entière.
Mourad Benyahia

