Samedi 6 avril 2019
Acte VII : y aurait-il un malentendu dans la compréhension de la transition ?
Si l’on se réfère aux communiqués de l’armée devenue par sa position constitutionnelle un acteur majeur dans la crise que vit l’Algérie, ceux de l’opposition dans sa nouvelle veste et les nombreux constitutionnalistes, tous mettent en garde contre le danger de toute démarche en perspective qui dévie de la constitution, on est amené à comprendre que la transition est « réduite » à un simple passage d’un président déchu à un autre dans un délai ne dépassant pas 90 jours.
Quand bien même, le nouvel élu jouira d’un consensus et que cette opération se fera sans les « 3B », cela risque de ne pas venir à bout de cette crise dont les revendications se précisent d’un vendredi à l’autre.
Tout porte à croire que le cinquième mandat ne serait que la goutte qui a fait déborder le vase et qui a permis aux Algériens de vider un cœur rempli depuis près de six décennies. On est passé donc de « non au cinquième mandat » à « non au prolongement du quatrième» à « Rouhou Gâa» enfin à «Tathasbou gaâ». En effet, dans les dernières banderoles on y lit « Bouteflika n’est pas le système, le système n’a pas duré seulement 20 ans mais 60 ans ».
Plus intéressant et afin de mettre fin aux Fake news, Tizi Ouzou, le cœur de la Kabylie écrit « l’Algérie est une et indivisible. » Il ne s’agit donc plus d’un simple réaménagement de façade d’un Etat mais éminemment et fondamentalement un changement en profondeur que le « Hirak » revendique quelles qu’en soient les conséquences pour en finir une bonne fois pour toutes avec cet ordre établi.
Il est manifeste qu’il n’y a aucune négociation possible lorsqu’on leur dit ouvertement « dégagez tous ». Il s’agit de rester dehors pour créer les conditions favorables pour refonder un système institutionnel dans lequel la puissance publique est soumise au droit. L’environnement de gouvernance contiendrait des normes juridiques hiérarchisées de telle sorte que cette puissance publique s’en trouve balisée. Un tel système assurera une justice « juste et équitable » avec une juridiction indépendante. La souveraineté appartient au peuple, lequel peuple exerce le pouvoir public directement ou par l’intermédiaire de ses représentants qu’il aura à choisir lui-même en toute liberté et transparence.
Dans ce système dont la jeunesse d’aujourd’hui longtemps marginalisée, favorise l’initiative citoyenne pour en faire des citoyens socialement présents, intéressés au corps social, convergents vers les objectifs d’intérêt général, centripètes mais pas nécessairement identiques. Il s’agit là de tout un processus qui prendra du temps et reste unique dans son modèle de manière à n’attendre de l’aide d’aucun pays limitrophe voire africain ou arabe.
La Tunisie par exemple a débattu sa nouvelle constitution pendant plus deux ans pour obtenir un semblant de consensus le 27 janvier 2017 sans pour autant étoffer entièrement les différents aspects des libertés individuelles et l’égalité qui ont fait l’objet d’une Commission Ad hoc dit des Libertés Individuelles et de l’égalité (COLIBE) ».
Cette commission, installée par un président » très peu consensuel » le 13 août 2017, a pris plus d’une année de discussion. Il est donc urgent que les feuilles de route revoient leurs copies pour oublier Bouteflika, les 3 B pour s’inscrire dans une option durable pour au moins un mandat présidentielle afin entre autre de ne pas entraver la démarche économique dont les réformes ne pourront en aucun cas attendre jusqu’à la mise en œuvre de ces changements revendiqués par tous les Algériens.
Les glissements vers un retour en arrière se situent justement à ce niveau et l’Algérie n’en est pas à sa première expérience.