La junte militaire au pouvoir au Burkina Faso a expulsé samedi soir les correspondantes de deux grands quotidiens français, Le Monde et Libération, nouveau signe de la dégradation de la liberté de la presse et des relations avec la France dans ce pays meurtri par la violence jihadiste.
La junte au pouvoir au Faso ne supporte plus les médias français. Encore moins qu’on parle d’elle en termes acerbes. Deux journalistes de grands médias français viennent d’essuyer la foudres des militaires au pouvoir à Ouaga. Ces expulsions de Sophie Douce du Monde et d’Agnès Faivre de Libération, arrivées dimanche matin à Paris, sont intervenues cinq jours après la suspension de la chaine de télévision France 24 et quatre mois après celle de Radio France Internationale (RFI).
Seuls des médias français ont pour l’instant été ainsi sanctionnés par les autorités burkinabè.
Depuis la prise du pouvoir par le capitaine Ibrahim Traoré le 30 septembre 2022, second coup d’Etat en huit mois au Burkina, les relations avec Paris se sont dégradées, Ouagadougou ayant réclamé et obtenu le départ de l’ambassadeur de France et des 400 soldats français des forces spéciales basés dans le pays.
Début mars, le Burkina a en outre dénoncé un accord d’assistance militaire signé en 1961 avec la France.
Le Monde et Libération ont annoncé dimanche matin l’expulsion de leurs journalistes en dénonçant une mesure « inacceptable » et « arbitraire », qui confirme selon le second « que la liberté de la presse au Burkina Faso est lourdement menacée ».
Le Monde pour sa part « condamne avec la plus grande fermeté cette décision arbitraire », en soulignant que « Sophie Douce, comme sa consœur, exerce pour Le Monde Afrique un journalisme indépendant, à l’écart de toute pression ».
Le directeur du journal, Jérôme Fenoglio, « demande aux autorités locales de revenir au plus vite sur ces décisions et de rétablir sans délai les conditions d’une information indépendante dans le pays ».
Selon Libération, « Agnès Faivre et Sophie Douce sont des journalistes d’une parfaite intégrité, qui travaillaient au Burkina Faso en toute légalité, avec des visas et des accréditations valables délivrées par le gouvernement burkinabè ».
« Nous protestons vigoureusement contre ces expulsions absolument injustifiées et l’interdiction faite à nos journalistes de travailler en toute indépendance », ajoute le journal.
24 heures pour partir
Les deux journalistes avaient été convoquées vendredi à Ouagadougou à la sûreté nationale et ont ensuite reçu l’ordre de quitter le Burkina Faso dans les 24 heures.
Avant son départ, Agnès Faivre avait déclaré à l’AFP que cet ordre lui avait notifié « oralement ».
« J’ai également été convoquée hier (vendredi) à la direction de la sureté de l’Etat. Puis un officier est venu ce matin (samedi) à mon domicile me notifier verbalement que j’ai 24h pour quitter le territoire. Aucune notification écrite, ni motif. J’ai du mal à comprendre et à réaliser », avait pour sa part dit Sophie Douce. Avec AFP