Vendredi 19 juin 2020
Abdou Semmar parle-t-il de Hakkar comme un parrain ou un lampiste ? (II)
Il faut souligner d’emblée que depuis la démission d’Abdelaziz Bouteflika et le limogeage d’Ould Kaddour par Bensalah, le choix du patron de Sonatrach semble être basé principalement sur deux critères : la promotion interne et l’objectif visé pour remédier au déclin de la production par une augmentation des réserves avec un apport partenarial.
C’est en effet une cohérence puisque le trois PDG qui lui ont succédé sont soit de l’amont pétrolier soit fortement convaincus que la nouvelle loi sur les hydrocarbures en est la solution idoine.
Chacun d’eux a fait face à des lobbies dont l’objectif est le maintien d’une instabilité du mastodonte pour l’affaiblir et partant faire de même pour l’Algérie dont l’économie reste fortement dépendante des recettes des hydrocarbures. Cette fois, si l’on se réfère aux indiscrétions ici et là, la déviation de Sonatrach vers le « tout électrique » serait en cours.
Ainsi si l’on croit aussi ce qui se dit de l’extérieur comme de l’intérieur (02), de toutes les candidatures pour le poste de PDG de Sonatrach, les décideurs seraient orientés vers le choix d’un candidat de formation « aérospatiale» de l’université de Boston (03) qui a occupé des postes purement commerciaux pour le compte de la société Baker Hughes, plutôt spécialisée dans la technologie de l’énergie mais plus vers Sonelgaz que Sonatrach.
Le dernier poste qu’il occupe à ce jour serait directeur de l’Afrique du Nord dans cette société industrielle internationale détenue depuis 2017 à 62,5% par General Electric Company. Il faut signaler par ailleurs que cette multinationale américaine et Sonatrach avaient crée en 2017 une joint venture dans laquelle l’américaine détient 49%.
En bref, depuis l’avènement du projet des 4000 MW, d’autres sociétés commencent à faire leur apparition et automatiquement préparent le renforcement de leur lobbying. Si le scenario de cette nomination se réalise, Sonatrach sera probablement déviée de son métier de base pour une perte de temps encore de quelques années. Il faut préciser aussi que sur les 18 PDG qui ont eu la charge de Sonatrach depuis 1963 à ce jour, neuf peuvent encore reprendre du service et créer un déclic pour relancer la production dans l’entreprise. quatre d’entre eux sont en poste et n’ont pas encore atteint l’âge de la retraite.
Il suffit donc d’examiner leurs bilans et prendre le meilleur en toute transparence tout en les protégeant de l’influence lobbyiste. Abdelaziz Bouteflika dés son élection en avril 1999, a écarté Abdelmadjid Attar le 11 janvier 2000 pour rappeler le feu Abdelhak Bouhafs sur la base d’un bilan. Malgré que de l’extérieur comme de l’intérieur, on a considéré cette nomination par copinage (04), personne ne pouvait aller beaucoup plus loin lui car son bilan est effectivement très riche et incontestablement positif et ce président très rusé a réussi de choisir le bon critère pour légitimer sa décision.
I- Comment Hakkar a signé ce suicide managérial à juste titre ?
1- Dés son investiture, Il a brassé large en tenant un discours qu’il exprime dans son « état enfant ». Sinon comment peut-on évoquer l’offshore, une aventure que Sonatrach ne peut entreprendre actuellement de part sa charge envers l’Etat et ses difficultés financières. A-t-il d’abord fait un diagnostic ? On apprend par ouï-dire qu’actuellement, en plus du problème de la production et du renouvellement de réserves, Sonatrach se trouve dans une situation inédite de capacité financière. Le holding des filiales à l’étranger SIHC, instruit par Sonatrach de ramasser tous les dividendes, il n’a pu récolter que quelques 3 à 4 millions de dollars. Sonatrach a besoin actuellement du moindre dollar. Alors que Sonatrach ne cherchait que rarement à faire remonter les dividendes de ces filiales, Les filiales à l’étranger à l’instar de SPC Londres avec des recettes de 70 à 100 millions de dollars par le passé : malheureusement, elle s’endette maintenant pour Augusta, et réalise des recettes à la limite du déficit.
2- L’équipe qu’il a choisie pour l’accompagner dans le redressement de Sonatrach, s’appuyait plus sur le critère de la jeunesse, certainement pour faire plaisir au président mais n’est pas à même de conduire le mastodonte dans les circonstances actuelles d’une crise sanitaire, suivi d’un effondrement des prix du pétrole avec toutes les conséquences qui en découlent dont la perte des parts de marché dans sa zone traditionnelle.
3- L’alerte lancée par le tout nouveau PDG de Sonatrach résumée sur le site du journal électronique TSA est édifiante (05). A peine semble-t-il, a commencé à mettre en place sa feuille de route pour aller à l’essentiel et le plus urgent, il a dû trouver une pile de doléances liées à ce qu’il a identifié et qualifié comme conséquence d’un manque de confiance dans la relation humaine dans le milieu de travail. En précisant toutefois que «la direction générale est régulièrement interpellée par le partenaire social et les travailleurs, au sujet de la qualité des relations interprofessionnelles dans notre milieu de travail, et les effets qui impactent la sérénité et la stabilité du climat social qui y règne » On se rappelle qu’Ould Kaddour dés le premier jour de son installation, il a été surpris en déclarant tout tremblant que « Sonatrach est trop bureaucratique.»
Dans le fond, c’est beaucoup plus compliqué que cela, la dynamique de groupe qui s’est installé à Sonatrach depuis sa restructuration en 1982, serait l’œuvre de pôles qui agissent pour le compte des lobbys dont le but de la contrôler ou éventuellement ancrer leurs ventouses pour y soutirer des avantages surtout depuis la crise de 1985. Sonatrach et Air Algérie seraient les plus visées par les lobbys de recrutement.
Cette situation saute à l’œil du gestionnaire dés son installation car elle l’empêche d’avancer. Cette dynamique se manifeste par les effets secondaires de harcèlement surtout envers l’élément féminin, une circulation continue de lettres anonymes qui créent un état de psychose non favorable à un climat social sain. Cette situation devenu depuis quelques années, un espèce de jeu paradoxal qui tente avec succès d‘ailleurs d’inonder le responsable pour le dévier des vrais problèmes pour lesquels il a été nommé.
4- Enfin pour nous limiter qu’à cela, le vendredi 12 juin dernier il a affirmé à In Amenas que la production de Sonatrach « n’a pas reculé en dépit de la réduction des effectifs » (06) Il est allé loin, pris par cette euphorie que « les plateformes pétrolières et gazières à In Amenas où les mêmes volumes de production sont enregistrés avec 35% seulement de leurs effectifs. » Sachant que la Sonatrach résiduelle souffre d’un sureffectif qu’elle traine depuis sa restructuration organique et financière de 1982, où elle compte un effectif d’un productif pour 3 de soutien ne serait elle pas une offense pour les travailleurs qui tentent de faire de leur mieux. Devraient-ils comprendre par là que 65% de leur effectif ne servent à rien ?
5- Il faut préciser par ailleurs que depuis sa création et son entrée dans le circuit du commerce international, Sonatrach qui agit pour le compte de l’Etat pratique une stratégie commerciale transparente avec ses partenaires et n’a jamais caché ses performances bonnes ou mauvaises sans pour autant tendre sa main à quiconque. Alors comment peut il dire que la production n’a pas reculé alors que tous les rapports dont le dernier celui de la douane disent le contraire ? Pourquoi s’appuie-t-il sur la stratégie de l’entreprise qu’il gère à l’international alors tous les Sipex ont montré leur limite ces dernières années sauf le Pérou qui continue à les soutenir.
En effet, le projet offshore du champ Mahdia mené en 2012 en Tunisie, annoncé en grandes pompes comme une première découverte en offshore, et l’expérience a été une réussite parfaitement prouvée, n’avait produit que du gaz nocif, donc abandonné.
La Maurétanie serait un gouffre financier. Le projet du Niger a livré des réserves marginales tandis qu’en Libye, la situation politique dans ce pays et le chaos qui s’en est suivi, ne permettent plus d’y travailler sereinement. Quant au pays européens, des dires même du premier responsable du secteur, les choses changent et Sonatrach devra réadapter sa stratégie dans ces pays.
Rabah Reghis
Renvois
(02)-https://youtu.be/BGKnCZ_YM4s
(03)- https://www.linkedin.com/in/smail-bouderba-6871364/?originalSubdomain=dz
(05)-https://www.tsa-algerie.com/les-consignes-du-patron-de-sonatrach-a-ses-managers/