22 novembre 2024
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Tunisie : scrutin législatif verrouillé par Kaïs Saïed

Législatives en Tunisie

C’est dans l’indifférence que ce samedi 17 décembre, près de 9 millions d’électeurs tunisiens sont attendus aux urnes pour le premier tour du scrutin législatif afin d’élire le nouveau Parlement de 161 députés aux pouvoirs très restreints.

Les 1 058 candidats n’ont suscité ni engouement ni débat au sein d’une population plus préoccupée par le coût de la vie. La plupart des formations politiques représentées lors des précédentes mandatures boycottent le scrutin, comme elles se sont opposées à la plupart des initiatives qui ont suivi le coup de force de Kaïs Saïed, le 25 juillet 2021.

C’est le premier scrutin législatif depuis la prise de pouvoir du président Kaïs Saïed le 25 juillet 2021. En véritable autocrate arabe, Kaïs a concentré tous les leviers de décision depuis son arrivée surprise au pouvoir. Le processus politique mené par un président, qui monopolise les pouvoirs, a fait l’objet de critiques au sein de la société civile et des partis d’opposition, qui dénoncent « une mascarade d’élections », selon leurs mots.

La campagne électorale qui s’est achevée le 15 décembre a suscité peu d’engouement au sein d’une population très préoccupée par les problèmes économiques du pays et le quotidien d’une vie de plus en plus chère. Alors que l’Instance électorale a bombardé de messages les électeurs pour les encourager à se rendre aux urnes, les analystes craignent un très faible taux de participation pour ce scrutin.

Vendredi 16 décembre, le silence électoral était de mise en Tunisie, à la veille des législatives, mais « sans bruit électoral, peut-on parler de silence ? », tance un politologue tunisien sur les réseaux sociaux. Une remarque qui décrit bien l’ambiance de ces élections tunisiennes.

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Sept circonscriptions sont sans candidat tandis qu’une dizaine n’en ont qu’un seul, qui sera donc élu d’avance. Les femmes ne représentent pas plus que 12% des candidats. Les profils des postulants à cette nouvelle assemblée vont du chômeur à l’homme d’affaires, en passant par la femme au foyer, l’agriculteur et l’enseignant, une démocratisation de la fonction législative liée au type de scrutin, uninominal à deux tours excluant les partis politiques.

Ce sont aussi les premières élections depuis la révolution où une majorité des partis politiques boycottent ouvertement le scrutin, comme lors du référendum constitutionnel de cet été. La puissante centrale syndicale, l’UGTT, qui ne donne pas d’instructions de vote, mais qui est en désaccord avec le gouvernement sur les réformes économiques, a déclaré que ces élections n’avaient ni goût, ni couleur. Très peu d’observateurs étrangers seront présents pour regarder le scrutin, si ce n’est une délégation russe.

De plus, les députés ont maintenant un pouvoir bien moindre qu’auparavant. Le nouveau Parlement n’est plus sollicité pour donner sa confiance au gouvernement, les députés sont sans immunité parlementaire et peuvent être révoqués sous certaines conditions. Enfin, le Parlement n’a aucun pouvoir de contrôle sur l’action gouvernementale ou celle de la présidence de la République qui lui donne directement les projets de loi à examiner en priorité.

Lors de l’élection présidentielle de 2019, une partie des jeunes électeurs avaient massivement voté pour Kaïs Saïed. L’ancien professeur de droit constitutionnel avait alors séduit la jeunesse avec sa quête de justice sociale dans le pays et son soutien à la révolution tunisienne. Il avait surtout réussi à attirer un électorat qui se mobilisait rarement lors des élections précédentes.

Trois ans après, les jeunes vont-ils suivre le camp du président Kaïs Saïed ? Le taux de chômage des 15-24 ans stagne à 38% et la migration irrégulière vers l’Europe est en constante augmentation. Plus de 16 000 migrants tunisiens sont arrivés en Italie cette année contre 14 342 en 2021.

Et la désaffection des jeunes de la vie politique pourrait se traduire dans le taux de participation du scrutin de ce samedi. Seulement 14% des candidats aux législatives ont entre 23 et 35 ans et 31,6% entre 35 et 45 ans, soit moins de la moitié des candidats. « Les partis politiques ne sont pas arrivés, jusqu’à présent, à leur proposer quelque chose de nouveau et comme ils n’arrivent pas à se renouveler, ils n’arrivent pas à renouveler leurs idées », explique le sociologue Mohamed Jouili.

Aujourd’hui, le désintérêt pour la politique semble avoir pris le dessus au sein des jeunes électeurs, selon Mohamed Jouili : « Le discours présidentiel n’est pas un discours de jeunes, donc il n’arrive pas à les attirer, à les convaincre avec sa manière de s’exprimer, et aussi avec ses idées ».

Selon une étude de l’association Lam Echaml, qui œuvre pour la promotion de la citoyenneté, 44% des jeunes électeurs disent qu’ils iront voter ce samedi, tandis que 38% restent encore indécis.

L.M/RFI

 

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