Samedi 22 août 2020
République algérienne (démocratique et populaire)
C’est le nom qu’ont choisi et retenu les différents pouvoirs qui se sont succédé, depuis l’indépendance (1). Comment ce nom a émergé et s’est imposé ensuite jusqu’au jour d’aujourd’hui ?
Il faut sans doute se référer à notre histoire récente et au contexte international qui y régnait ! En effet, le concept de « démocratie populaire » se confrontait à celui des « démocraties occidentales », dans le sens où il indiquait la source populaire dans laquelle s’abreuvait la « démocratie populaire » et la bourgeoisie régnante dans laquelle le second puisait ses sources, avec en toile de fond, le capitalisme d’un côté et le socialisme de l’autre.
Or, le caractère socialiste s’est imposé, depuis l’indépendance, comme le référent idéologique à tous, tous courants politiques confondus, à l’exception des « courants islamistes » (2) dont l’adhésion à la révolution de Novembre n’a été que très tardive, ce qui va considérablement l’amoindrir après l’indépendance ! Le bloc dit de l’Est va donc consacrer le concept de « démocratie populaire », suivi en cela par certains pays africains dont le Congo et asiatiques dont la Chine, le Viêt-Nam, la Corée du Nord… de manière à construire un mur idéologique au sein du concept de démocratie.
Même si le modèle « socialiste » algérien a vécu, si tant est qu’il ait existé un jour, durant les années 60 et 1970 (3), on peut dire que la constitution de 1989, va définitivement enterrer le modèle socialiste pour consacrer le libéralisme avec l’entrée en force du secteur privé dans tous les domaines de la vie économique et sociale du pays y compris dans les institutions politiques et administratives, sans jamais se préoccuper du nom du pays, maintenant ainsi son nom originel de république algérienne démocratique et populaire !
Faut-il encore conserver cette appellation ? Beaucoup pensent que si notre pays était réellement « démocratique et populaire », il n’avait pas besoin de l’inscrire sur tous les symboles de l’état et dans le cas contraire, il gagnerait à l’éliminer afin de ne pas se retrouver en contradiction entre ses vœux pieux, la réalité et la pratique quotidienne… Le nom de « République algérienne » est très suffisant pour dénommer notre pays qui, bien entendu, aspire à la démocratie et au caractère populaire de sa composante la plus large et la plus diversifiée ethnologiquement.
Pourquoi donc inscrire sur le caractère « démocratique et populaire » à la République ? Est-ce un effet de style, une accoutumance coupable, un trait d’union entre le passé, le présent et l’avenir, une sentence péremptoire, un clin d’œil à l’étranger, une thérapie auto persuasive…
Le caractère « démocratique et populaire » de notre pays doit se démontrer et non pas se déclarer, ce qui implique une volonté politique vérifiable sur le terrain, un travail en profondeur, sur le long terme, de tous les jours, de manière à l’ancrer dans la société à doses homéopathiques afin qu’il se banalise et pénètre dans notre ADN sociétale.
Cela nécessite une large adhésion populaire, une mobilisation générale, sans exclusif, une programmation minutieuse, ponctuée de rapports d’étapes et d’évaluation et afin un processus sans cesse perfectible qui plonge ses racines dans nos valeurs partagées et notre génie national, ce processus ne pouvant s’inscrire que dans le très long terme.
Aussi, il serait donc heureux que comme premier acte républicain, de soulager le nom officielle de notre pays de la charge de « démocratique et populaire », dans la nouvelle constitution en débat !
En effet, notre pays, à l’instar d’autres, sera moins ridiculisé, à l’international, puisqu’il rejoindra le plus grand nombre de pays ayant comme nom unique la république et pourra affirmer solennellement que le caractère « démocratique et populaire » est une œuvre de longue halène, en construction permanente.
C’est cette symbolique que nous devons afficher afin de crédibiliser l’action de l’état dans la construction du processus démocratique et dans l’implication de la société, toute entière et sans exclusive, dans tous les actes politiques qui vont en direction de la société.
Il est donc souhaitable que la prochaine constitution consacre le nom de note pays en « République algérienne » pour l’éternité et qu’on nous soulage du caractère « démocratique et populaire » !
M. G.
Notes
(1) Le GPRA, créé en 1957, n’a retenu que la république algérienne pour dénommer l’état algérien naissant.
(2) Djamiate El-Oulamas » avait pendant très longtemps revendiqué « l’intégration » à la mère patrie à égalité des droits et des devoirs comme axe majeure de sa politique. Elle ne se ralliera à la revendication de l’indépendance que fin des années 50. L’avènement du FIS dans les années 80, va se traduire par la revendication d’une « république islamique » (Doula el islamya).
(3) Certains analystes préfèrent parler de capitalisme d’état, en lieu et place de socialisme.