Bruno Retailleau
Bruno Retailleau, ministre de l'Intérieur.

Dans un entretien au journal Le Parisien publié ce samedi 15 mars, le ministre de l’Intérieur français Bruno Retailleau menace de quitter le gouvernement si Paris renonce à un rapport de force avec l’Algérie pour qu’elle accepte d’accueillir ses ressortissants en situation irrégulière en France.

Le très droitier Bruno Retailleau menace Emmanuel Macron. Il entend jouer sa carrière de ministre de l’Intérieur contre une faiblesse des autorités françaises dans leur crise avec l’Algérie.

Le refus de l’Algérie d’accepter ses ressortissants sous le coup d’une obligation de quitter le territoire français, dont l’auteur d’un attentat qui a fait un mort à Mulhouse le 22 février, a fini d’envenimer des relations déjà très dégradées entre les deux pays depuis la reconnaissance en juillet par le président Emmanuel Macron de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental.

« Tant que j’ai la conviction d’être utile et que les moyens me sont donnés, je serai mobilisé », fait valoir le ministre de l’Intérieur dans une interview au Parisien diffusée en ligne samedi 15 mars. « Mais », prévient-il, « si on me demandait de céder sur ce sujet majeur pour la sécurité des Français, évidemment que je le refuserais ». « Je ne suis pas là pour une place, mais pour remplir une mission, celle de protéger les Français », ajoute le ministre.

Bruno Retailleau, qui multiplie les déclarations virulentes contre Alger, notamment depuis l’incarcération mi-novembre de l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal, était interrogé sur le dossier algérien et « la riposte graduée » qu’il appelle de ses vœux si Alger n’acceptait pas de reprendre ses ressortissants en situation irrégulière en France.

« Je serai intransigeant et j’attends que cette riposte graduée soit appliquée »

Vendredi 14 mars, le gouvernement français a établi une première liste d’une soixantaine de ressortissants algériens qu’il souhaite expulser. « Au bout de la riposte, il y aura une remise en cause des accords de 1968 », affirme le ministre. « Je serai intransigeant et j’attends que cette riposte graduée soit appliquée. »

L’accord de 1968 donne un statut particulier aux Algériens en France, l’ancienne puissance coloniale, en matière de circulation, de séjour et d’emploi. Fin février, le Premier ministre François Bayrou a menacé de dénoncer cet accord si, dans un délai de six semaines, l’Algérie ne reprenait pas ses ressortissants en situation irrégulière. De son côté, Emmanuel Macron a joué la carte de l’apaisement en se disant « favorable, non pas à dénoncer, mais à renégocier » cet accord.

Début février, le chef de l’Etat algérien Abdelmadjid Tebboune avait dénoncé le « climat délétère » entre l’Algérie et la France, jugeant que les deux pays devaient reprendre le dialogue et avait appelé Emmanuel Macron à « faire entendre sa voix » en ce sens.

Dans cette affaire, tout le monde semble avoir oublié que la véritable raison de la crise diplomatique remonte à la reconnaissance par Emmanuel Macron du plan marocain pour le Sahara occidental. Tout le reste qu’une succession de malentendus nourris par l’extrême droite en France et une frange de nationalistes arabo-islamistes en Algérie. L’Espagne connut la même crise avec l’Algérie suite à son soutien au plan marocain pour le Sahara. Après le rappel de l’ambassadeur algérien et le gel des échanges économiques, l’Algérie finit, au bout de quelques mois, par revenir à de meilleurs sentiments sans que Madrid ne change de position. Ce qui n’est pas le cas avec la France dont le passé colonial est convoqué par Alger au moindre soubresaut. Wait and see.

Sofiane Ayache

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