21 novembre 2024
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Kateb Yacine : l’engagement au cœur de l’œuvre créative

Kateb Yacine.

Je ne sais pas là où j’ai lu ceci : « Un monde sans artiste serait un monde sans abeille. Car l’artiste est un butineur des consciences, un pollinisateur des âmes ». J’ai pensé directement en recopiant cette citation à un écrivain du terroir, un des nôtres, en l’occurrence Kateb Yacine.

Kateb Yacine, est un homme de plume qui a vécu avec son peuple et a tout partagé tout avec lui. Il était dans l’osmose active. C’était un artiste complet, un poète au cœur de la société, un résistant contre les idéologies rétrogrades et obscurantistes qui gênent la marche de son pays vers le progrès. Kateb était ce que le romancier allemand Günter Grass appelle « l’homme anthropo-social ».

Autrement dit, l’homme immergé dans les tripes de sa société, l’homme ancré dans les subjectivités et les émotions intimes de son peuple, l’homme plongé dans ce qu’elle (sa société) a de fondamentalement propre : son affect.

Un écrivain qui ne « s’ancre pas dans la douleur de sa société » (le mot est de Rachid Boudjedra), est plutôt perçu comme mort! Naguib Mahfoud n’a jamais écrit sur un autre pays à part l’Egypte et en particulier sa ville natale, le Caire, est universellement célébré. Mais pourquoi? Parce qu’il était engagé sur le terrain.

Orhan Pamuk n’a jamais quitté Istanbul, sa ville de cœur, et pourtant son œuvre est mondialement connue. Pourquoi ? Parce qu’il est un homme de plume engagé auprès des siens, il était près de son peuple, il lui partage tout, surtout ce « fameux patrimoine culturel de la douleur ». Il y a comme une communauté de destin affectif entre eux et leurs peuples respectifs. Sans cela, ils ne seraient jamais arrivés là où ils sont classés actuellement au niveau mondial.

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Pour Kateb Yacine, point de littérature sans engagement ni prise de position en faveur des causes justes, au rang desquelles se trouve celle du Vietnam et de la Palestine. C’était, somme toute un intellectuel de la Cité, tourné vers l’universel.

Cela dit, ce n’est pas seulement l’œuvre qui parle pour un écrivain, mais aussi ses actions sur le terrain, ses prises de positions, son courage, sa résistance face à l’obscurantisme des intégrismes et des dictatures, son franc-parler. Etre best-seller à Paris, à Londres ou à New-York ne voulait aucunement dire que l’écrivain en question est une « idole », un « monument » ou un « symbole » littéraire.

Si c’était cela le critère requis, Marc Lévy qui est l’écrivain « romantique » le plus lu et le plus vendu en France, serait sur cette échelle-là, le mieux coté que Voltaire ou Jean-Paul Sartre, les philosophes tant engagés et célébrés partout dans le monde. Foutaise !

L’engagement social, culturel, politique de l’écrivain et de « l’intellectuel » en général est important, voire nécessaire pour monter sur l’échelle de la considération et de la consécration. Et si jamais un auteur se distingue sans ce critère-là, il ne sera qu’un effet de mode qui allait être emporté avec le temps par les flots de l’oubli.

Kamal Guerroua

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