30 décembre 2024
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La gestion des EPE : «Je pose zéro et je retiens tout !»

REGARD

La gestion des EPE : «Je pose zéro et je retiens tout !»

«Il ne faut pas compter sur ceux qui ont créé les problèmes pour les résoudre» Albert Einstein

L’entreprise publique algérienne constitue une réalité omniprésente dans l’expérience de développement et dans l’édification d’une économie se voulant indépendante menée par le pays depuis cinq décennies. Elle se situe au point de rencontre des principaux problèmes du monde contemporain, notamment dans un pays en pleine mutation, qu’il s’agisse du fondement et de l’exercice du pouvoir, de ses réactions face aux pressions internes et/ou aux contraintes extérieures.

Dans toute organisation, il y a des hommes qui exercent un pouvoir et d’autres qui cherchent à influencer, de façon plus ou moins visible et avec plus ou moins de bonheur l’exercice de ce pouvoir. Les décisions les sociétés contemporaines se prennent au sein de trois institutions : l’Etat, l’Armée et les grandes entreprises. Il y a un lien profond entre la manière de concevoir et d’exercer le pouvoir et les diverses formes prises par la propriété.

C’est dire qu’il est impossible de parler d’un Etat sans dire aussitôt sur quel régime de propriété il repose, comme il est tout à fait impossible de parler de régime de propriété sans indiquer par la même occasion, quel est l’Etat qui se profile derrière lui. La question est de savoir ; que signifie le droit de propriété quand il emprunte la voie de l’étatisation ?

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En Algérie, l’Etat a pris corps à partir de l’Armée et de l’administration et non d’une bourgeoisie et de la classe ouvrière, il s’impose à la société. Nous sommes en présence d’un Etat qui tire sa légitimité de l’armée et sa substance d’une rente énergétique. Les entreprises publiques en Algérie, minées d’emblée et à tous les niveaux par des comportements plus proches de la jouissance individuelle de privilèges acquis par le réseau de cousinage, de copinage et de « coquinage » que de la déontologie professionnelle ou de l’éthique morale sont devenues très tôt des agents par excellence de la redistribution de la rente pétrolière et gazière à des fins de légitimation de pouvoir.

Vivant exclusivement de la rente, l’Etat peut se permettre de ne pas développer une production propre en dehors des hydrocarbures et rien ne l’empêche d’établir des relations clientélistes avec les acteurs économiques et sociaux.

Partant du principe sacro-saint que tout problème politique, économique ou social a une solution budgétaire. Comme le budget est constitué essentiellement de recettes fiscales pétrolières, l’Etat jouit d’une grande autonomie par rapport à la population puisqu’il est capable de fonctionner et de renforcer ses services sans recourir à l’impôt ordinaire. L’essentiel du jeu économique et sociopolitique consiste donc à capturer une part toujours plus importante de cette rente et à déterminer les groupes qui vont en bénéficier.

Les revenus pétroliers et gaziers génèrent un « faux sentiment de sécurité » qui poussent les autorités à considérer le protectionnisme comme un luxe que le pays peut se permettre de ne pas investir dans le capital humain. La rente pétrolière et gazière agit comme « un chèque à blanc » donné à l’irresponsabilité, au clientélisme et au report des réformes structurelles.

L’éthique du travail s’affaiblit, la productivité s’écroule, les dépenses s’envolent, la corruption se généralise, le pouvoir d’achat baisse, l’inflation galope, les émeutes se multiplient, la répression devient aveugle. Bien que découpées en multiples unités économiques et habillées artificiellement en filiale, les EPE ne sont en vérité qu’un fragment d’un tout indifférencié qu’est l’Etat, à la fois propriétaire et entrepreneur, actionnaire et administrateur, administrateur et gestionnaire, gestionnaire et comptable, client et fournisseur, maître d’œuvre et entrepreneur, banquier et client, client et entrepreneur, créancier et débiteur, contrôleur et contrôlé, employeur et syndicat, administration et administré, percepteur et redevable, bourreau et victime, socialisant les pertes et privatisant les profits. Un dicton populaire de chez nous illustre bien la situation : « Ellaab Hamida, Gawahid el leba Hamida, Erracham Hamida Fi Dar Hamida » c’est-à-dire être juge et partie.

Ces EPE ne peuvent en aucun cas faire faillite. Par conséquent, la responsabilité dans le secteur public peut être une source d’un pouvoir illimité sur les ressources publiques comme elle peut s’exposer à des sanctions arbitraires. Tout dépend des protections dont on dispose ou du rapport de force du moment. Les dirigeants d’entreprise ont une forte ambition personnelle mais n’en ont aucune pour leur entreprise.

Et pourtant, l’avenir du pays est dans la création des richesses et la production des biens et services, c’est l’affaire de l’entreprise ; c’est l’utilisation des vices de chacun pour le bien de tous. Quant à la vertu c’est l’affaire de l’Etat. Malheureusement, « L’anarchie est partout quand la responsabilité n’est nulle part ». Dans une situation anarchique, ne triomphent que la malice et la ruse jamais l’intelligence et l’honnêteté.

En effet, On vous bande les yeux et on vous dit de voir. On vous bâillonne la bouche et on vous dit de parler, On vous ligote les bras et on vous dit de travailler, On vous attache les pieds et on vous dit de marcher, On bétonne la terre et on vous dit de labourer, on importe du blé et on vous demande de semer, on vous invite à produire et on vous interdit d’investir.

On vous dit une chose et on fait son contrarie. On fait ce que l’on ne dit pas et on dit ce que l’on ne fait pas. Mais il est impossible de vous empêcher de penser, et quand vous pensez, vous devenez libre, Libre de voler comme l’oiseau dans le ciel, en regardant les hommes voler sur terre, … la terre … de leurs enfants !!!

Auteur
Dr A. Boumezrag

 




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