21 novembre 2024
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Algérie 2022 : dépenser en laboureur ce qu’on gagne en prince ?

Ain Taya

L’idéologie du développement, la construction de l’Etat et le décollage économique en Algérie ont eu comme conséquence la démobilisation de la société et son indifférence vis-à-vis des problèmes du pays. 

Tout un comportement social à l’égard de la consommation, de l’emploi, et du monde des affaires a été façonné par la rente énergétique. Elle a donné naissance à une véritable débauche des dépenses publiques et à une grande auto-complaisance en matière de politique économique et sociale. Elle a constitué un soporifique en masquant toutes les insuffisances en matière de production  et de gestion. Elle a donné naissance à une classe de privilégiés assoiffés de richesses matérielles surtout d’origine étrangère. 

L’Algérie s’est engagée résolument dans un processus accéléré de déperdition des valeurs à l’issue duquel les besoins de base de la population (se nourrir, se soigner, se vêtir, s’instruire) ne seront plus satisfaits par des services encadrés par la loi mais livrés à des réseaux.

La spécificité de la société algérienne, c’est qu’elle ne permet pas aux forces de s’auto-transformer, de s’autoréguler, de s’accroître. Pour des jeunes frustrés et désespérés, humiliés et brimés par des parents narcissiques, déçus par la politique, écœurés par le sport, n’ont pour toute activité que la recherche d’un emploi qui leur procure une certaine dignité. 

Rapport de la Banque mondiale : le tout médiatique jette le trouble

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Ils ont conscience que le monde qui les entoure est une jungle, il y a des lions et des renards.  En Europe et au Canada, « tu gagneras ton pain à la sueur de ton front », tu es un lion parmi les lions.  Chez toi en Algérie, « tu mangeras du pain à la souplesse de ton échine », tu es un renard parmi les renards. Le français produit son pain à partir de son propre blé, et l’algérien l’importe en pièces détachées. Le français mange assis, l’algérien mange couché « Regda out mangé ». La France pense, l’Algérie dépense. La France a un cerveau à Paris, l’Algérie a un ventre au Sahara. Chez l’un, vous avez un Etat construit sur la participation ; chez l’autre vous avez un pouvoir fondé sur la soumission. 

L’un s’active, l’autre palabre. Parler de droits de l’homme et de démocratie dans une société où la dignité d’un peuple ne coûte que le prix d’une baguette de pain est une « fumisterie.

Parler d’un Etat de droit dans un pays où la quasi-totalité des dépenses de l’Etat sont couvertes par la fiscalité pétrolière et gazière est un signe d’immaturité. On pourra discourir sur la démocratie et les droits de l’homme le jour où le citoyen « lambda » pourra payer de son propre argent « gagné à la sueur de son front » le policier, le soldat, le juge, l’enseignant, l’hôpital, l’école, les soins médicaux etc. Il n’y a pas de démocratie sans développement et non plus pas de développement durable sans une démocratie réelle. 

Les deux vont de pair. On marche avec ses deux pieds, un pied droit et un pied gauche sous l’impulsion d’un cerveau unique. On produit avec deux bras : un bras droit (le capital) et un bras gauche (l’ouvrier). Le jour ne se lève qu’après une longue de nuit de sommeil.

Le soleil de la démocratie ne brille pas d’un seul coup, il monte  progressivement. L’Etat de droit n’est pas du « prêt à importer » ou un « météorite » tombé du ciel. « Dieu nous donne des mains mais ne construit pas des ponts ». C’est une œuvre de longue haleine. L’Algérie a arraché son indépendance par l’emploi de la ruse, elle a raté son développement par manque d’intelligence. 

L’Algérie plongée dans l’incertitude économique 

Avec les années qui passent, la dilapidation des ressources rares, l’usure des hommes de pouvoir, l’obstination à se maintenir en poste malgré l’âge avancé, l’impatience de la jeunesse à se prendre en charge, le poids colossal des problèmes accumulés, l’argent facile ne fascine plus et l’emploi de la force a atteint ses limites. Soixante ans après l’indépendance, on se trouve en présence d’un pays tiraillé par une génération de nationalistes  portée aux commandes par une guerre de libération en phase finale et les exigences d’une jeunesse délaissée avide de progrès économique et de libertés démocratiques. 

Nul n’ignore que la richesse la plus importante de tout pays, c’est le travail de ses habitants, leurs aptitudes, leurs expériences, leurs facultés d’adaptation, leurs comportements, leur sens de l’effort et leur santé mentale et physique. C’est pour avoir nié cette évidence que des nations disparaissent au profit d’autres plus performantes, plus dynamiques et plus clairvoyantes.

Dr A. Boumezrag

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