25 novembre 2024
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La dictature de la médiocrité !

Les Algériens sont sortis par millions pour dénoncer le système arbitraire en place depuis 1962.

Au lendemain de l’indépendance, la petite bourgeoisie algérienne voit toutes ses possibilités d’ascension ouverte. Elle prend le pouvoir à un moment où l’Etat  est fragile. Elle n’a pas meilleure opportunité que de s’investir dans l’appareil de l’Etat post colonial.

Le départ des colons à l’indépendance a créé un vide à tous les niveaux et dans tous les secteurs. Au niveau de l’administration, les petits fonctionnaires  sont survalorisés par le départ des fonctionnaires français ou assimilés et à la différence des moudjahidines, ils savent comment fonctionne l’appareil de l’Etat colonial. Il a donc fallu non seulement les garder mais en plus les ménager voire leur offrir un statut social privilégié. Le débat était semble-t-il dans le choix entre des gens compétents techniquement mais politiquement peu sûrs ou des militants nationalistes mais incompétents.

Quant aux cadres dirigeants des entreprises publiques et des administrations désertées par les français, issus du mouvement nationaliste et de l’élite universitaire, ils pouvaient tirer, après 1962, un certain pouvoir de valorisation de leur passé patriotique ou de leurs compétences techniques.

La légitimité dont ils se réclament procède presque uniquement  de ce qu’ils ont été les acteurs les plus visibles de la lutte pour l’accession à l’Indépendance et les interlocuteurs privilégiés de l’autorité coloniale. La participation aux instances supérieures du pouvoir suppose comme condition préalable la participation à la guerre de libération nationale.

Les pratiques de cooptation qui prévalaient durant la guerre de libération ont survécu après l’indépendance. Ces pratiques fonctionnent toujours à tous les niveaux de la pyramide politique et économique du pouvoir. Ce comportement s’explique par la volonté des responsables militaires de trouver chez les élites intellectuelles, la compétence technique ou économique qui leur manque pour la gestion des administrations et des entreprises publiques. Cependant, cette collaboration est astreinte à une seule condition : la soumission des intellectuels à la suprématie politique des dirigeants militaires issus de la guerre de libération nationale ».

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L’adhésion à l’idéologie populiste et à la soumission aux chefs historiques, sont les conditions nécessaires à l’intégration dans la hiérarchie. Entre, rester en marge ou participer à la nouvelle société, la majorité choisit la seconde solution, au prix d’une mutilation d’ailleurs compensée par les « avantages du pouvoir ».

Dans le comportement de cette couche au pouvoir, vont être privilégié les réseaux des relations personnelles, de clientèle et de compagnonnage. De plus, toute position du pouvoir est indissolublement une positon d’enrichissement et des redistributions matérielles par les avantages personnels qu’elle procure.

L’assistance et le soutien politique des périphéries, autrement dit, la pérennité du statut et de l’autorité des leaders politiques ne dépendent que de la capacité de ces derniers à mettre en circulation et à distribuer une certaine masse de commodités matérielles.

Il s’agit d’un système clientéliste   fonctionnant  sur la base de loyautés qui ne requièrent aucune croyance dans les qualifications personnelles du leader mais sont très étroitement associés à des incitations et à des récompenses. La concentration entre les mains de la puissance publique de la rente énergétique  et son intervention directe  dans l’activité économique au nom de l’unité et la souveraineté nationale, a permis l’élargissement du secteur public.

Pour se reproduire, le pouvoir est obligé de produire du clientélisme. Le clientélisme occupe une place importante dans les mutations sociales dont l’enjeu principal réside dans le contrôle de l’Etat.

Le clientélisme ne peut être viable et notamment rétributif que s’il se greffe sur les structures étatiques. Il perpétue une situation de domination basée sur un accès inégal aux ressources et au pouvoir.

Cependant cette extension s’est heurtée à la réduction de cette rente, au poids excessif de la dette accumulée et à l’opposition de certaines forces sociales, pourtant favorisées par le système, ou bien, parce qu’ils occupent une place notable au sein de l’appareil de l’Etat ou parce qu’elles contrôlent le secteur privé directement ou indirectement. Le contrôle de l’Etat et de son administration sont un enjeu capital sinon vital. L’enjeu réside  dans une maîtrise de l’appareil de l’Etat par le biais d’une main mise sur les centres principaux d’allocation des ressources.

Ainsi, la couche sociale qui maitrisera l’administration disposera d’un redoutable instrument du pouvoir. Dans ces conditions, l’armée ne pouvait produire que de l’étatisme. Une bourgeoisie d’Etat qui se transforme au fil des années et des sommes amassées en une bande mafieuse faisant fi de l’éthique et de la déontologie professionnelle des éléments qui la composent. La personnalité de chacun se fond et se confond avec le groupe.

A chaque fois que l’on fait de l’Etat ou d’une petite élite, riche et puissante et non de la société toute entière, le principal acteur du développement, on suscite l’apathie générale du corps social et les citoyens se détournent  des structures sociales et politiques organisées.

La précarité de l’Etat est telle que tout développement autocentré qui dépasse les exigences de profit des élites au pouvoir est généralement perçue par celle-ci comme un manque à gagner ou une menace. Ce qui compte avant tout, c’est le maintien du statu quo, même si à long terme cette situation engendre les germes de sa propre destruction ou liquidation.

Le résultat est là, « nous naviguons sans boussole et sans gilets de sauvetage sur une mer agitée vers l’Europe du sud, ce miroir aux alouettes, dans une barque en bois serrés comme des sardines pour finir soit dans le ventre des poissons soit, avec un peu de chance, chez les ONG européennes pour demander assistance.

L’Algérie a arraché son indépendance par l’emploi de la ruse elle a raté son développement par manque d’intelligence. Elle n’a pas su coudre la peau du renard avec celle du lion. Les lions retrouveront les leurs, les lionceaux les rejoindront un peu plus tard, les loups envahiront les villes désertés, les moutons apeurés les prendront pour des chiens de garde, le berger a succombé aux délices de la vie moderne et s’est mis à découvrir le monde vantant la qualité de son cheptel à la recherche de nouveaux pâturages.. L’Algérie paie ses erreurs.

L’indépendance n’est pas un butin de guerre à partager mais une responsabilité à assumer. Un peuple qui n’apprend pas de ses erreurs est condamné à les revivre. « Le plus grand mal que fait un ministre n’est pas de ruiner son peuple, il y a un autre mille fois plus dangereux ; c’est le mauvais exemple qu’il donne » Montesquieu.

Dr A. Boumezrag  

2 Commentaires

  1. Très cher Dr. Boumezrag,
    Le mauvais exemple dont faisait référence Montesquieu se transforme comme par magie en exemple à suivre en Algérie où tout ministre qui ne vole pas et qui ne s’enrichit pas à la vitesse de l’éclair (une espèce en voie de disparition avancée en Algérie) est (malheureusement) considéré comme un looser. En fait, l’exemple à suivre serait plutôt celui du président/ministre/wali/maire/juge/procureur/etc. Qui s’en met plein les poches tout en évitant El Harrach.

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