Rachid Hamdad, notre compagnon de lutte et notre ami, a laissé un vide immense, un silence douloureux.
Évoquer sa mémoire aujourd’hui, c’est se confronter à une vague d’émotions, une tristesse profonde et insondable. Son départ a emporté avec lui une partie de nous, de nos rêves et de nos aspirations. Mais au-delà de ce chagrin inconsolable, nous avons le devoir de raviver, dans nos cœurs, l’énergie vibrante de la vie qu’il chérissait tant.
Bien plus qu’un simple camarade, Rachid Hamdad était une lumière dans nos vies. Sa présence rayonnait d’humanité, de courage et de justesse. Il incarnait la fidélité dans l’amitié, la rigueur dans le combat et la modestie dans la grandeur. Toujours fidèle à ses convictions, Rachid restait profondément attaché à sa culture et à son identité amazighe. Sa passion pour les causes qu’il défendait ne connaissait ni relâchement ni compromis.
Rachid brillait par ses multiples facettes : militant, journaliste, écrivain, humaniste. Sa plume, trempée dans l’encre des vérités et des luttes, dénonçait les injustices et témoignait des souffrances d’un peuple. Il ne se contentait pas d’observer ; il agissait, il interpellait, avec une précision intellectuelle qui forçait le respect. Ceux qui l’ont côtoyé se souviennent de son calme, de sa clairvoyance et de son sens infaillible de la justice. Rachid était une force tranquille, un roc inébranlable dont la douceur et l’affabilité charmaient tous ceux qui croisaient sa route.
Né à Boudjelil, il portait en lui l’âme de sa région et la revendiquait avec fierté. Sa passion pour la culture et la langue amazighe transparaissait dans ses écrits et dans ses engagements quotidiens.
Scientifique de formation, il abordait chaque sujet, chaque lutte, avec une rigueur intellectuelle et un esprit critique exceptionnels. Ceux qui l’ont connu se souviennent d’un homme jovial, serviable et modeste, dont la simplicité reflétait une grandeur d’âme rare.
En tant que journaliste, Rachid Hamdad a marqué les esprits et les consciences. Ses articles, empreints de lucidité et de courage, dénonçaient les dérives, les injustices et les douleurs qui frappaient son pays. Il travaillait sans relâche pour un monde meilleur, utilisant sa plume comme une arme pacifique pour éveiller les consciences et défier les oppresseurs.
Son roman posthume, « La mort de Hamama », reste un témoignage bouleversant de la société algérienne des années 1990, un cri d’alarme contre l’instabilité politique et les drames humains. À travers ce récit, il exprimait la douleur des rêves brisés.
Rachid nous a quittés trop tôt, à l’âge de 39 ans, alors qu’il était en plein élan, prêt à réaliser encore tant de choses. Sa disparition tragique, survenue le 20 septembre 2001, a laissé une onde de choc dont nous peinons à nous remettre.
Il était un journaliste dynamique, un militant infatigable et un homme d’une générosité sans égale. Ses amis, ses collègues, sa famille, et tous ceux qui ont eu le privilège de le connaître gardent en mémoire son engagement, son rire communicatif et sa profonde humanité.
Son absence se fait ressentir chaque jour. Pourtant, son esprit demeure parmi nous, à travers ses écrits, ses combats et les souvenirs qu’il nous a laissés. Rachid Hamdad restera pour toujours dans la mémoire collective, comme un exemple d’engagement, de courage et de fidélité à ses idéaux.
Au-delà de son talent de journaliste et de romancier, Rachid Hamdad était également un auteur de théâtre. Sa pièce « Rif Bwasif » (sur la rive du fleuve), montée par la troupe estudiantine Tizizwa (les abeilles), témoigne de son regard aigu sur la condition humaine. À travers cette œuvre théâtrale, il explorait les méandres de la servitude humaine, dénonçant les chaînes invisibles qui asservissent les individus et les peuples. Son théâtre, tout comme ses articles et son roman, portait un message puissant, une interrogation sur l’existence, la liberté, et la quête d’un monde plus juste.
Dans « Rif Bwasif », il donnait vie à des personnages complexes, tiraillés entre leurs désirs et leurs réalités, symbolisant les luttes et les espoirs de tout un peuple. Cette pièce reflétait sa volonté inébranlable de lutter contre l’oppression sous toutes ses formes, témoignant de sa profonde sensibilité face aux injustices sociales.
Par cette création artistique, il nous offrait une nouvelle facette de son engagement, celle d’un dramaturge capable d’exprimer la douleur, l’espoir et la résistance. Son théâtre, tout comme ses écrits journalistiques, demeure un phare éclairant les zones d’ombre de l’humanité, un appel à la réflexion et à l’action.
Rachid Hamdad fut également un enseignant au lycée, où il s’est révélé être un véritable éducateur d’exception. Ses élèves, captivés par son charisme et sa passion pour la transmission du savoir, lui vouaient une grande affection. Rachid n’était pas seulement un enseignant, mais aussi un mentor, qui savait éveiller l’esprit critique de ses élèves et les encourager à penser par eux-mêmes.
Grâce à sa pédagogie bienveillante et à son sens de l’écoute, il laissait une impression durable sur chacun d’eux.
Rachid était également un lecteur insatiable, curieux de tous les styles littéraires. Il dévorait les ouvrages sans jamais se lasser, toujours en quête de nouvelles idées et de perspectives inédites. Sa soif de connaissance ne se limitait pas aux livres, il s’intéressait aussi profondément à l’art sous toutes ses formes.
La peinture, la sculpture, et toutes les expressions de la création artistique éveillaient en lui une admiration sincère. Avide de créativité, Rachid voyait dans l’art une force capable de transcender les barrières et de dévoiler la beauté et la complexité de l’âme humaine. Il aimait partager cette passion avec ses proches et a initié de nombreux amis et camarades à cet univers artistique et littéraire qu’il chérissait tant. Pour Rachid, la transmission de cet amour pour la culture et l’art était une forme de résistance, un moyen de créer des liens et d’élargir les horizons de ceux qui l’entouraient.
Rachid Hamdad était un militant marxiste, sans jamais s’enfermer dans un quelconque dogmatisme. Pour lui, le marxisme était un outil rationnel pour analyser et comprendre les réalités sociales et politiques. Son militantisme éclairé avait pris racine au sein de la gauche marxiste du Mouvement culturel berbère (MCB).
Au milieu des années 1980, il rejoignit le Parti de l’Avant-Garde Socialiste d’Algérie (PAGS). Entre 1991 et 1993, Rachid occupa la fonction de premier secrétaire de la Fédération de Tizi-Ouzou. Cette période fut particulièrement tumultueuse, marquée par des tensions internes au sein du collectif militant.
Fervent défenseur de la double rupture pour hâter l’avènement d’une Algérie moderne, Rachid s’acquittait de sa tâche avec fermeté, sans jamais brimer ni blesser ceux qui s’opposaient à ses idées.
Doté d’un sens inné de la justice et du dialogue, il savait gérer les conflits et créer des espaces de débat respectueux, témoignant de son humanisme et de sa volonté de bâtir un monde où les différences pouvaient s’exprimer librement.
Les témoignages qui composent cet hommage dévoilent un Rachid Hamdad aux multiples facettes. Journaliste, écrivain, militant, enseignant, dramaturge… à chaque rôle, il incarnait une richesse d’esprit et une profondeur de cœur.
Mais au-delà de ces apparences, Rachid était fondamentalement et authentiquement un. Toutes ces facettes convergeaient en une personnalité entière, fidèle à ses convictions et à son humanité.
Un jour, lorsque l’idéal qui l’animait deviendra réalité, le nom de Rachid Hamdad trônera fièrement sur une institution, un lycée, une bibliothèque, peut-être un théâtre ? Ce jour viendra, car parmi notre peuple, les graines de « Rachid » sont là, semées dans les esprits et les cœurs de ceux qu’il a touchés.
Son engagement, son humanité et son combat pour la justice et la liberté ont semé des germes qui continueront à croître. Son nom deviendra un symbole, un phare guidant les générations futures sur le chemin de la connaissance, de la culture et de l’émancipation.
Rachid, tu nous manques. Ton rire, ta sagesse et ton combat continuent de résonner en nous. Nous nous efforcerons de poursuivre ton œuvre, de porter haut les valeurs que tu défendais. Ta mémoire restera gravée dans nos cœurs, comme l’écho d’une vie intense et lumineuse.
Repose en paix, ami, compagnon de route, camarade, toi qui as su transformer la vie en un combat pour la justice et la dignité humaine. Que ton souvenir guide nos pas et que ton héritage continue d’inspirer ceux qui luttent, dans l’ombre ou la lumière, pour un monde plus juste.
Tes camarades, Mokrane Gacem, Tahar Khouas, Moussa Aït Ihaddaden et Mohand Bakir.