22 novembre 2024
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Accueil360°Le journaliste Zoheir Aberkane : une sentinelle du Hirak !

Le journaliste Zoheir Aberkane : une sentinelle du Hirak !


Chamseddine Sayah, connu sous le pseudonyme Zoheir Aberkane, s’est distingué pendant le Hirak et durant ces cinq dernières années, par sa rigueur journalistique, son professionnalisme, sa bravoure et son engagement militant sincère. Il était la sentinelle, vaillant témoin et veillant sur les enjeux auxquels le pays est conforté

Zoheir est parti très tôt ce matin du mercredi de 3 avril. Quelle funeste journée ! Jusqu’au ultime moment, on a gardé l’espoir et espéré qu’il pourrait se produire un miracle, celui de voir notre Zoheir revenir parmi nous. Et pourtant, on savait qu’il était déjà condamné, au vue du retard enregistré dans sa prise en charge et des moyens de soins dérisoires, dont dispose le CHU Mustapha Bacha.

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Malgré le dévouement du personnel médical, le service des urgences de l’hôpital est dépourvu d’équipements d’urgence de base pour faire face à une hémorragie interne ou cérébrale. Zoheir était victime le 30 mars dernier, quelques minutes avant la rupture de jeûne, d’une hémorragie cérébrale (AVC hémorragique).

Zoheir Aberkane a été conduit aussitôt à l’hôpital. Il était toujours conscient, bien que l’accès à l’hôpital par la rue Hassiba Ben Bouali n’était pas facile en raison de l’organisation ce jour-là du ftour collectif. Il fallait lever les barrières fermant la voie pour permettre à la voiture transportant notre ami de passer.

Zoheir avait conscience que ces minutes de retard sont précieuses et il tenait à le dire à son épouse, qui conduisait la voiture. Il perdra connaissance devant des urgences, désertes à ce moment-là de ftour. Il est resté presque 24 heures dans un coma artificielle, sans la prescription du moindre acte médical pour parer à l’hémorragie cérébrale. Il fallait donc réagir et faire intervenir des réseaux pour qu’on décide de le transférer aux urgences chirurgicales afin de lui pratiquer un drainage, une aspiration du sang noyant son cerveau.

Cette décision consistant à procéder à cet acte médical d’urgence est rapidement confrontée à la réalité de nos hôpitaux, à la pénurie du matériel médical et chirurgical. Il fallait se déplacer à Rouiba pour l’acheter, comme il a été suggéré, ou recourir au système D pour parer à l’urgence. Une sonde a été donc vite bricolée et lui a été installée pour évacuer le sang de son cerveau.

Malheureusement, l’irréversible était déjà franchi. C’était son ultime combat à livrer à l’ignominie ambiante. Il a résisté comme qu’il pouvait. C’était un homme de conviction pour lequel la résistance n’est pas un secret. Il a baigné dedans : sa défunte maman, à laquelle il a rendu hommage il y a quelques jours à l’occasion de l’anniversaire de sa disparition, était de cette sève, de femmes combattantes et battantes.

En tant que jeune lycéen à Blida, Chamseddine Mohamed Khatir Sayah, plus connu ces dernières années sous le pseudonyme de Zoheir Aberkane, s’est engagé à la fin des années 70 dans le mouvement des lycéens et il participera dans les campagnes de volontariat ainsi qu’à d’autres activités, de sensibilisation et culturelles.

Il était l’un des animateurs les plus en vue de la vie culturelle de sa ville natale de Blida. Il animera une troupe théâtrale et des ciné-clubs.

Pendant et après ses études universitaires à l’Institut des langues étrangères à Alger, il a continué à sillonner sa ville pour impulser des petites initiatives, comme celles de création d’un journal à la cité universitaire des filles ou l’organisation des activités culturelles.

Dans les années 80, il commence sa carrière de journaliste et il travaillera dans de nombreux titres avant de fonder avec l’ouverture démocratique un journal régional, Le Nouveau Tell. Il a, en vérité, toujours écrit, que ce soit de la poésie ou des articles journalistiques. Il avait plus de penchant vers le style du reportage.

Il excelle pendant le Hirak à travers ses couvertures de toutes les marches et les procès des détenus d’opinion.

Il passera par la suite à la chronique pour ramasser les événements de la semaine et il l’intitulera « manbar al djoumaa (la tribune de vendredi) ». Il s’affirmera dans les médias alternatifs et leur donnera un sens pour parer à la faillite des médias nationaux traditionnels et à leur soumission au pouvoir.

Il animera ainsi des émissions Web et des sit-in sous forme de zooms sur les réseaux sociaux et sur YouTube de soutien aux détenus d’opinion. Il lancera également sa chaine Alter News Infos pour rendre compte de l’actualité, celle des sans-voix et celle de ceux qui sont ignorés dans les médias publics et leurs affidés.

Tout au long de tout ce travail journalistique, il n’a pas perdu pour autant ses reflexes du vieux militant clandestin de gauche pour protéger et sécuriser les données d’accès à ses comptes de réseaux sociaux ou à ses chaines numériques ainsi que sa vigilance lors des réunions d’organisation ou d’échanges entre militants de Hirak.

Zoheir est parti sans céder un iota de son engagement d’un homme libre, pas une parcelle de sa liberté malgré les intimidations, les arrestations et les poursuites. Il est resté une voix libre et il en demeure. C’est ainsi que meurent les grands hommes.

Youcef Rezzoug

NB : La levée du corps aura lieu au niveau de la cité des 348 logements, Bâtiment 8, cité Said Hamdine, Alger. L’enterrement est après la prière de Dhour au cimetière d’El Alia, à Alger.           

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